Castelnau-de-Mandailles - Lassouts : le silure, ce géant d’eaux douces

  • Une magnifique de silure albinos, très rare, capturé au barrage de Castelnau – Lassouts – Lous.
    Une magnifique de silure albinos, très rare, capturé au barrage de Castelnau – Lassouts – Lous. Repro CPA
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Centre Presse Aveyron

La présence du silure glane, dans les eaux aveyronnaises, remonterait à la fin des années 90, suite à son introduction sauvage, sur le barrage de Castelnau-Lassouts-Lous. Celui qu’on a qualifié de "monstrueux carnassier venu de l’Est", fréquente actuellement les rivières Lot et Aveyron, ou encore les barrages de Pont-de-Salars, Pareloup et Pinet. Des études récentes relativisent son impact sur les autres espèces piscicoles.

En 2012, la vidéo tournée à Albi fait sensation. En plein centre-ville, des silures "échoués" contre la berge, bondissent tout à coup sur la terre ferme, pour y saisir un malheureux pigeon venu s’abreuver ! Des orques au pays de Toulouse – Lautrec, une drôle d’histoire qui remonte à fort longtemps ! D’abord retrouvé dans le bassin du Rhône, sous forme de fossile datant de l’époque tertiaire, notre fameux silure sera introduit en France, dans la région de Versailles (1851), puis en Alsace (1857). Son expansion débutera relativement tard, au cours des années 60.

Un poisson mal aimé

Pouvant atteindre des tailles impressionnantes (2,74 m sur le Tarn proche d’Albi en 2017), ce poisson originaire des grands bassins d’Europe centrale (Danube, Dniepr et Volga) fait souvent peur. Avec une gueule parfois énorme, et son immense corps de têtard visqueux, les légendes vont en effet bon train. Ainsi, lorsqu’en 1977 sont rapportées les premières captures, sur la Seille, affluent de la Saône, le silure glane (du latin glanos qui signifie hyène), devient rapidement "Les dents de la Saône", carnivore glouton sans prédateurs et sans pitié qui engloutit canards, chiens et… enfants ! Des affirmations pour le moins délirantes, qui ont largement contribué à le stigmatiser… Cependant, malgré le fort rejet qu’il suscite encore chez la majorité des pêcheurs, le silure semble aujourd’hui mieux considéré. Grâce notamment au vif Intérêt que lui portent les jeunes pêcheurs, mais aussi suite aux très instructives études menées sur son régime alimentaire (lire ailleurs).

Un poisson d’avenir ?

Il est vrai que le poids et les tailles parfois exceptionnelles du silure ont vite attiré les pêcheurs accros de sensations extrafortes ! Pas étonnant donc que son statut de poisson-trophée sans rival, ait incité l’école de pêche fédérale de l’Aveyron à proposer des sorties silures, qui depuis leur lancement, affichent toujours complet !

Sa croissance spectaculaire, de 2 à 3 kg par an, (à 10 ans, il mesure environ 120cm pour 20 kg), mais aussi sa présence dans tous les bassins fluviaux français, ont évidemment contribué au fort intérêt halieutique que représente actuellement ce poisson. Dans le département de l’Aveyron, il cohabite avec les autres espèces sans

avoir provoqué, à ce jour, aucun déséquilibre naturel. Le nombre important de poissons capturés (brochets, perches et sandres) lors des compétitions organisées à Castelnau-Lassouts-Lous, Pinet, Pareloup et Sarrans, en attestent. De quoi rassurer certains pêcheurs et les gestionnaires de la fédération, qui toutefois restent attentifs à l’évolution de l’espèce.

Une chose est certaine, le silure dispose de nombreux atouts pour être mieux connu et apprécié. Sur le plan biologique, d’abord, sa capacité à évoluer dans des eaux peu oxygénées, le favorise pour faire face aux effets du réchauffement climatique.

Ensuite, sa croissance rapide, pourrait comme en Europe centrale, accélérer sa production en pisciculture (siluriculture) et favoriser sa consommation. En effet, sa chair excellente, fait du silure, un mets de choix dans les pays de l’Est, qu’il soit fumé ou cuit comme une tranche de bœuf à la plancha par exemple… En France dès les années 90, des restaurateurs proposaient, entre autres, du silure sauce homardine, des feuilletés et des beignets au silure, excellents aux dires des convives !

Un impact relativement limité

Souhaitable ou indésirable ? A cette question posée, dés les années 80, dans son livre « Le silure, poisson trophée », Henri Limouzin écrit que le silure, pourtant accusé d’être un glouton insatiable et nuisible, n’a en aucun cas fait disparaître les autres espèces piscicoles. Des propos que confirment plus tard d’importantes études menées entre 1989 et 2010 par le CNRS de Toulouse. Après avoir réalisé près de 11000 pêches électriques sur plus de 500 sites en France, les scientifiques constatent une baisse de la biomasse de l’ensemble des espèces, autres que le silure. Sauf que cette baisse (entre 3 et 6 %) concerne les sites avec silures et… sans silures. Son impact est également mesuré à travers l’analyse de plusieurs milliers de contenus stomacaux, entre 2012 et 2016, sur le bassin de la Dordogne. Là encore, dans plus de 70 % des cas, les estomacs sont vides ! Comme d’autres prédateurs en bout de chaîne alimentaire, le silure passe en effet de longues périodes sans se nourrir. Ce poisson omnivore varie ses menus, pour l’essentiel à base de poissons (environ 30 %) : brème commune, poisson-chat, silure, carpe, gardon, carassin, etc. Il ingère également, dans les villes, des ordures ménagères ou de la nourriture humaine. Apprécie également les écrevisses américaines, les grosses moules d’eau douce (anodontes), ainsi que des rongeurs, petits oiseaux, grenouilles, rats d’eau, ragondins et silures. En effet, dans le rapport « Silure du Rhône 2016 », les scientifiques indiquent qu’un sujet de 1,70m, n’hésite pas à engloutir les propres membres de sa famille, mesurant de 50 cm à 1,10m. Cette tendance au cannibalisme, très développée chez cette espèce, font des gros silures des régulateurs actifs du cheptel.
Source : La pêche et les poissons février 2017.
 

Sources : Biologie des poissons d’eau douce européens – Jacques Bruslé / Jean-Pierre Quignard, Ed. Tec & Amp, Doc.
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