Bangladesh: 22 morts dans des manifestations contre le blasphème

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AFP

Au moins 22 personnes ont été tuées et des centaines blessées à Dacca au cours de violents affrontements depuis dimanche entre les forces de l'ordre et des dizaines de milliers d'islamistes réclamant une nouvelle loi sur le blasphème et la fin de la mixité hommes-femmes.

Les corps de 11 victimes, dont un policier abattu à coups de machette à la tête, ont été transférés au Medical College Hospital de Dacca, a indiqué à l'AFP Mozammel Haq, un policier installé dans cet hôpital.

Des responsables de trois cliniques privées à Dacca ont par ailleurs dit avoir reçu les corps de 11 autres victimes.

Les heurts, parmi les plus violents recensés ces dernières années, ont éclaté dimanche après-midi et se sont poursuivis jusqu'à l'aube lundi.

"Nous avons été contraints d'agir car leur rassemblement s'est poursuivi de manière illégale. Ils nous ont attaqués avec des briques, des bâtons en bambou et des pierres", a-t-il précisé à l'AFP, ajoutant que les manifestants avaient finalement été dispersés tôt lundi matin.

Un porte-parole de la police de Dacca, Masudur Rahman, a indiqué à l'AFP que la police avait fait usage de grenades et gaz lacrymogène, de canons à eau et tiré des balles en caoutchouc pour disperser au moins 70.000 islamistes continuant d'occuper lundi un district commercial important.

Aux cris de "Allah Akbar" (Dieu est grand) et "les athées doivent être pendus", des militants du Hefajat-e-Islam ont défilé dimanche sur au moins six grandes artères de la capitale bangladaise, bloquant la circulation entre Dacca et d'autres villes.

Selon la police, au moins 200.000 personnes ont manifesté dans le centre de Dacca où des heurts violents ont éclaté entre des milliers de protestataires qui lançaient des pierres et les forces de sécurité.

"Au moins 100.000 manifestants" ont bloqué la circulation dans la ville de Tongi qui relie Dacca au nord du pays, selon le chef de la police locale Ismail Hossain.

Les heurts ont éclaté lorsque la police a tenté d'empêcher la progression de manifestants armés de bâtons, en provenance de villages, devant la plus grand mosquée du pays, les violences se propageant ensuite au reste de la capitale.

Des images retransmises à la télévision ont montré des policiers sur des véhicules blindés tirant sur les manifestants qui ont incendié des voitures et des magasins et attaqué un commissariat et des bâtiments officiels.

La police a affirmé avoir eu seulement recours à des balles en caoutchouc au cours des affrontements. Toutefois, selon des témoins et des médias locaux, des centaines de balles réelles ont été tirées pour disperser les islamistes déchaînés qui ont incendié un poste de police, des véhicules et des magasins.

M. Adnan, un urgentiste de l'hôpital Islami Bank a indiqué à l'AFP que près de 300 manifestants étaient soignés dans ses services.

"Nous devons protéger l'Islam"

"Ce gouvernement n'a pas de foi en Allah. C'est un gouvernement athée, nous ne l'autoriserons pas à vivre au Bangladesh. Les musulmans sont des frères, nous devons protéger l'Islam", scandait un manifestant.

Ces violences sont survenues alors que le pays se relève difficilement de sa plus grande tragédie industrielle, qui a fait plus de 600 morts dans l'effondrement d'un immeuble abritant des ateliers de confection.

Les partisans du groupe radical Hefajat-e-Islam, récemment créé, réclament la peine de mort pour tous ceux qui calomnient l'islam. Ils réclament aussi la fin de la mixité entre hommes et femmes notamment dans certains lieux publics.

La Première ministre, Sheikh Hasina, à la tête depuis 2009 d'un gouvernement laïque dans ce pays à majorité musulmane, a rejeté la demande des islamistes, faisant valoir que les lois actuelles permettaient déjà de poursuivre toute personne insultant l'Islam.

Le mois dernier, le Hefajat avait organisé une grève générale et un rassemblement de centaines de milliers de personnes, considéré comme le plus important depuis des décennies, pour protester contre les blogueurs athées qui encourent néanmoins dix ans d'emprisonnement en cas de blasphème.

Les islamistes accusent par ailleurs le gouvernement de vouloir écraser toute contestation en jugeant des personnalités --appartenant majoritairement à l'opposition-- soupçonnées d'avoir commis divers crimes lors de la guerre de 1971, tels des meurtres, viols et conversions forcées d'hindous à l'islam.

Douze personnes ont déjà été inculpées et trois personnes ont été condamnées, dont deux à la peine capitale.

Source : AFP

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