Aveyron : Les magasins de musique font de la résistance sonore

  • Eric Vabre jouant un fa dièse...
    Eric Vabre jouant un fa dièse...
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Centre Presse

À peine entré dans le Joyeux Fa Dièse s’élèvent des notes d’accordéon : c’est Eric Vabre, le gérant, qui essaie un accordéon. Comme quoi, qui plus est dans un magasin de musique, se vérifie ce vieil adage qui veut que la musique adoucisse les mœurs. Voire même la brigade de mœurs, si l’on s’en réfère au commissariat situé juste en face...

Le Joyeux Fa Dièse est le seul magasin d’instruments de musique « physique » de Rodez, et l’un des deux seuls de l’Aveyron, l’autre étant Music-Son, à Millau. L’enseigne ruthénoise a sa maison mère à Figeac, créée en 1978, et elle fut un temps présente à Decazeville, jusqu’en 1996, et à Villefranche, jusque vers 2014.

À Rodez, une autre enseigne, Music d’Oc, a elle aussi fermé boutique, tout comme la Colonne à air, spécialisée dans les instruments à vent, qui était au fond de la rue de l’Embergue.

Si peu de magasins de flonflons dans le département ? La cause est toute simple : Internet. Internet et le site roi de vente par correspondance dans le domaine, l’Allemand Thomann, « plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires », commente Pascal Carrière, qui a repris Music-Son à Millau il y a tout juste un an, à la suite du fondateur Jean-Pierre Pascal, qui a tenu les baguettes durant 30 ans.

« Internet a tendance à décimer pas mal de magasins, abonde Eric Vabre, et pas que dans la musique. Mais moi, je suis content de bosser à l’ancienne, de ne pas être un vendeur de cartons, de donner des conseils et pouvoir parler musique. Ça recrée plus un lien social que les soi-disant réseaux sociaux. Depuis qu’on est connectés, on n’a jamais été aussi seuls. »

Et si Internet fait du tort au commerce en général, la musique assistée par ordinateur, qui produit notes et mélodies sans le moindre instrument « historique », sans le bois des guitares, le cuivre des trompettes ou l’ivoire des pianos, peut aussi causer des dommages aux magasins de « jouer » pour les grands, comme dit Eric. Quoique pour lui, en ce cas, Euterpe, la muse de la Musique, finit toujours par devenir charnelle. « On peut créer de la musique sur ordi, mais après, ça n’empêche pas de la partager avec de vrais musiciens. La musique, il faut de toute manière la partager avec quelqu’un que tu peux « toucher », dans tous les sens du terme, boire un coup avec lui, manger un bout, improviser...»

Il se régale donc de voir venir à lui une clientèle qui vient voir de visu de vrais instruments. « Rodez n’est quand même qu’un grand village, mais je suis étonné de voir toujours des nouvelles têtes. La plupart sont des amateurs, mais pas au sens péjoratif du terme, non, plutôt comme des amateurs de bon vin. La musique doit être vue comme une belle expérience, c’est quand même un « loisir », mais c’est quelque chose qui tient au corps. »

Charnelle Euterpe, instruments physiques aux matériaux divers, cette « réalité musicale » est aussi vue telle chez Pascal Carrière à Millau. « Ce qu’il y a de plus, c’est le contact, avec l’instrument, le vendeur, les conseils, et puis une sécurité avec le SAV. Si demain les gens ne voient plus le produit, ne l’ont pas dans les mains, ça n’ira plus. Mais ici, on est à la campagne, les gens ont plus le réflexe boutique. »

Face à Internet, Pascal est maintenant optimiste : « L’hémorragie est stoppée. On est en train de mettre en place des choses avec les fournisseurs, pour que la rapidité de livraison et les prix en magasin soient concurrentiels à Internet. Et puis Internet a aussi besoin des magasins, nous on fait voir, on fait toucher, essayer... Il nous faut réinventer tout ça, un magasin de musique, c’est une boutique passion, on peut venir de loin pour le visiter. Il faut se donner la peine de faire la différence. »

Ce n’est pas Elise, la quarantaine, qui dira le contraire : elle est entrée au Joyeux Fa Dièse pour faire l’achat d’un piano (un « challenge » pour elle) et d’une flûte pour sa fille. Et résume en un mot la philosophie de ces magasins de « jouer » qui pourrait être, au final, celle de la musique même : « Du concret ».

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