Suppression de départements : le gouvernement change son fusil d'épaule

  • Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault à Vienne le 16 janvier 2014
    Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault à Vienne le 16 janvier 2014 AFP - Dieter Nagl
Publié le
AFP

Pris à la gorge au plan financier, l'exécutif est en train d'opérer à toute vitesse une révision de sa doctrine en matière de décentralisation, préconisant désormais la disparition de certaines collectivités - départements, intercommunalités et régions -, pour simplifier le "millefeuille" territorial.

Quarante-huit heures après le pavé dans la mare lancé par François Hollande lors de sa conférence de presse exhortant les élus à réduire le nombre des régions et à opérer "des regroupements" entre collectivités grâce aux aides qui seront créées dans ce but, Jean-Marc Ayrault a pris tout le monde au dépourvu en se prononçant jeudi pour la "suppression des départements de la première couronne" parisienne, soit les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne.

A droite, le président du Conseil général des Hauts-de-Sein Patrick Devedjian (UMP) a parlé de "totale improvisation", son collègue du Val-de-Marne, Christian Favier dénonçant une déclaration "inacceptable". A la tête de la Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel (PS) a invité à "ne pas brûler les étapes".

Il s'agirait donc de supprimer un échelon, maintenant qu'a été votée définitivement la loi sur les métropoles, créant - le 1er janvier 2016 seulement - le Grand Paris sur une zone grosso modo identique à celle de Paris et des trois départements limitrophes".

Sauf que la loi, qui sera examinée par le Conseil constitutionnel le 24 janvier, n'est même pas encore promulguée et que le gouvernement s'est opposé pendant la discussion parlementaire à la suppression des départements de la petite couronne réclamée par une partie de la droite et soutenue in fine par quelques parlementaires socialistes. Ce serait un tel chambardement que, "en période de crise, c'est un luxe que nous ne pouvons pas nous permettre", déclarait le 10 décembre la ministre de la Décentralisation Marylise Lebranchu.

En déplacement en Autriche, M. Ayrault a justifié cette volte-face par le fait que le "mille-feuille" territorial ne s'avère "pas toujours efficace et, surtout, coûte cher", ce qu'ont aussi pointé la Cour des comptes et la commission européenne, demandeurs d'une telle "réforme structurelle".

François Hollande a confirmé mardi que la dépense publique devait diminuer de "50 milliards d'euros d'ici 2017 et, depuis, le gouvernement est interpellé sur la nature des coupes qui seront pratiquées dans les dépenses publiques. Le chef de l'Etat a identifié les collectivités territoriales comme l'un des gisements d'économies.

"Clarification des compétences"

Lors des états généraux de la démocratie territoriale en octobre 2012, François Hollande avait écarté la suppression des départements. "A part diminuer quelques dizaines d'élus, où est l'économie ? Quant à la simplification espérée, elle aboutirait à l'éloignement le plus souvent de nos concitoyens par rapport aux décisions prises, sans effet sur l'efficacité du service rendu".

Il reste en revanche fidèle sur un point-clé à la ligne de 2012. "Le problème, c'est la répartition des compétences" et "d'identifier clairement la collectivité responsable", disait-il il y a seize mois.

Mais sur ce point, la loi Lebranchu a laissé sur leur faim les présidents de région (tous socialistes sauf un en métropole). Leur chef de file Alain Rousset s'est en revanche "félicité" mardi de la détermination présidentielle à fixer "une clarification stricte des compétences entre collectivités territoriales".

Toute la discussion parlementaire va se trouver bouleversée par l'accélération des annonces de l'exécutif. C'est finalement d'un seul autre projet de loi que celui des métropoles dont débattront les deux chambres, et "vers avril-mai" d'après Mme Lebranchu (au lieu d'avril). Il devait y en avoir deux: l'un sur les départements et régions, l'autre sur les communes et intercommunalités.

Selon Mme Lebranchu, le nouveau projet de loi instaurera "une sorte de bonus-malus" qui fera dépendre le niveau des dotations de l'Etat des initiatives de regroupement et concernera à la fois régions, départements, communes et intercommunalités. Mais il n'est pas question d'y "aller à la hache" a-t-elle dit.

François Hollande a souhaité que les métropoles créées par la loi (13) reprennent sur leur périmètre, comme le Grand Lyon s'apprête à le faire dans le Rhône, les attributions des conseils généraux, là encore pour simplifier.

Mme Lebranchu rappelle que pour prendre "des décisions éclairées", elle s'est "engagée devant l'Assemblée nationale à faire réaliser une étude d'impact des modalités possibles de suppression des départements". Vu la lourdeur de la tâche, sa remise aura lieu cet été.

Elle souligne la complexité du dossier, l'un des questions à traiter étant "la consultation des populations" sur les rapprochements entre collectivités.

Quant aux régions, elles auront des compétences économiques renforcées et "exclusives", selon Mme Lebranchu. Elles ne pourront donc plus tout faire, ce qui satisfait les présidents de région.

Source : AFP

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?