Les chefs s'engagent (aussi) pour l'Humanité

  • La cheffe turque Ebru Baybara Demir a reçu le Basque Culinary World Prize pour son engagement tant auprès des victimes des tremblements de terre en Turquie que des réfugiés syriens La cheffe turque Ebru Baybara Demir a reçu le Basque Culinary World Prize pour son engagement tant auprès des victimes des tremblements de terre en Turquie que des réfugiés syriens
    La cheffe turque Ebru Baybara Demir a reçu le Basque Culinary World Prize pour son engagement tant auprès des victimes des tremblements de terre en Turquie que des réfugiés syriens Tansel Baybara
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ETX Daily Up

(ETX Daily Up) - Soutien aux populations en temps de guerre ou après un tremblement de terre, distribution de denrées alimentaires après un ouragan, programme de lutte contre l'obésité... Les chefs sont des personnalités engagées, et pas seulement quand il s'agit de vanter les mérites d'une agriculture respectueuse de l'environnement et de l'humain. C'est ce qu'honore le prix mondial culinaire basque qui vient d'être attribué à une cheffe turque, pour son engagement en faveur de réfugiés syriens.

Mise en valeur d'un ingrédient local, histoire de producteurs, valeurs éthiques autour d'une filière alimentaire... A juste titre, les cuisiniers médiatiques répètent à souhait combien ils aiment mettre en avant ceux et celles qui leur ont fourni la matière première de leur travail. De cette façon, ils pensent s'engager et mieux les respecter. On le sait moins mais les chefs défendent aussi les valeurs humaines en prêtant main-forte lors de situations extrêmes comme quand une guerre éclate ou qu'un tremblement de terre tue plusieurs milliers de personnes. Bien sûr, on a tous encore en tête l'engagement du chef José Andrés au lendemain du début de la guerre en Ukraine. L'Espagnol naturalisé Américain a fondé l'association World Central Kitchen en 2010 après le tremblement de terre en Haïti. Son équipe débarque alors sur l'île pour apporter vivres et produits de première nécessité. L'organisme a bâti depuis sa réputation en intervenant à la suite de catastrophes naturelles telles que l'ouragan Maria à Porto Rico en 2017 ou l'ouragan Ida à La Nouvelle-Orléans en 2021. La dernière intervention remarquée de José Andrés a été réalisée auprès des réfugiés ukrainiens, à la frontière polonaise. L'action de World Central Kitchen a d'autant plus fait parler qu'un missile russe avait détruit au printemps 2022 l'un de ses trains de marchandises posté à l'est de l'Ukraine.

La cuisine comme outil de changement pour un monde meilleur

Depuis 2016, l'institut culinaire basque (Basque Culinary Center) honore ces chefs qui s'engagent auprès de ceux qui en ont le plus besoin, ce qui vaut à la récompense d'être surnommée le prix Nobel de la gastronomie. Il s'agit d'utiliser la cuisine comme un outil de mutation. Le prix espagnol, à dimension internationale, consiste à "distinguer des chefs qui utilisent leur savoir, leur talent, leur créativité et leur influence pour faire changer la société", explique le BCC. Et le changement peut concerner moults domaines. En 2023, le jury, constitué de pointures de la gastronomie comme Joan Roca, Gaston Acurio ou encore les Français Michel Bras et Dominique Crenn, démontre par exemple que la cuisine peut être un outil d'intégration. Originaire de Turquie, la cheffe lauréate, Ebru Baybara Demir, vient de la ville de Mardin, située près de la frontière syrienne, point de chute de nombreux réfugiés syriens. Elle orchestre la réunion des populations turque et syrienne dans un projet intitulé "From soil to plate" (de la terre à l'assiette) qui consiste à combattre le chômage des femmes en remettant les pratiques agricoles ancestrales au goût du jour. Son engagement avait déjà été applaudi par la Fondation Yves Rocher avec le prix Terre de Femmes en 2019. Récemment, la cheffe Demir a démontré sa philanthropie en venant en aide aux victimes des deux tremblements de terre qui ont secoué la Turquie en février dernier, et qui ont fait plus de 50.000 morts.

Ce prix Nobel de la gastronomie démontre combien les cheffes sont au coeur des changements. En 2022 déjà, une femme était honorée. Fatmata Binta avait reçu le prestigieux prix pour son engagement à mieux faire reconnaître la culture peule dont elle est l'héritière. La cuisinière originaire de Sierra Leone a également lancé une fondation au Ghana pour donner l'opportunité aux femmes de devenir propriétaires de terres à travers la culture et la commercialisation du fonio, une céréale d'Afrique Occidentale qui prend dernièrement la lumière pour ses capacités d'adaptation face à la sécheresse. En ces temps de dérèglement climatique, son utilité trouve ainsi tout son sens.

Il y a les femmes, mais les enfants aussi... En 2021, le prix mondial culinaire basque avait mis en lumière l'importance de l'éducation culinaire. Un thème central dans l'action de la fondation espagnole du chef espagnol Xanty Elías qui oeuvre pour la structuration de menus plus sains pour les enfants. La participation des chefs à un changement sociétal n'a pas qu'une dimension sociale. Les cuisiniers agissent aussi pour la planète. La preuve avec le système du chef californien Anthony Myint, intitulé "Zéro FoodPrint", qui consiste à prélever 1% du montant d'une addition au restaurant pour reverser les fonds à des agriculteurs. Le but est de stimuler le déploiement de l'agriculture régénérative, un concept agricole en phase avec la permaculture qui incite les producteurs à préférer le pâturage pour que le dioxyde de carbone contenu dans l'atmosphère soit emmagasiné dans le sol.

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