Le vote contre l'oubli d'un village indien du Brésil

  • Réserve indigène guarani à Bracui, au Brésil, à 150 km au sud de Rio de Janeiro, le 25 octobre 2014
    Réserve indigène guarani à Bracui, au Brésil, à 150 km au sud de Rio de Janeiro, le 25 octobre 2014 AFP - Christophe Simon
  • Réserve indigène guarani à Bracui, au Brésil, à 150 km au sud de Rio de Janeiro, le 25 octobre 2014
    Réserve indigène guarani à Bracui, au Brésil, à 150 km au sud de Rio de Janeiro, le 25 octobre 2014 AFP - Christophe Guarani
  • Réserve indigène guarani à Bracui, au Brésil, à 150 km au sud de Rio de Janeiro, le 25 octobre 2014
    Réserve indigène guarani à Bracui, au Brésil, à 150 km au sud de Rio de Janeiro, le 25 octobre 2014 AFP - Christophe Simon
  • Une indienne guarani dans une réserve à Bracui, au Brésil, à 150 km au sud de Rio de Janeiro, le 25 octobre 2014
    Une indienne guarani dans une réserve à Bracui, au Brésil, à 150 km au sud de Rio de Janeiro, le 25 octobre 2014 AFP - Christophe Simon
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Centre Presse Aveyron

"Qui parle des indiens au Brésil, de leur souffrances et nécessités? Personne, se lamente le chef indien Guarani Joao Vera Mirim, 102 ans, en ce dimanche d'élection présidentielle.

Au crépuscule de sa vie, le "cacique" a voté, sans illusions, en faveur de la présidente Dilma Rousseff, dans une petite école d'Angra dos Reis, ville côtière de l'Etat de Rio (sud-est) proche de son village.

"Pratiquement aucun candidat ne pense au indigènes, aux souffrances que nous endurons", déplore le vieil homme en saluant la foule avec son sourire contagieux.

Pantalon, chemise à rayures: Joao s'est endimanché pour aller accomplir son devoir électoral. Depuis la fin de la dictature militaire en 1985, il n'a raté aucune élection. Et il en est fier.

"Nous avons besoin de santé, de santé et encore de santé", poursuit le vieil homme. Dans le passé j'ai soutenu (l'ex-président de gauche) Lula, puis Dilma. J'attends toujours leur réponse".

Son neveu, Domingo Tanedy, 63 ans, devenu le chef du village, se sent également abandonné par les politiciens de Brasilia et projette de briguer un poste d'élu local aux prochaines élections de 2018.

"Les présidents promettent beaucoup et ne font rien pour nous. Nous vivons de la vente de notre artisanat. Mais c'est dur car notre terre n'est pas fertile. Nous devons aller au marché pour acheter notre nourriture", explique-t-il.

- Maisons au toit de paille -

Quelque 896.000 indiens divisés en 305 ethnies vivent aujourd'hui au Brésil, noyés et ignorés au milieu d'une population de 202 millions d'habitants majoritairement urbaine.

Dans le village des Guaranis d'Angra, 87 familles vivent dans des maisons aux toits de paille: 435 personnes en tout dont 182 électeurs. Beaucoup ne parlent pas portugais.

Leur hameau paisible est niché au milieu de la luxuriante forêt tropicale, à l'écart des luxueux lotissements balnéaires sécurisés d'Angra et de ses favelas populaires.

Il y a 24 ans, Veram Mirim a obtenu des autorités ce que de nombreuses communautés indiennes du Brésil réclament encore en vain: la démarcation des terres ancestrales de sa tribu.

Le puissant lobby des propriétaires terriens, toujours en quête de nouvelles aires de cultures et d'élevage, s'y oppose avec succès au parlement de Brasilia.

Plusieurs ethnies indiennes ont accusé l'actuel gouvernement de Dilma Rousseff de paralyser le processus de démarcation de leurs terres. Elles ont parfois fait des descentes remarquées à Brasilia, pour protester avec arcs et sarbacanes.

En quatre ans, l'actuel gouvernement a reconnu onze territoires indigènes totalisant deux millions d'hectares. Lors des huit années précédentes, le mentor de Mme Rousseff, l'ex-président Luis Inacio Lula da Silva avait reconnu 84 territoires indiens étendus sur 18 millions d'hectares. Sous la présidence du social-démocrate Fernando Henrique Cardoso (1995-2002), les indiens avaient obtenu gain de cause sur 141 territoires totalisant 41 millions d'hectares, selon des données du quotidien Folha de Sao Paulo.

Élections ou pas, la vie suit son cours au village guarani d'Angra, entre passé millénaire et internet.

Au bord du terrain de foot en terre battue, les adolescents assis en petits groupes, écoutent de la musique ou tapotent sur leurs téléphones mobiles. Les joueurs de foot célèbrent leur buts, à l'unisson de la grande passion nationale. Les enfants courent partout pieds nus.

A l'intérieur d'une cahute à quelques pas du village, des jeunes tapent frénétiquement sur les boutons d'une vieille console de jeux. D'autres préfèrent se connecter à internet sur l'ordinateur ou leur téléphone cellulaire. Une génération XXe siècle parlant guarani.

Anderson Silveira vient de finir son enseignement secondaire à l'âge de 23 ans. Il annonce qu'il votera pour l'opposant Aecio Neves, du Parti social-démocrate brésilien (PSDB), de centre-droit: "En vérité je ne sais pas trop pourquoi. Je pense juste que c'est l'heure du changement".

La plupart préfèrent garder leur vote secret et se soucient peu d'idéologie. Peu importe le vainqueur, du moment qu'il s'occupe un peu des Guaranis.

Source : AFP

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