Forsane Alizza en procès: risque terroriste ou agitation islamiste?

  • Le chef du groupe Forsane Alizza, Mohamed Achamlane (gauche, en noir) parle à des journalistes le 21 novembre 2011 à Nantes
    Le chef du groupe Forsane Alizza, Mohamed Achamlane (gauche, en noir) parle à des journalistes le 21 novembre 2011 à Nantes AFP/Archives - Frank Perry
  • Le GIPN arrête Mohamed Achamlane à Bouguenais le 30 mars 2012
    Le GIPN arrête Mohamed Achamlane à Bouguenais le 30 mars 2012 AFP/Archives - Jean-Sebastien Evrard
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Centre Presse Aveyron

Lutte "anti-islamophobie" et rigorisme religieux, ou risque réel d'attaques islamistes? Le procès du groupe Forsane Alizza, "les cavaliers de la Fierté", s'ouvre lundi à Paris.

Ils seront 15 à comparaître jusqu'au 23 juin pour participation à un groupe formé en vue de la préparation d'actes terroristes. Au centre du dossier, Mohamed Achamlane, 37 ans, "émir" du groupe.

Barbe fournie, visage rond, invariablement en turban et djellaba, cet habitant de la banlieue de Nantes a fondé le site du même nom, officiellement pour lutter contre l'islamophobie. Mais la virulence de certains propos le conduira lui-même devant le tribunal en 2011 pour provocation à la discrimination raciale ou religieuse.

Le groupe organise aussi des manifestations, notamment contre la loi interdisant le voile intégral. Et en janvier 2012, Forsane Alizza est dissous par le ministère de l'Intérieur, qui l'accuse de prôner la lutte armée.

Suite à cette décision, un texte est publié sur le site exigeant notamment que "les troupes françaises quittent tous les territoires à majorité musulmane sans condition ni délai" ou le "retrait des lois abjectes contre le voile et le niqab". "Si d'aventure nos exigences ne sont pas prises en compte alors nous considérerons que le gouvernement est entré en guerre contre les musulmans".

Début mars, une instruction est ouverte. Depuis la dissolution, les membres du groupe évitent le téléphone, mais sont pistés sur internet, où Achamlane s'intéresse au réglage de lunettes de fusil ou aux gilets pare-balles. Et dans un "chat" privé il lance: "par Allah tout puissant on va lui mettre des cicatrices à la France".

Plusieurs membres du groupe achètent une moto, louent une maison près de Lyon où se rend Achamlane. Pour les enquêteurs, il s'agit "d'éléments laissant craindre que le groupe ne possède des armes et ne passe à l'action violente". Le 28 mars, 17 personnes sont interpellées à travers la France.

- "The terrorist's handbook" -

En pleine campagne présidentielle et quelques semaines après les tueries de Mohamed Merah, le coup de filet fait grand bruit. François Bayrou dénonce une "mise en scène", Martine Aubry un "spectacle".

Chez Achamlane seront saisis trois armes de poing et trois fusils d'assaut démilitarisés et ne fonctionnant pas. Chez d'autres, un révolver, un pistolet, une carabine, une réplique de kalachnikov, un fusil de chasse à canon scié...

Des enquêteurs évoquent un projet d'enlèvement d'un magistrat à Lyon, le président sortant Nicolas Sarkozy parle d'"éléments extrêmement sérieux". Mais le procureur de Paris lui-même évoque un projet sans "tentative de commencement d'exécution".

Au terme de leur enquête, les juges s'affichent certains de ne pas viser une simple activité de propagande mais bien "un groupe de membres actifs, un noyau dur autour de Mohamed Achamlane, susceptible de préparer des actes de terrorisme en France".

Sur les ordinateurs de plusieurs on a retrouvé des "consignes de recrutement" de l'émir, disant notamment: "il faut apprendre à tirer (voir club de tir près de chez vous)".

Et dans ceux de Mohamed Achamlane lui-même, des guides de fabrication d'engins explosifs, ou encore "un manuel en anglais sur la fabrication d'une bombe atomique" ainsi que "the terrorist's handbook" (manuel du terroriste).

Mais pour Bérenger Tourné, avocat d'Achamlane, la justice n'a rien de concret contre son client, qui "a fondé Forsane Alizza pour lutter contre l'islamophobie sur le plan médiatique".

"On fait de cette propagande une association de malfaiteurs en considérant que l'islam rigoriste prôné par Forsane Alizza aurait en quelque sorte couvert la préparation d’actes terroristes. Mais dans les faits, rien de tangible n'a été démontré", poursuit-il.

Et de dénoncer un postulat de l'accusation selon laquelle les actions du groupe "ne pouvaient que tendre vers cette finalité" terroriste. "On cherche à sanctionner un groupe d'individus non pas parce qu'il a entrepris la préparation d'une action terroriste, mais seulement parce qu'on a la conviction qu'il pouvait potentiellement le faire, ce qui n’est pas admissible".

Les prévenus risquent jusqu'à 10 ans de prison.

Source : AFP

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