En joaillerie, les déchets électroniques valent de l'or

  • Les déchets électroniques, dont les circuits imprimés, se métamorphosent aujourd'hui en pièces de joaillerie d'exception.
    Les déchets électroniques, dont les circuits imprimés, se métamorphosent aujourd'hui en pièces de joaillerie d'exception. Adam Smigielski / Getty Images
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ETX Daily Up

(ETX Daily Up) - Plus de 53 millions de tonnes de déchets électroniques ont été générées dans le monde en 2019, dont seulement 17,4% ont été collectés et recyclés. Ils contiennent pourtant des matériaux très coûteux, comme l'or, le cuivre, ou encore l'argent… Des métaux bien connus des joailliers et bijoutiers, bien décidés à ne pas passer à côté de cette manne en lui offrant une seconde vie. Une pierre, deux coups.

La réduction du gaspillage et des déchets constitue aujourd'hui l'un des plus grands enjeux de l'ensemble des industries - agroalimentaire, mode, beauté, technologies - pour amoindrir leur impact sur l'environnement, et préserver la planète. Il s'agit non seulement de privilégier la qualité à la quantité, en vue d'allonger la durée de vie des produits, mais aussi de favoriser la réparation et… la réutilisation. Du côté des consommateurs, cela se traduit par un boom de la seconde main, du côté des entreprises, par un recours croissant à l'upcycling, pratique qui consiste à offrir une plus-value à des objets voués à être jetés. Résultat, les déchets valent aujourd'hui de l'or, et c'est peu de le dire.

57 milliards de dollars jetés ou brûlés

Les déchets électroniques ne font pas exception, bien au contraire. D'après le rapport Global E-waste Monitor 2020, ce sont pas moins de 53,6 millions de tonnes de ces déchets qui ont été produits dans le monde en 2019, et ces derniers devraient même atteindre les 74 millions de tonnes à l'horizon 2030. Un record. Et s'il existe aujourd'hui une foule de solutions pour recycler les objets électroniques en tout genre, seule une infime partie (moins d'un cinquième) est actuellement collectée et recyclée. Un véritable désastre pour la santé, comme pour l'environnement, mais aussi une perte financière considérable. Car l'or, le cuivre, le platine, et l'argent qui composent une grande partie de ces déchets sont évalués à quelque 57 milliards de dollars, qui finissent donc le plus souvent enfouis ou brûlés.

Au regard de la pénurie annoncée de certains métaux, dont le cuivre et l'or, cette mise au rebut sonne comme un paradoxe. Chose qui n'est pas passée inaperçue auprès des acteurs des secteurs concernés, dont la bijouterie et la joaillerie, qui s'intéressent de très près à ces déchets qui représentent aujourd'hui des matières premières (quasi) inestimables. Circuits imprimés, câbles USB, prises… Les déchets électroniques d'hier constitueront partie des colliers, bracelets, et boucles d'oreilles de demain, ou quand la créativité et le savoir-faire se mettent au service de la planète.

Un circuit imprimé façon pendentif

Entre art, design, et joaillerie, Oushaba s'est lancé le défi de "redonner vie à des matériaux oubliés", et plus particulièrement à des déchets électroniques. Née à Londres en 2023, la marque fabrique ses bijoux à la main en Italie à partir de matériaux traditionnels, mais aussi de circuits imprimés de smartphones, de câbles USB, de câbles de charge, et même de prises. Le tout est transformé en fragments qui sont réutilisés dans de l'argent, de l'or jaune, et de l'or blanc recyclés, en association avec des diamants, des rubis, des émeraudes, et autres pierres précieuses provenant, selon la marque, de sources responsables.



La toute première collection, baptisée "Connection Salvaged", ne ressemble à aucune autre, se composant notamment d'un collier pourvu d'un circuit imprimé en guise de pendentif, pavé de diamants et surmonté d'une émeraude, d'une bague ornée de diamants et de câbles de recharge de téléphone portable recyclés, ou encore d'un collier composé d'une chaîne en or et d'une clé USB recyclée en pendentif. Un travail d'orfèvre qui place le déchet au rang d'objet d'art. "Nous voyons des opportunités là où d'autres voient des déchets", souligne le trio à la tête de cette jeune marque engagée.

Une tendance de fond

Si la marque Oushaba a placé la circularité au coeur de son ADN, elle n'est pas la première à avoir transformé les déchets électroniques en pièces de joaillerie. Dès 2018, le constructeur Dell signait avec l'atelier Bayou with Love une collection de bijoux conçus à partir d'or collecté dans certains éléments de ses ordinateurs obsolètes. Une façon de sensibiliser les consommateurs au recyclage des déchets électroniques, tout en montrant qu'une telle démarche créative était possible pour ne pas gaspiller des matériaux aussi précieux.

Les initiatives n'ont cessé de se multiplier en ce sens ces dernières années, à l'instar de la maison de joaillerie Courbet ou de Lylie Jewellery, qui ont recours à de l'or recyclé issu de toutes sortes de composants électroniques. Un phénomène qui n'en est qu'à ses prémices mais qui devrait rapidement prendre de l'ampleur dans l'industrie du bijou, permettant non seulement de faire face à la pénurie de certains matériaux précieux, mais aussi aux montagnes de déchets électroniques qui s'accumulent à travers le monde.



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