Assises des petites villes de France : comment Millau veut devenir "un laboratoire des villes de demain"

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  • Emmanuelle Gazel, maire de Millau depuis 2020.
    Emmanuelle Gazel, maire de Millau depuis 2020. - V.G.
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Propos recueillis par Ludovic Trabuchet

Emmanuelle Gazel, maire de Millau, accueille jeudi 1er et vendredi 2 juin, les assises des petites villes de France, congrès annuel de l'association du même nom. Elle évoque auprès de Midi Libre, les enjeux de ce rendez-vous, à travers le prisme millavois.

Les tables rondes des assises des petites villes vont évoquer le défi climatique, les mobilités, la désertification médicale, la sobriété foncière… Des sujets qui concernent aussi Millau ?

Bien sûr, on est tous confrontés à ces sujets-là. À Millau, notamment sur le défi climatique. On a été particulièrement touché par ce changement climatique l’été dernier : la canicule, la sécheresse et le niveau très bas de nos rivières qui a perturbé les activités de pleine nature comme le canoë ou le canyoning, l’incendie de Mostuéjouls à 15 km inarrêtable...

On avait déjà un engagement très fort sur ces questions de changement climatique, annoncé dans notre projet sur l’alimentation dans les restaurants scolaires, sur la consommation et les économies d’énergie. On travaille aussi sur la mobilité avec la piétonnisation du cœur de ville… On est vraiment engagé sur toutes ces questions, mais c’est aussi notre héritage altermondialiste. Un autre monde est possible et nous le préparons.

Les petites villes peuvent-elles être un laboratoire de ce changement ?

Complètement. C’est déjà le cas. On a par exemple mis en place l’extinction de l’éclairage public depuis sept ans et on l’a étendu récemment. Sur la question du photovoltaïque sur les toits, le Parc naturel régional des Grands Causses a initié un groupement de commandes, qui permet à toutes les collectivités de faire remonter les surfaces de toit disponibles ce qui permet d’équiper les toits rentables, comme les moins rentables, à la charge de l’opérateur.

Sur la mobilité, considérant que des aides de l’État et de la Région pour l’achat de vélo existaient déjà, on a fait le choix de lancer la location de vélo à 1€ par jour pour trois mois ou six mois. Cela permet aux familles d’essayer et, le temps de la location, de mettre quatre sous de côté. On avait prévu 30 vélos, on a déjà 116 demandes.

Je pourrais encore parler du programme qui prévoit de rénover 700 logements sur le mandat sur le plan thermique et sur l’accessibilité, grâce à des aides de l’État et de la Région coordonnées par la communauté de communes. On est aussi engagé sur un objectif de 100 % bio et local dans les cantines, avec un repas à 1€ pour les familles les plus modestes. Cela permet à la fois de structurer les filières agricoles locales et cela a fait revenir ces enfants dans nos établissements. Tout cela est très vertueux…

Des petites villes inventives… mais il y a peut-être des freins ? Des budgets toujours plus contraints ?

Clairement, le frein principal, ce sont les financements. D’autant plus à Millau qu’on a démarré le mandat dans le réseau d’alerte des finances publiques et que nous tenons à respecter notre engagement de ne pas augmenter les impôts car nous sommes déjà 30 % au-dessus des villes de même taille.

Depuis, il y a eu l’augmentation des coûts énergétique, de tous les matériaux. Les budgets très difficiles à tenir. On attend donc un accompagnement fort de l’État. On peut expérimenter, proposer des choses, on peut être toujours agiles, très innovants, mais il faut des moyens, donc que l’État puisse nous accompagner dans ces innovations…

C’est ce que vous allez demander aux ministres présents à Millau ?

Exactement. Mais aussi un travail sur les normes et contraintes administratives de plus en plus lourdes et difficiles à gérer pour nos petites communes. L’État doit nous accompagner pour alléger certaines contraintes.

La question de l’insécurité va aussi être abordée au cours de ces assises. On a pourtant l’impression que ce problème échappe à des petites villes comme Millau...

Si on se compare aux métropoles, évidemment, nous n’avons pas de souci de sécurité. L’Aveyron est le deuxième département le plus sûr. Mais c’est aussi parce que nous travaillons ce sujet. Nous avons un conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) qui fonctionne bien travaille avec les deux polices, la justice, mais aussi les associations d’éducation populaire, les acteurs locaux, l’éducation nationale.

On est dans la prévention. À l’échelle de nos petits territoires, cela permet d’être davantage en proximité, de pouvoir avoir des échanges facilités et c’est plutôt une force pour expérimenter les choses. Encore faut-il avoir des moyens, et je tiens à notre commissariat local. Avec la crainte, parfois, que parce que les chiffres ne sont pas inquiétants, les moyens soient priorisés sur d’autres zones. Or, tout reste très fragile. Une situation qui dégénère peut avoir des conséquences préjudiciables et durables. C’est un travail au quotidien aussi dans nos petites villes.

Les agressions d’élus, cela vous concerne aussi. À portée d’engueulade dit-on souvent...

La proximité, c’est une richesse. C’est aussi ce qui fait que le mandat de maire est le plus beau, en contact direct avec nos concitoyens. Mais la proximité ne doit pas empêcher le respect. Moi, je tiens des permanences sur le marché, on va dans les quartiers… Le lien direct, il m’est cher comme le débat contradictoire, mais dans le respect de chacun. Les dérives sur les réseaux sociaux, sous couvert d’anonymat, sont dramatiques.

Ces assises des petites villes, c’est aussi un coup de projecteur sur Millau ?

Évidemment. On est ravis d’accueillir ces personnalités, nos collègues élus maires des petites villes. On est très heureux, et cela va continuer au-delà des assises avec le raid nature des collectivités qui va se dérouler tout le week-end avec des agents autour d’une compétition sportive. C’est une chance et l’occasion de faire découvrir notre territoire varié.

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