A bord de la maraude à Rodez : «Dans la rue, aucune nuit ne ressemble à une autre»

  • Jusqu’au 31 mars, une quarantaine de bénévoles de la Croix-Rouge assurent des maraudes à Rodez.
    Jusqu’au 31 mars, une quarantaine de bénévoles de la Croix-Rouge assurent des maraudes à Rodez. PH
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Philippe Henry

Social. Depuis le 1er novembre et jusqu’au 31 mars, une quarantaine de bénévoles de la Croix-Rouge assurent des maraudes à Rodez et alentours pour venir en aide à ceux qui vivent dans la rue.

À peine arrivée en centre-ville de Rodez, Anne Gervais reçoit un appel du 115. «Nous sommes là, nous arrivons tout de suite», répond-elle. Il est bientôt 19h30 et la maraude du Samu social assurée par la Croix-Rouge Française débute. Place Foch, la fourgonnette se gare. Les gyrophares brillent dans la nuit. Une seule personne attend les bénévoles de l’association. Elle patiente, statique au milieu de la place, les mains dans les poches. Le froid est mordant ce soir-là. Le thermomètre proche de 0°C.

«Vous prendrez bien un café ? lance Anne. «Avec plaisir», répond timidement Louis* âgé d’une quarantaine d’années, «très propre sur lui», comme le fait remarquer Michel, un bénévole de la Croix-Rouge. La conversation s’engage. D’abord sur des sujets anodins, puis Anne glisse : «Vous avez besoin d’aide?» «Pas besoin, je vais me débrouiller tout seul», répond Michel qui repartira dix minutes plus tard avec quelques denrées, une baguette de pain frais et du café.

«Beaucoup viennent juste nous voir pour un bout de conversation»

«Nous devons répondre aux besoins vitaux des personnes exclues, précise Anne, qui se charge également de distribuer des kits sanitaires, des couvertures, des chaussettes, des croquettes pour chiens et chats, etc. «Mais nous sommes aussi et surtout là pour discuter, tisser du lien social. Sans jamais trop s’immiscer dans leur vie, certains sont méfiants. Beaucoup d’entre eux viennent juste nous voir pour un bout de conversation, puis repartent.» La fourgonnette de la Croix-Rouge se remet en route quelques dizaines de minutes après. Prochain arrêt : la gare. Les trois bénévoles partent à la recherche d’un habitué. Victor* n’a plus été aperçu par les bénévoles depuis plusieurs jours.

«La rue détruit un homme en quelques mois»

«Nous travaillons avec un réseau d’associations, on discute, on s’informe sur la situation des personnes que nous pouvons trouver dans la rue, explique Anne. Nous voulons leur venir en aide rapidement. La vie dans la rue détruit un homme en quelques mois.» Mais ce soir-là, Victor est introuvable. Les maraudeurs vont faire, en vain, le tour de plusieurs parkings de Rodez où les sans domicile fixe s’arrêtent de temps en temps. «Récemment, plusieurs garages et squats ont été condamnés, explique Michel. Cela ne fait que repousser le problème. Les gens partent ailleurs et, du coup, les liens que nous avons pu nouer avec eux se rompent.» 

Hébergement : le manque de places est criant 

La maraude de la Croix-Rouge se poursuivra jusqu’en milieu de soirée. «Ce soir-là, c’était plutôt calme, sourit Anne Gervais. Alors que parfois, nous pouvons rencontrer une quinzaine de personnes. Quand il fait très froid, nous sommes davantage sollicités.» Ce qui peut vite s’avérer difficile à gérer car «le manque de places d’hébergement est criant. Surtout, nous avons besoin de lieux adaptés aux familles, et si besoin des chenils pour leur chien». La maraude de la Croix-Rouge se poursuivra jusqu’au 31 mars. Et, à n’en pas douter, «nous allons connaître des soirs plus agités, assure Geneviève, 62 ans, bénévole de la première heure. Dans la rue, aucune nuit ne ressemble à une autre.»

* Les prénoms ont été modifiés

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