Art: un plongeon métaphysique dans l'univers de Bill Viola

  • Le vidéaste américain Bill Viola le 21 novembre 2009 après une visite à la Chapelle Sixtine au Vatican
    Le vidéaste américain Bill Viola le 21 novembre 2009 après une visite à la Chapelle Sixtine au Vatican AFP/Archives - Filippo Monteforte
Publié le
AFP

Le Grand Palais propose à partir de mercredi une plongée dans l'univers métaphysique du vidéaste américain Bill Viola, en lui offrant sa première rétrospective en France.

L'exposition, qui se tient jusqu'au 21 juillet, retrace quarante ans de carrière d'un des plus célèbres représentants de l'art vidéo, avec vingt œuvres envoûtantes, mobilisant plus de trente écrans et représentant plus de six heures d'images.

L'artiste, 63 ans, et son épouse Chira Perov, co-commissaire de l'exposition, ont souhaité qu'elle soit conçue comme un voyage organisé autour de trois questions philosophiques "Qui suis-je?, Où suis-je? Où vais-je?".

Pendant le parcours, dans l'obscurité, le visiteur chemine seul, sans audioguide ni panneaux pour lui expliquer la démarche du vidéaste. "C'est au spectateur d'être actif devant des œuvres qui ne prétendent pas apporter de réponses", souligne Jérôme Neutres, co-commissaire de l'exposition.

L'exposition commence par "The reflecting pool" (1977), une vidéo très picturale qui montre un homme sautant dans l'eau d'un bassin. Une métaphore de la naissance. Et une référence directe au vécu de Bill Viola qui a failli se noyer à l'âge de six ans.

"Quand j'étais enfant, j'ai vécu une merveilleuse expérience. J'étais avec mon oncle et mon cousin sur un lac. J'ai sauté d'une petite plateforme mais sans retenir mon souffle et j'ai coulé à pic. J'ai vu des poissons, des plantes qui ondulaient, une lumière bleue partout. C'était le paradis. Je me suis assis et j'ai attendu la suite. Mon oncle m'a arraché à l'eau mais au début, je me suis débattu", raconte-t-il d'une voix douce et posée à quelques journalistes. "La peur n'est venue qu'après coup".

"Plusieurs de mes œuvres découlent de cette expérience", souligne l'artiste, adepte du zen. "Sans elle, je serais peut-être en train de travailler dans un bureau aujourd'hui", ajoute Viola.

- "Sculpter le temps" -

Né à New York en 1951, Viola étudie la peinture et la musique électronique à l'université de Syracuse (Etat de New York). Il lit les mystiques et se passionne très vite pour l'art vidéo naissant. "C'est la vidéo qui m'a choisi. Je n'ai pas eu le choix", assure l'artiste au crâne un peu dégarni, qui porte un collier de barbe et de fines lunettes.

Installé à Long Beach en Californie, Viola cherche à "sculpter le temps" avec la vidéo, notamment en utilisant le ralenti. Il évite au maximum de recourir aux effets spéciaux.

L’œuvre "The Veiling" (1995) suggère un rêve flottant, avec ses neuf grands voiles sur lesquelles sont projetées les images d'un homme et d'une femme.

Les cauchemars sont là aussi. S'inspirant de Goya, Bill Viola fait parler l'inconscient avec "The sleep of reason" (1988), une installation audio-vidéo avec un petit écran montrant une femme assoupie. De façon irrégulière des images fugitives (incendies, poissons, chouette) balaient la totalité de la pièce.

Pour "The quintet of the astonished" (2000), c'est à Jérôme Bosch que l'artiste se réfère. Cinq personnes se laissent envahir progressivement par une vague d'émotions puis tout retombe. "L'œuvre allait être décrochée des cimaises du MET lorsque est survenu le 11 septembre 2001. Le directeur du musée a trouvé que l'œuvre traduisait l'émotion après ces attentats. Il a prolongé de six mois l'exposition. Les gens priaient et pleuraient devant l'œuvre. C'est à cela que servent les artistes, à vous donner des émotions", souligne Viola.

Spectaculaire, l'installation "Going forth by day" (2002) s'inspire du Livre des morts de l'Egypte ancienne et des fresques de Giotto à Assise, en cinq vidéos. Sur l'une d'elles, un déluge s'abat sur l'intérieur d'une maison, rejetant les corps à l'extérieur.

Grinçante, l'œuvre "Men searching for immortality/Woman searching for eternity" (2013) présente un vieil homme et une vieille femme tout nus qui s'inspectent sous toutes les coutures pour vérifier qu'ils ne sont pas malades, avant de s'effacer peu à peu, sur une pierre de granit, un brin tombale.

Source : AFP

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?