Saint-Rome-de-Cernon : "clientéliste", gestion de l'eau et budget pointés du doigt, le conseil municipal au bord de la rupture

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  • Ils sont six à demander au maire de démissionner.
    Ils sont six à demander au maire de démissionner. Photo - Midi Libre
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À mi-mandat, sept élus n’ont pas voté le budget. La chambre régionale des comptes va être saisie par le préfet et les pouvoirs dans la commune seront suspendus jusqu’à la fin de la procédure.

Les tensions sont vives à la mairie de Saint-Rome-de-Cernon, village de 950 habitants situé à une dizaine de kilomètres de Saint-Affrique (Aveyron). Il y a deux semaines, le jeudi 13 avril, le conseil municipal a rejeté le budget de la commune, sept des quatorze élus ayant voté contre. 

"Que l'on soit clair, le budget n'est pas en déséquilibre, explique Jean-Marie Schmerber, conseiller municipal dans l'opposition. Si on a voté contre, c'est pour mettre en évidence tout un tas de dysfonctionnements." Lui et cinq autres élus (Frédéric Barascud, Xavier Bernat, François Billet, Simon Galtier et Agathe Hinton) ont donc adressé un courrier, à Midi Libre, pour expliquer ces points.

1. "Clientéliste" et "autocrate"

Les signataires du texte accusent notamment le maire, Pierre Pantanella, de "clientélisme". "Un membre du conseil municipal réalise quasiment tous les travaux de la commune, rapporte Jean-Marie Schmerber. Et ce sans appel d'offres ni devis. Cet homme participe d'ailleurs aux votes qui concernent ces travaux, ce qui est interdit par la loi. Et il est membre de la commission travaux." Le maire réplique, sans détour : "Toutes les règles de marché sont respectées".

Deuxième attaque : celle d'un maire "autocrate qui se refuse à déléguer". Agathe Hinton, ex-adjointe élue sur la liste de Pierre Pantanella, raconte avoir été "désapprouvée", lorsqu'elle était en charge des affaires scolaires, au moment du déménagement de l'école. "J'avais pris l'initiative d'aller mesurer la hauteur des portemanteaux pour l'ingénieur, raconte-t-elle. J'ai reçu un message de réprimande du genre 'toute décision doit être validée avant que vous ne donniez une réponse', pour un sujet qui me paraissait très anodin." 

"Ceux qui disent que je fais tout, tout seul, n'y connaissent rien, riposte Pierre Pantanella. Car il y a tellement de choses à faire que c'est impossible, pour un maire, de tout gérer."

2. Critique sur la gestion de l'eau

Le communiqué incrimine également le maire d'avoir mis "en danger sciemment les habitants", en juillet dernier. Raison, d'ailleurs, pour laquelle Nicolas Galières, ancien adjoint en charge des questions liées à l'eau, a démissionné la semaine dernière. "On avait reçu une alerte de l'Agence régionale de santé, sur le hameau de Mélac, comme quoi l'eau était impropre à la consommation. Dans ce cas-là, l'ARS demande d'en informer sa population et de distribuer de l'eau jusqu'à ce que les analyses soient de nouveau bonnes, c'est-à-dire cinq à six jours plus tard. Mais le maire n'a rien fait." Le maire répond que le problème avait été réglé avant même que l'ARS fasse son signalement.

À propos de la politique de l'eau, Pierre Pantanella est attaqué sur d'autres sujets. "Il y a un équipement, qu'on appelle le dégrilleur, qui est censé enlever les gros déchets dans les eaux grises, avant qu'ils n'arrivent à la station d'épuration, explique Agathe Hinton. Ce sont par exemple des tampons ou du papier toilette. Or, ce dégrilleur fonctionne anormalement et le maire le nie. Et depuis deux ans, c'est un employé qui nettoie ces déchets à la main."

"Il y a un gros problème sur ce dégrilleur, reconnaît Pierre Pantanella. Il y a eu des soucis, des réparations, de nouveau une panne. Une entreprise était sur place en début de semaine."

Sur la station d'épuration, un autre point est soulevé. "On a des entrées d'eau claire, explique Nicolas Galières, l'ancien adjoint spécialiste de cette problématique. Et ces eaux pluviales abîment les infrastructures. On s'est réuni, avec le maire et plusieurs partenaires, et on a convenu d'un travail sur deux ans et demi pour comprendre d'où ça venait, avec notamment les employés de mairie, qui connaissent très bien le réseau. J'ai appris que, 48 heures après cette réunion, le maire leur avait interdit de donner la moindre information sur le réseau pluvial." Ce à quoi Pierre Pantanella réplique, ironiquement : "lls disent ce qu'ils veulent... Ce n'est pas comme ça qu'on fait avancer Saint-Rome."

3. Accusations sur les budgétisations

"Une fois par an, les communes peuvent demander des dotations appelées DETR, explique Agathe Hinton. M. le Maire nous avait demandé d'en voter une de 180 000 € pour réaménager un boulodrome, situé à proximité de l'école. Or, justement, pour les enfants, rien n'était budgétisé en matière de trottoirs, panneaux ou feux. M. le Maire nous avait dit qu'on pourrait utiliser l'argent du boulodrome pour faire des trottoirs. Et au final, nous n'avons pas eu cette dotation."

"Il n'y a pas eu de demande pour le boulodrome, oppose Pierre Pantanella. Et pour l'aménagement de l'école, la fibre doit passer. On le fera quand on n'aura plus à scier la route."

"On n'est plus dans une opposition constructive, on est dans une opposition destructive", conclut le maire, face à ces accusations. "Le but n'est pas de nuire pour nuire", promet l'ancienne adjointe Agathe Hinton. "En tant que membre de l'opposition, je tiens à dire que nous n'avons, par exemple, jamais eu de problème à travailler avec M. Galières - élu sur la liste de Pierre Pantanella -, précise Jean-Marie Schmerber. C'est juste avec le maire." 

Les signataires du texte demandent au maire de démissionner. Quatre d'entre eux doivent rencontrer la sous-préfète la semaine prochaine.

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