"Il faut redonner du pouvoir au maire" : à Millau, les petites villes se présentent en laboratoire de la transition climatique

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  • Christophe Béchu, le ministre de la Transiton écologique, est venu à la rencontre des maires.
    Christophe Béchu, le ministre de la Transiton écologique, est venu à la rencontre des maires. Michael Esdourrubailh
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Ludovic Trabuchet

L’Association des petites villes de France (APVF) a ouvert ce jeudi son congrès annuel, à Millau. Ces communes, de 2 500 à 25 000 habitants, ont mis la question écologique au cœur de leur action.

D’un témoignage de maire à l’autre, des mots reviennent souvent. Désimperméabilisation. Rénovation énergétique. Neutralité carbone. Autoconsommation.

Aux assises des petites villes de France, le congrès annuel de l’association qui fédère les communes de 2 500 à 25 000 habitants, la transition climatique et énergétique est un vrai fil rouge. "C’est le temps de l’action et pour agir, il faut être en proximité, décliner celle-ci de façon spécifique en fonction des territoires. Ça se passe à votre niveau", a lancé Nadia Maïzi, co-contributrice du VIe Rapport du Giec, à des élus très attentifs, réunis au théâtre de Millau pour deux jours.

Cantines bios, géothermie, rénovation...

Plusieurs d’entre-eux ont illustré concrètement ce qu’ils ont lancé sur leur territoire. Le maire de Saint-Maixent-L’École, dans les Deux-Sèvres, a d’abord diminué de 30 % sa consommation de gaz et d’électricité en régulant le chauffage des bâtiments communaux, une première étape avant un travail de plus grande ampleur par la géothermie ou la production d’électricité.

Son homologue de Bourg-de-Péage, dans la Drome, a revu ses priorités d’investissement pour rénover l’école, une vraie passoire thermique, et revoir la déambulation - sans voiture - dans le centre-ville. À Millau, la cantine sera bientôt alimentée à 100 % par des produits bios et d’ici. À Pibrac, à côté de Toulouse, l’édile veut faire de la gare un vrai lieu de vie et de services pour inciter ses administrés à privilégier le train. Entre autres exemples.

Un mur d’investissement

"C’est le moment de mettre la surmultipliée", a encouragé le président de l’APVF Christophe Bouillon. Un message qui s’adressait autant aux maires... qu’au ministre de la Transition écologie et de la Cohésion des territoires Christophe Béchu, venu ouvrir les débats. "On parle d’une somme de 13 milliards d’euros nécessaires pour financer ces travaux. C’est un véritable mur d’investissement, il faudra nous aider", a-t-il lancé au représentant du gouvernement, réclamant la pérennisation du fond vert ou de nécessaires subventions pour répondre au plan qui prévoit de rénover 10 000 écoles.

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Zen avec le Zan... Les annonces du ministre

"Zen avec le Zan", c’était la dernière table ronde du jour. "Zan" pour zéro artificialisation nette des sols en 2050, futur casse-tête pour les maires qui devront, dans un premier temps, réduire de 50 % d’ici 2030, la consommation d’espaces naturels. Christophe Béchu n’a pas assisté au débat, mais le matin, il avait déjà fait des annonces sur le sujet, alors que les règles sont encore attendues par les élus. Il a rassuré sur le fait que les projets économiques d’intérêt majeur ou les grandes infrastructures pourraient ne pas être pris en compte, comme le demande la présidente de Région Occitanie Carole Delga. Mais il a prévenu aussi : il faudra atteindre l’objectif. "En 50 ans, on a autant artificialisé qu’en 500 ans. On a même, en France, le record du m² artificialisé par habitant, et 54 % de ces sols ont été utilisés pour faire des lotissement de 8 logements par hectare". CQFD.

Le ministre n’a pas ouvert son portefeuille, mais a tout de même rappelé quelques dispositifs bien garnis, "2 milliards d’euros pour le fond vert qui ont généré 12 116 demandes. Quand on confie de l’argent à travers des dispositifs d’investissement, il est bien employé", a-t-il déroulé. Mais il a aussi rappelé les enjeux. "L’intitulé du ministère dit que la transition passera par les territoires. Il faut embarquer tout le monde. Un bout de la réponse, c’est la décentralisation. Il faut redonner du pouvoir au maire". Applaudissements.

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Assouplir

"C’est bien. Mais il faudra aussi assouplir certaines règles", commentait en aparté le maire de La Grande-Motte Stéphan Rossignol, qui aura mis cinq ans pour obtenir l’autorisation de réutiliser les eaux usées pour arroser son golf et les espaces verts. La volonté est là, le chemin est encore long.

250 manifestants, le ministre répond

La promulgation de la réforme des retraites n’a pas effacé la contestation. Le théâtre de Millau a dû être mis sous bonne garde policière dès potron-minet, pour éviter au ministre Christophe Béchu d’être accueilli par quelque 250 manifestants armés de casseroles et banderoles. Il y a eu des bousculades et affrontements stoppés à l’aide de gaz lacrymogène. Deux personnes ont été interpellées et une femme a été hospitalisée, blessée au coude dans une chute. Dans la salle, Christophe Béchu a été apostrophé par la maire de Millau, Emmanuelle Gazel, qui a regretté que "les conditions du débat public n’ont pas été réunies sur les retraites". Le ministre lui a répondu, rappelant que cette réforme était un engagement de campagne du chef de l’État. "Quand un maire promet de piétonniser le centre-ville, il ne recule pas devant la première pétition et ce n’est pas pour autant qu’il méprise les opposants", a-t-il ajouté, référence au projet qui voit le jour à… Millau.

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