La «Caroline chérie» du majordome et de l’antiquaire

  • Sur ce tapis de photos, un portrait du studio Harcourt, un livret de musique avec Luis Mariano avec qui l’actrice eut une liaison, une photo de Martine Carol dédicacée: «À vous mes vrais amis, merci et toute mon affection».
    Sur ce tapis de photos, un portrait du studio Harcourt, un livret de musique avec Luis Mariano avec qui l’actrice eut une liaison, une photo de Martine Carol dédicacée: «À vous mes vrais amis, merci et toute mon affection». Myriam Laffont
  • Patrick Mercurin rêve de partager son trésor : «Je suis tout disposé à prêter ses souvenirs à la médiathèque ou à Capcinéma pour une exposition temporaire !»
    Patrick Mercurin rêve de partager son trésor : «Je suis tout disposé à prêter ses souvenirs à la médiathèque ou à Capcinéma pour une exposition temporaire !» Myriam Laffont
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Myriam Laffont

Nostalgie. En faisant l'acquisition des souvenirs du majordome de Martine Carol, qui fut la Marylin française, Patrick Mercurin, l’antiquaire, est devenu le dépositaire ému de quelques pans de la vie romanesque et tragique de Martine Carol, la star des années 50.

" C’est ce qui me met la chair de poule. On est en plein dedans!" Patrick Mercurin relit la coupure de presse jaunie de Nice Matin. Nous sommes en 1962, l’actrice Martine Carol a fait une nouvelle fois une tentative de suicide dans sa propriété de Grasse. Les poignets entaillés, la star aussi blonde et pulpeuse que Marylin a tenté de se défenestrer; Gilbert, son fidèle majordome, jardinier, homme à tout faire est arrivé à la maîtriser. Calmée, l’actrice préférée des Français se repose désormais en clinique privée et se prépare à tourner outre Atlantique sous la direction d’Aldrich aux côtés d’Ava Gardner. Happy end pour cette fois-ci.  "Je l’aime bien cette femme. Sa destinée a été tragique et la retrouver à travers son courrier, ses photos, ses décorations de Noël et même son électrocardiogramme est très émouvant. " 

Dans l’appartement de l’antiquaire retiré dans l’Aveyron, un meuble à vitrine fait office de malle aux trésors. Il y a là une figurine de chouette offerte à l’occasion de l’ouverture à Montech du magasin d’antiquités de Patrick, l’ancien élève de l’école Boulle, il y a là des figurines de Dinky Toy, des souvenirs, des amulettes et puis cette grande enveloppe épaisse et ces deux cartons où palpitent la mémoire de Martine Carol, dont on comparera plus tard le destin tragique à celui de Marylin ou de Romy Schneider, " mortes épuisées, broyées par le système ".

De Caroline chérie à La guerre des boutons

C’est en 2001, alors qu’il tient boutique sous l’enseigne Au grenier de Montech, que Patrick fait acquisition de ces reliques, cédées par Suzanne, la veuve de Gilbert, le factotum de Martine Carol. Des photos, des courriers personnels, des petits textes, des articles de presse, de délicates décorations de Noël de verre soufflées à la bouche, les brodequins de neige de Martine (taille 37), un billet de banque de l’Indochine dédicacé de la star au fidèle Gilbert (« Merci, je vous embrasse »), une trentaine de santons "beaux comme tout". "Le majordome tenait à ces objets comme à la prunelle de ses yeux!" 

L’antiquaire n’a jamais proposé à la vente ces articles qui auraient fait le bonheur des nostalgiques de celle qui restera pour l’éternité « Caroline chérie » , l’égérie cinématographique du best-seller de Cécil Saint-Laurent. Par un étrange tour de passe-passe, Patrick devient à son tour le dépositaire de ce mausolée précieux où se lit en filigrane le destin d’une actrice scintillante: "J’ai quelque chose que personne n’a." Cette filiation quasi amoureuse peut aussi s’expliquer par l’enfance de Patrick.

"Fernand Raynaud et de sa vieille Mercedes blanche"

Élevé à Montmartre, quasi sur la place du Tertre, le Poulbot de la butte est l’ami des peintres qui croquent la bouille de ce gamin aux grandes mirettes que le tourbillon de la vie et du show-biz émerveille. Avec un appartement familial situé au dessus d’un restaurant branché, le titi parisien côtoie en effet les stars de l’époque et se rappelle 50 ans après avec vivacité de "Fernand Raynaud et de sa vieille Mercedes blanche". Surtout, Patrick a partagé le casting de La guerre des boutons sur les bancs de l’école communale avec Martin Lartigue, immortalisé en Petit Gibus clamant dans La guerre des boutons: "Ben, mon vieux, si j’aurais su, j’aurais po v’nu."

Patrick a peut-être gardé de ses jeunes et belles années un goût suranné pour les paillettes filantes que laissent derrière elles les stars au firmament. Dans les années 60, dans ce quartier radieux de Montmartre, le petit Patrick avait les yeux brillants en croisant dans sa rue ceux qui faisaient les belles heures du grand et du petit écran. Aujourd’hui, froissant les lettres et les photos de Martine Carol, ce sont les mêmes yeux qui dévorent la bouille d’un vieux titi, bel amoureux transi.

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