Aveyron : les écoles rurales sont-elles déjà condamnées ?

  • RENTREE ECOLE PRIMAIRE PAUL GIRARD
    RENTREE ECOLE PRIMAIRE PAUL GIRARD PIXROD PIXROD José A. Torres
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Olivier Courtil

Enseignement. Inexorablement la désertification rurale se poursuit. Saint-Hippolyte en fait les frais dès cette rentrée en fermant sa dernière école. D’autres bourgs à classe unique "résistent" tant bien que mal. Jusqu’à quand?

"J’arriverai à finir mon mandat avec l’école". Soulagé, Didier Eche, le maire de Golinhac, sait que l’école (privée), la dernière sur la commune, est sur le fil du rasoir. Un logement a été rénové pour tenter d’attirer des nouvelles familles. L’accueil, c’est l’unique action que peuvent mener les communes rurales dont la population continue inexorablement de décliner. Des villages dont les élus restent les yeux rivés sur le quota d’élèves exigé et sont stressés par des annonces de fermeture. Ce fut le cas à Conques qui a eu chaud cet été ou encore à Saint-Symphorien-de-Thénières qui a appris sa fermeture puis sa réouverture au cours de l’année 2011…"Nous avons dix enfants à cette rentrée, on tient le coup",confie le maire Émile Desmons. "L’école fait partie de la vie du village. Si elle ferme, c’est beaucoup de route pour des enfants et c’est l’esprit du village qui se perd"poursuit l’édile, conscient que l’école est le dernier service public du bourg, lien social par excellence. 

Un milieu rural qui se vide

À Saint-Hippolyte en revanche, le couperet est tombé. L’aventure scolaire s’est achevée avec six enfants annoncés pour cette rentrée. Comme toujours, la vie de l’école est entre les mains d’une famille qui s’installe ou s’en va. "Je me mets à la place des parents, avoir un enfant tout seul dans une section, ce n’est pas intéressant pour la motivation. On l’avait échappé belle l’an dernier, nous étions en sursis, la seule condition étant de retrouver des enfants", résume le maire Didier Cayla, qui voit tour à tour l’hôtel puis la dernière école de la commune -qui en a compté jusqu’à cinq- se fermer.

"On a maintenu l’école à bout de bras pendant 12 ans, on s’est toujours battu mais le constat est là, le milieu rural continue de se vider."  Chiffres à l’appui avec le prochain recensement annoncé en fin d’année, le bourg passe de 456 à 441 habitants. "Et encore, on limite la casse par rapport à d’autres". Si des communes rurales, bénéficiant de la proximité des zones urbaines fleurissent -à l’instar de Druelle qui accueille cette année 187 enfants-, les campagnes se meurent faute d’attractivité liée à l’enclavement. "L’Aubrac souffre d’être loin des centres urbains, de l’académie", dit en ce sens Jean-Luc Tornero, représentant FSU. 

La fin des réseaux d’écoles  (RPI)

Pour tenter d’enrayer cette spirale, "un diagnostic sur la politique enfance jeunesse a été lancé l’an dernier au niveau de la communauté de communes de Laguiole-Aubrac avec celles de Saint- Amans et Sainte-Geneviève pour garder et attirer les jeunes", espère Geneviève Gasq-Barrès, maire de Condom-d’Aubrac. Au manque d’attractivité conjugué à l’absence de services et de loisirs, s’ajoute la fin des réseaux d’écoles l’an dernier. "L’inconvénient est pour les écoles à classe unique et les RPI (regroupements pédagogiques intercommunaux, NDLR)", constate Sébastien Ségur, secrétaire départemental de l’Union nationale des syndicats autonomes (Unsa) de l’Aveyron. Ainsi l’une des écoles du RPI de Saint-Victor-et-Melvieu dans le Saint-Affricain, a fermé ses portes lors de cette rentrée. "À force de supprimer des postes, on est sur la ligne de crête pour les créations de postes comme pour les fermetures", peste Jean-Luc Tornero. Certes.

Difficulté de recrutement

Mais il y a aussi la difficulté à recruter dans les zones rurales enclavées. Le représentant syndical en convient: "On a effectivement peu de personnel qui a envie de partir au fin fond du monde. D’autant que le personnel est rajeuni et féminisé et qu’on recrute sur l’académie (les huit départements de la Région Midi-Pyrénées, NDLR) où peu d’enseignants réclament l’Aveyron". Un constat qui fait écho à la pénurie de médecins.

Une réforme qui passe mal

Enfin, les nouveaux rythmes scolaires - admis en théorie - font grincer des dents sur leurs pratiques au risque d’achever la ruralité. "Les moyens ne sont pas donnés avec des activités périscolaires en doublon et des ateliers vides." Comme le résumait hier dans nos colonnes Jean-Louis Grimal, président de l’Association départementale des maires de l’Aveyron: "C’est le commencement de la fin pour les écoles rurales." Sans oublier la problématique des transports scolaires. Alors que 276 écoles publiques ont rouvert pour cette rentrée, Saint-Hippolyte a rangé ses cahiers. "On n’a pas encore vidé l’école. On va faire bénéficier du matériel aux autres communes", conclut Didier Cayla. 

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