[LONG FORMAT] Quand l’Aveyron servait de base arrière à l’ETA et ses militants

  • En 2007, les policiers français frappent un grand coup de filet en plein cœur de Rodez : trois ettaras, dont un membre influent de l’organisation, sont arrêtés.
    En 2007, les policiers français frappent un grand coup de filet en plein cœur de Rodez : trois ettaras, dont un membre influent de l’organisation, sont arrêtés.
Publié le , mis à jour

En est-il fini de L’ETA, l’organisation séparatiste basque ? Nombreux le pensent après qu’elle ait, elle-même, annoncé son « désarmement total » samedi tout en livrant aux autorités françaises une liste de caches d’armes. Ce geste a d’emblée été salué par Paris. En Aveyron, il a fait ressurgir plusieurs souvenirs. Car le département a souvent été une base arrière pour l’ETA. Depuis 2000, plusieurs arrestations de militants ont eu lieu dans nos contrées. Retour sur ces nombreux faits divers.

 

Depuis plusieurs mois, les gendarmes du département ne cessent de se poser une question : « L’Aveyron sert-elle de base arrière à des militants de l’ETA ? » Leurs soupçons vont rapidement être confirmés. Car après la découverte d’une dizaine de véhicules volés dans des zones proches du Pays basque, les gendarmes aveyronnais mettent la main sur un certain Xangarin Recondo Serrano. Blessé par balle à une cuisse, ce dernier s’était présenté en pleine après-midi, dans une pharmacie de Mur-de-Barrez. Interloqué, le pharmacien du village prévient d’emblée la gendarmerie du coin, comme la loi lui oblige lorsqu’un blessé par balle se présente. Quelques minutes plus tard, l’homme est interpellé dans l’officine. Il avoue rapidement son identité, Xangarin Recondo Serran, et dit vivre dans la clandestinité depuis plusieurs mois.

Effectivement, l’etarra présumé est soupçonné de faire parti du commando Donasti et d’avoir participé à plusieurs assassinats de l’autre côté des Pyrénées. Celui entre autres d’un conseiller municipal socialiste d’Orio, près de San Sebastian. Âgé de 23 ans lors des faits, l’homme a été conduit à l’hôpital d’Aurillac pour soigner sa blessure par balle. Une blessure qu’il s’est infligée lui-même en manipulant un pistolet de gros calibre, retrouvé en sa possession lors de son arrestation. Le militant basque a ensuite été transféré vers Paris où il a été incarcéré jusqu’en 2006, date de son extradiction vers l’Espagne.

(Xangarin Recondo Serrano, à droite sur la photo, lors de son extradiction vers l’Espagne en 2006).

Plusieurs planques sont tour à tour découvertes rue Sarrus à Rodez, à Réquista et, enfin, à Montjaux dans le sud du département. A Rodez, c’est un habitant de la rue Sarrus qui a alerté la police après le départ brutal de son locataire. Les policiers, qui ont découvert dans l’appartement une arme de gros calibre, des sacs de nitrate d’ammonium et des cartes d’identité vierges. Il s’agissait d’un gros bonnet, Ramon Gastelmundi.

 

Un Citroën « Berlingo » est volé, moteur tournant, devant le magasin d’un boulanger de Nant. Un véhicule utilisé, douze jours plus tard, pour commettre un attentat à la voiture piégé devant une discothèque d’Urdax (Navarre).

 

Le 19 février, une « Clio » est retrouvée, elle aussi incendiée près de Lugan (Ouest-Aveyron). Le 24 février, un monospace Opel « Zafira », volé dans le Saint-Affricain, est retrouvé calciné le 7 mars près de Salles-Curan. Le 27 juin 2007, un autre « Berlingo » est volé à Montjaux. Un véhicule retrouvé près d’Angoulême le 11 juillet suivant lors de l’interpellation de deux etarras. Il y a eu, enfin, le braquage de la société Fasver, près de Rivière- sur-Tarn en octobre 2005. Là, un commando cagoulé et armé avait dérobé des matériaux permettant la confection de faux papiers (cartes d’identité, passeports français et étrangers...).

A l’époque, c’était un petit coup de tonnerre. Ce 27 juillet, il est 10 h 15 lorsque, sous le regard éberlué d’habitants de l’avenue de Bordeaux, des hommes cagoulés et lourdement armés interpellent, en douceur, un couple - Iker Iparraguire Galarraga et Galder Bihotz Cornao Arnaez - en train de charger le coffre d’une Peugeot 307 dans le parking de la résidence Le Campus. Deuxième coup de théâtre : quelques heures plus tard, vers 13 h 20, un scénario quasi identique se répète. Mais cette fois, c’est un homme qui se trouvait dans un appartement du premier étage qui est arrêté, là encore sans résistance. Il s’agit de Juan Cruz Maiza Artola, un « gros poisson » de l’ETA. L’arrestation de cet homme âgé de 57 ans, chef de l’appareil logistique de l’organisation, accusé, selon l’agence espagnole Vasco Press, d’avoir fait partie du « commando Vizcaya » dans les années 80, responsable d’au moins six assassinats et responsable présumé des caches d’armes et d’explosifs de l’organisation, est jugée « très importante » en Espagne, où le ministre de l’Intérieur s’est publiquement félicité du coup de filet ruthénois.

On a appris ensuite que l’appartement était surveillé depuis plus d’un mois par les enquêteurs. Car les trois etarras avait loué cet appartement, avenue de Bordeaux, à l’épouse d’un policier ruthénois. Alerté par les noms à consonnance basque des locataires, le policier aurait alors discrètement averti sa hiérarchie. Les trois intéressés ont ensuite été placés en garde à vue à Rodez avant d’être transférés à Paris dans les 48 heures.

Depuis ? Juan Cruz Maiza Artola, considéré comme l’ancien responsable des caches d’armes de l’organisation clandestine, a été condamné en 2010 à 17 ans de réclusion criminelle, dont les deux tiers de sûreté, avec une interdiction définitive du territoire français. Le couple a, lui, été condamné à des peines inférieures à 10 ans. Ils ont tous été extradés vers l’Espagne.

 

(Juan Cruz Maiza Artola, Galder Bihotz Cornago Arnaez et Iker Iparraguirre Galarraga)

[LONG FORMAT] Quand l’Aveyron servait de base arrière à l’ETA et ses militants
[LONG FORMAT] Quand l’Aveyron servait de base arrière à l’ETA et ses militants
[LONG FORMAT] Quand l’Aveyron servait de base arrière à l’ETA et ses militants
[LONG FORMAT] Quand l’Aveyron servait de base arrière à l’ETA et ses militants
[LONG FORMAT] Quand l’Aveyron servait de base arrière à l’ETA et ses militants
[LONG FORMAT] Quand l’Aveyron servait de base arrière à l’ETA et ses militants

« À l’agonie »

Pour ETA, historiquement, la France et plus particulièrement le Sud-Ouest ont été une véritable « base arrière ». D’après des experts de la lutte antiterroriste, l’organisation est « à l’agonie et le mouvement clandestin compterait tout au plus encore une trentaine de membres ». Un point de vue partagé par Jean Chalvidant, un expert du conflit basque interrogé par l’AFP. Selon lui, ETA a mis en scène un « show » pour redorer une « image désastreuse » alors qu’elle se sait « vaincue ». ETA, née en 1959 dans la lutte contre le franquisme, a renoncé en octobre 2011 à la lutte armée, après 43 ans de violences au nom de l’indépendance du Pays basque et de la Navarre. 829 morts sont attribués à son mouvement clandestin, tandis qu’au moins 62 de ses militants étaient tués par des groupes para-policiers. Mais elle refusait son désarmement et sa dissolution exigés par Madrid et Paris, réclamant une négociation sur ses membres détenus (337, dont 75 en France et une centaine purgeant des peines de plus de dix ans de prison).

Voir les commentaires
L'immobilier à Rodez

450000 €

En exclusivité chez IMMO DE FRANCE, venez vite découvrir cet opportunité d'[...]

Toutes les annonces immobilières de Rodez
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?