Hygiène menstruelle : ces pays qui accordent déjà des congés en cas de règles douloureuses

  • Le Japon, l'Indonésie, la Zambie, ou encore l'Espagne, comptent parmi les pays qui ont introduit le congé menstruel dans leur code du travail.
    Le Japon, l'Indonésie, la Zambie, ou encore l'Espagne, comptent parmi les pays qui ont introduit le congé menstruel dans leur code du travail. supersizer / Getty Images
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ETX Daily Up

(ETX Daily Up) - Encore à l'état de débat en France, le congé menstruel a déjà été intégré dans le code du travail de six pays à travers le monde. Mais qu'est-ce que cela signifie concrètement ? Et dans quelles conditions les femmes concernées peuvent-elles s'absenter du travail en cas de règles douloureuses ? A l'occasion de la Journée mondiale de l'hygiène menstruelle, qui se tiendra le 28 mai, tour d'horizon des pays qui accordent déjà des congés menstruels, rémunérés ou non, aux femmes souffrant de règles douloureuses.

Phénomène aussi normal que naturel, la menstruation, autrement dit les règles, a pourtant longtemps été considérée comme un sujet tabou. Ce n'est d'ailleurs qu'en juin 2022 que l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a réclamé que "la santé menstruelle soit reconnue, encadrée et traitée comme une question de santé et de droits humains, et non comme une question d'hygiène". Un grand pas pour la femme, qui voit désormais cette problématique abordée sous un nouveau jour, et notamment dans le cadre du travail, du fait de l'impact des règles douloureuses sur la santé physique et mentale.

En 2021, une étude réalisée par l'Ifop* pour Intimina révélait que près d’une femme sur deux souffre de règles douloureuses, et plus de huit sur dix affirment connaître des désagréments d'ordre psychologique comme de la fatigue, de l'irritabilité, et ou un sentiment de mal-être vis-à-vis de leur corps. Des facteurs qui peuvent se révéler excluants sur les plans social et professionnel, comme le montre un sondage plus récent** mené au Royaume-Uni, également par la marque Intimina, indiquant qu'une part importante des femmes britanniques a déjà éprouvé le besoin de recourir à un congé pour faire face à des règles douloureuses. Encore non intégré au code du travail, que ce soit en France ou au Royaume-Uni, le congé menstruel est pourtant déjà mis en place dans plusieurs pays. Tour d'horizon.

L'Asie, une longueur d'avance

"Seiri kyuka", le congé menstruel en japonais, a été introduit dans le code du travail du pays du soleil levant en 1947, il y a donc tout juste 76 ans. On l'aura compris, le Japon fait figure de pionnier en la matière, d'autant plus que ce dispositif était réclamé par les syndicats depuis les années 1920, mais rien n'oblige pourtant les entreprises japonaises à rémunérer ce congé. Ces dernières doivent seulement respecter les demandes des femmes pour lesquelles le travail se révèle particulièrement difficile durant les périodes de règles. Dans les faits, seules 30% des entreprises proposent un remboursement total ou partiel de ces congés, d'après une étude menée en 2020 par le ministère japonais du Travail auprès de 6.000 entreprises, relayée par l'AFP. Et seulement 0,9% des femmes pouvant obtenir ces congés ont affirmé les avoir pris. Un sondage plus récent, cette fois réalisé en 2021 par Nikkei BP Intelligence Group auprès de 1.956 femmes actives âgées de 18 à 49 ans, révélait que moins de 10% des répondantes prenaient ce congé menstruel, et que plus de la moitié d'entre elles faisaient état d'un "manque de compréhension de la menstruation sur leur lieu de travail".

L'Indonésie est le second pays à avoir introduit le congé menstruel dans son code du travail, en 1948, mais la loi a été modifiée il y a tout juste vingt ans. D'après l'Organisation internationale du travail (OIT), les femmes actives "ont droit à deux jours de congés payés pour le premier et le deuxième jour de leur cycle menstruel". Mais dans la pratique, les Indonésiennes doivent négocier ces jours d'absence, lesquels dépendent donc en réalité de chaque entreprise. "De nombreux employeurs n'accordent qu'un jour par mois, d'autres n'accordent aucun congé menstruel", indique l'OIT. En Corée du Sud, l'article 71 de la 'Korea Labor Standards Law' stipule que les femmes employées peuvent prendre un jour de congé menstruel par mois. "Cet article est entré en vigueur en 2001, mais de nombreuses employées ignorent encore ce qu'il signifie", a rapporté en 2012 The Korea Times. Notons également que ce congé n'est pas rémunéré. A Taïwan, l'Act of Gender Equality in Employment datant de 2014 accorde aux femmes trois jours de congé menstruel par an, lesquels ne sont pas déduits des congés de maladie 'classiques'. Au-delà de trois jours, ils sont "comptabilisés dans les jours de congé de maladie". Les employées concernées ne touchent toutefois que 50% de leur salaire.

L'Afrique et l'Europe à la traîne

La Zambie fait figure de pionnière en Afrique en matière de congé menstruel. Depuis 2015, le pays permet aux femmes de s'absenter une journée supplémentaire par mois en cas de règles douloureuses, et ce sans la nécessité de fournir un certificat ou un préavis médical. A ce jour, la Zambie demeure le seul pays africain à proposer un tel dispositif. Et c'est également le cas en Europe avec l'Espagne, qui a adopté en février 2023 un projet de loi visant à mettre en place un congé menstruel pour permettre aux femmes de faire face aux règles douloureuses. A ce jour, la durée du congé n'a pas été confirmée, mais celui-ci sera pris en charge par la sécurité sociale. Il s'agit ici d'une première européenne qui pourrait ouvrir la voie à la mise en place d'autres dispositifs de ce type ailleurs sur le Vieux Continent, comme en France, par exemple, où le sujet fait actuellement débat.

Il est important de noter que si ces six pays sont actuellement les seuls à avoir introduit le congé menstruel dans leur code du travail, des entreprises à travers le monde ont fait le choix d'accorder cet arrêt spécifique à leurs employées. En France, cela a été le cas dès 2021 avec l'entreprise montpelliéraine La Collective, rejointe récemment par le géant de la grande distribution Carrefour qui ne propose pas un congé menstruel à proprement parler mais des congés supplémentaires pour les femmes souffrant d'endométriose. Saint-Ouen est de son côté devenue en mars dernier la première ville française à instaurer un congé menstruel pour ses agentes. "Ce congé s’adresse aux femmes souffrant de règles douloureuses et incapacitantes ainsi que d’endométriose", a fait savoir Karim Bouamrane, le maire de la ville.


*L'étude a été réalisée en ligne, entre le 17 et le 28 avril 2021, auprès d'un échantillon de 1.010 femmes, représentatif de la population féminine française âgée de 15 à 49 ans.

**Le sondage a été réalisé par Censuswide en mars 2023 auprès de 1.017 femmes au Royaume-Uni.

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