Un proche de Dassault condamné à 15 ans de réclusion pour une tentative d'assassinat

  • Un proche de Serge Dassault condamné à 15 ans de réclusion pour tentative d'assassinat commise sur fond de soupçons d'achat de votes
    Un proche de Serge Dassault condamné à 15 ans de réclusion pour tentative d'assassinat commise sur fond de soupçons d'achat de votes AFP/Archives - MEHDI FEDOUACH
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Centre Presse Aveyron

Ses rivaux l'accusent de ne pas avoir partagé l'argent de Serge Dassault. Lui soutient s'être défendu contre des maîtres-chanteurs. Younès Bounouara, proche de l'avionneur, a été condamné mercredi à 15 ans de réclusion pour tentative d'assassinat commise sur fond de soupçons d'achat de votes.

Le verdict de la cour d'assises de l'Essonne, supérieur aux douze ans requis par l'avocat général, a été accueilli par les pleurs et la colère de la famille. "Ça suffit, c'est fini", leur a répondu l'accusé. "Nous allons envisager" l'appel, s'est bornée à commenter son avocate Karine Bouden.

Bounouara, 43 ans, a tiré le 19 février 2013 depuis la terrasse d'un café sur Fatah Hou, qui circulait en voiture dans le centre de Corbeil-Essonnes, en région parisienne. Grièvement blessé, ce boxeur professionnel conserve encore de lourdes séquelles.

A l'audience, il a expliqué son coup de sang par les menaces et harcèlements dont il était victime depuis plusieurs années. A la tête de cette "équipe", surnommée "Les Italiens": Fatah Hou.

"On a essayé de faire croire qu'il y avait d'un côté les ordures qui insultaient, qui menaçaient, et puis de l'autre les pauvres victimes de ces harceleurs, c'est-à-dire quelque part le système Dassault et M. Bounouara, ce n'est absolument pas le cas", a réagi l'avocate de Fatah Hou, Marie Dosé.

"J'espère que le message est passé à l'attention de ceux qui ont fait Corbeil et qui construisent encore sur les ruines de Corbeil et qui bien évidemment n'étaient pas là", a-t-elle ajouté, désignant l'ancien maire Serge Dassault et son successeur Jean-Pierre Bechter, qui n'ont pas honoré leur convocation comme témoins.

Dans son réquisitoire, l'avocat général Jean-Michel Bourlès a estimé que "Younès Bounouara avait tiré volontairement pour donner la mort".

Une préméditation et une intention contestées par la défense, malgré des écoutes judiciaires accablantes, dans lesquelles Bounouara prévient ses proches qu'il a son "pétard" et va "canarder" Hou.

- "La chance et le sort de sa vie" -

C'était "un appel au secours", a soutenu son autre avocat David-Olivier Kaminski. Il a demandé, en vain, à la cour d'acquitter son client du "crime" de tentative d'assassinat.

En toile de fond, les soupçons d'achat de votes aux élections municipales de Corbeil-Essonnes, qui valent à Serge Dassault, maire de 1995 à 2009, une mise en examen dans un dossier distinct.

En novembre 2012, trois mois avant les tirs, Hou coréalise une vidéo pirate dans le bureau de Serge Dassault. Le sénateur Les Républicains y reconnaît "avoir tout donné à Younès", après l'élection en 2010 de Jean-Pierre Bechter, l'un de ses fidèles.

Un mois plus tard, Le Canard enchaîné s'appuie sur cet enregistrement et révèle que Bounouara, relais de Serge Dassault aux Tarterêts, une cité sensible de Corbeil, a touché 1,7 million d'euros de l'avionneur et n'aurait pas redistribué l'argent "comme il devait le faire", selon Hou.

Le milliardaire a confirmé un don de deux millions destiné, selon lui, à "financer un projet industriel en Algérie", récusant tout lien avec le scrutin.

"Ce système a généré de grosses difficultés à Corbeil", a posé l'avocat général. "Younès Bounouara en a tiré profit. Il a aidé sa famille, ses amis, ses copains d'enfance (...) à récupérer une part du gâteau."

L'accusation a cependant souligné le parcours personnel difficile de l'accusé, "parti avec plein de handicaps dans la vie", dont la perte du père dès l'âge de cinq ans. Puis, à l'adolescence, la rencontre avec Serge Dassault, qui vient de remporter la mairie.

L'industriel l'utilise comme relais aux Tarterêts pour désamorcer les émeutes, très violentes à l'époque. En échange, Bounouara crée plusieurs sociétés, dans le nettoyage et le bâtiment, qui raflent les marchés publics de la ville.

"Ça a été à la fois la chance et le sort de sa vie", a résumé Me Kaminski. "Cet argent c'est une plaie. Sans cet argent, on le laisse tranquille."

Source : AFP

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