Tentative de meurtre à Saint-Affrique : "Je lui en veux de nous avoir manipulés comme ça"

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  • Les cinq accusés sont entends depuis le 11 avril par la cour d'assises de l'Aveyron.
    Les cinq accusés sont entends depuis le 11 avril par la cour d'assises de l'Aveyron. Centre Presse Aveyron - José A. Torres
Publié le
Aurélien Delbouis

Expertises psychiatriques, enquêtes de personnalités et aveux contradictoires au menu de cette deuxième journée d'audience devant la cour d'assises de l'Aveyron.

"Retracer le parcours du mis en examen, des origines de sa famille jusqu'au moment présent." Au lendemain de l'ouverture du procès des cinq individus accusés de tentative de meurtre et de violences volontaires sur deux victimes domiciliées à Saint-Affrique, les jurés de la cour d'assises de l'Aveyron ont eu connaissance des différentes enquêtes de personnalités et rapports d’expertise venus soutenir l’acte d’accusation.

Premier à passer sous le feu roulant des questions, Wolfgang B., un jeune homme de 39 ans actuellement domicilié à Millau, accusé d'être celui par qui la soirée du 3 mars 2020 a conduit aujourd'hui les cinq individus devant le tribunal.

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Ce soir-là, les cinq accusés se rendent au domicile des deux victimes pour en découdre. Motif invoqué dans les différents procès-verbaux : une rixe survenue quelques semaines plus tôt entre Wolfgang B. et les deux occupants du domicile saint-affricain. Une soirée "très alcoolisée" au cours de laquelle les trois hommes en viennent aux mains. Les premiers éjectant finalement W.B. de l’appartement qu'il quittera avec une coupure à la main. 

Avant de se forger une intime conviction quant à la nature des événements, savoir si oui ou non W. B. a sollicité ses connaissances marseillaises pour organiser ce qui apparaît pour les enquêteurs comme une vengeance – ce qu’il dément -, les jurés ont eu hier l’occasion d’en savoir un peu plus sur l’accusé, libre au procès, né en région parisienne en 1983. 

"Une vie singulière"

Des expertises et enquêtes de personnalités présentées à la barre se dessinent le portrait d’un jeune homme "dans sa bulle" commente le président. Un jeune homme, membre d’une fratrie de six enfants, ballotté au sein d'une famille confrontée à des difficultés financières, des expulsions. Une scolarité erratique, entre deux jobs, des épisodes réguliers de mendicité, une rencontre précoce avec l’alcool, une addiction qui naît – avec dépendance psychologique dans un premier temps puis physique – des déménagements tout aussi réguliers au fil des rencontres, d’hébergements provisoires en structure d’accueil d’urgence, d’abord en Bretagne puis entre Saint-Georges-de-Luzençon, Millau et Marseille.

"Une vie singulière" faite de "mouvements, de tumulte à la fois sentimental, affectif, géographique et professionnel", conclut une première expertise, très différente de "l’enfance idyllique" que le mis en cause veut bien présenter à la barre. "Si vous me demandez de dire du mal de mon père, je ne pourrais pas" ânonne le quadragénaire quand il est fait état de l’alcoolisme supposé de ce père aujourd’hui décédé ou quand le témoignage d'une directrice d'école élémentaire se souvient à son sujet d’un "enfant négligé" à "l'hygiène déplorable" et au "tempérament bagarreur".

Pas davantage de réactions quand cette "personnalité instable" qui selon une autre expertise "a du mal à se projeter dans le rôle de père, à tirer des leçons de l'expérience", égrène ses relations personnelles et affectives ou évoque ses huit enfants nés de quatre mères différentes dont trois font aujourd’hui l’objet d’un placement.

Plutôt mutique malgré les injonctions du président "à se déboutonner" devant la cour d’assises, comprendre "déployer librement sa parole", l’accusé se veut plus loquace quand il est question de son rôle supposé de commanditaire dans l’expédition punitive sud-aveyronnaise.

"Je n’ai rien fait dans cette histoire"

"Il réfute les accusations qui sont portées contre lui, valide un expert. Précisant avoir été présent au moment des faits mais de n’avoir exercé aucune violence physique et n’avoir, à aucun moment, voulu porter atteinte à l’intégrité physique des victimes."

Wolfgang B. confirme : "Je n’ai rien fait dans cette histoire moi. Je n’ai rien demandé à personne, ils ont fait ça pour m’aider. Je n’ai même pas mis un coup. Je suis juste monté pour leur demander d’arrêter. Je n'ai rien vu". Déclaration bientôt contestée à la barre par un autre accusé avec qui il a entretenu une relation amicale très forte depuis près de 20 ans. Seul détenu dans cette affaire, Davy M. tient un tout autre discours.

"Je lui en veux de nous avoir manipulés comme ça. Pour moi, c’est ça et je sais que c’est ça. Mais ça sera toujours mon frère. Malgré tout ce qui s’est passé. Même lui, au fond de lui, il le sait. Si on a fait ça, c’est pour lui. Si les autres ont fait ça, c’est pour lui aussi. On a tous bougé pour lui... pour se retrouver là au final." Dénouer le faux du vrai, le mensonge de l’aveu. Voilà désormais pour les jurés tout l’enjeu de ce procès qui doit rendre son verdict le 18 avril.

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