Brigitte Barre tient bon le gouvernail de sa vigne à Saint-Cyprien-sur-Dourdou

  • Brigitte Barre a réussi à se faire une place dans un monde viticole très masculin.
    Brigitte Barre a réussi à se faire une place dans un monde viticole très masculin. José A.Torres
Publié le , mis à jour
François Cayla

Elle est l’une des très rares viticultrices à exercer le métier en Aveyron.  

La vigne, c’est sa vie. C’est son métier. Et sa vie, son métier, elle les aime. À bientôt 53 ans, Brigitte Barre est l’une des très rares femmes viticultrices dans le vallon de Marcillac. Si ce n’est la seule. Ses terres, à Saint-Cyprien, s’étendent sur un peu plus de 15 hectares, autour de la maison familiale, perchée sur les hauteurs du lieu-dit Verdus.

Les vignes dans lesquelles elle travaille au quotidien, Brigitte Barre en a hérité en 1991. Le domaine appartenait jusqu’alors au père de son mari, Florent. C’est son mari, justement, qui lui a enseigné les bases d’un métier pour lequel elle s’est très vite prise de passion, se montrant toujours très attentive à ce qu’ont pu lui dire et lui conseiller les gens du métier au fil des années.

Et c’est elle qui, depuis 1996, tient les rênes du domaine : plus de 9 hectares de cépages, rouges en grande majorité, avec une petite touche de blanc sur un hectare environ. Son mari a conservé de son côté son emploi de plombier. Mais il n’a pas pour autant abandonné son épouse. Avec un statut de "conjoint collaborateur", il donne tous les week-ends un coup de main à la vigne. Chez les Barre, on bosse ainsi sept jours sur sept, ou presque.

Travail de couple

Dans le couple, Florent prend en charge les aspects mécaniques des travaux à réaliser sur l’exploitation. Brigitte, elle, s’occupe de tout ce qui touche aux interventions manuelles. Et quand on jette un œil sur ses vignes, sur des talus particulièrement abrupts, on se dit qu’il faut effectivement beaucoup aimer ce métier pour l’exercer dans des conditions plutôt périlleuses.

"Je suis bien dans ce que je fais, confie Brigitte sans l’ombre d’une hésitation, le regard vif et le sourire chaleureux. Oui, c’est dur. Mais c’est un choix et, encore une fois je le répète, j’aime vraiment ce que je fais. De toute façon, je ne me voyais pas passer ma vie dans un bureau…"

Sa vie, elle la passe donc à arpenter, à soigner, à traiter sa vigne, pour fournir un raisin qui la nourrit, elle et sa famille, sans grande difficulté. "On ne s’en sort pas trop mal, glisse Brigitte. On ne roule pas sur l’or, mais ça va. Entre le métier de mon mari et la vigne, ça va. Même si je ne fais pas le raisin pour l’argent, j’arrive à me faire un petit capital pour mes vieux jours."

Son nom sur une étiquette

Et si "ça va", c’est aussi grâce à la cave coopérative des Vignerons du Vallon, à Valady. À leurs débuts dans la viticulture, Brigitte et Florent Barre transformaient eux-mêmes leur raisin en vin. Mais en 1996, pour gagner en qualité et pour s’épargner un surplus de travail difficile à gérer, le couple a choisi d’adhérer à la cave de Valady. Une cave coopérative qui achète la récolte de ses adhérents contre le versement d’un salaire mensuel fixe. Elle se charge aussi de la vinification et de la commercialisation des vins, qu’ils soient rouges, blancs ou rosés. Ainsi, Brigitte Barre bénéficie des compétences en œnologie des techniciens de la cave et son raisin est au final mis en valeur dans une production classée en appellation d’origine contrôlée (AOC).

Mais son nom ne s’affiche encore sur aucune étiquette. "Mon but, mon rêve je dirais presque, ce serait justement d’avoir un jour mon nom de domaine sur une étiquette. On n’y est pas, loin de là. Mais sait-on jamais."

Si elle y parvient, "sait-on jamais", Brigitte Barre ne le devra qu’à elle-même. Et à son mari, évidemment. Car, comme elle le révèle, le milieu viticole est plutôt macho. "Quand j’ai commencé, quand les vignes ont été mises à mon nom, ça a été difficile. Certains se sont attachés à retarder mon installation, en compliquant par exemple les démarches administratives. Il a fallu que je m’accroche."

Et la suite ?

S’imaginant encore dans ses vignes pendant une petite dizaine d’années, Brigitte dit déjà penser à la suite. Ses enfants lui ont déjà fait savoir qu’ils ne seraient pas candidats à la succession. Des jeunes ? Elle n’y croit pas trop : "Je l’ai déjà dit, mais le travail est dur. Je ne suis pas sûre que beaucoup soient prêts à faire ce que je fais."

Pour la reprise de ces terres riches mais exigeantes, les premières démarches de prospection n’ont rien donné. Brigitte Barre espère tout de même finir par trouver l’oiseau rare, un repreneur unique, capable de tenir le gouvernail de la vigne du Verdus avec la même passion qu’elle.

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