Argentine: la grand-mère de la Place de mai n'a pas retrouvé sa petite fille

  • La femme initialement identifiée comme étant Clara Anahi Teruggi (d), et María (Chicha) Mariani, à Buenos Aires le 24 décembre 2015
    La femme initialement identifiée comme étant Clara Anahi Teruggi (d), et María (Chicha) Mariani, à Buenos Aires le 24 décembre 2015 TELAM/AFP - Carlos Cermele
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Centre Presse Aveyron

L'annonce avait ému le monde entier, mais elle s'est avérée fausse: Maria Mariani, cofondatrice des Grands-Mères de la Place de Mai, n'a pas de lien génétique avec la femme présentée comme sa petite-fille enlevée lors de la dictature il y a 39 ans.

Le porte-parole de la vieille dame, aujourd'hui âgée de 92 ans, a reconnu samedi "une erreur de communication" et assuré que la recherche "de la mémoire, de la vérité et de la justice" se poursuivait.

Jeudi, veille de Noël, la Fondation Anahi, créée en 1989 par Maria Mariani, annonçait que la petite fille de cette dernière, Clara Anahi, avait été retrouvée et s'appuyait alors sur une analyse génétique qui attestait à 99,9% du lien de parenté.

Clara, portée disparue le 24 novembre 1976, était alors présentée comme le 120e enfant retrouvé après avoir été "volé" par la junte pendant la dictature argentine (1976-1983).

Elle a été enlevée à l'âge de trois mois par des agents du régime qui venaient de tuer sa mère, une opposante, mariée au fils de Maria Mariani.

Cette femme, l'une des militantes des droits de l'homme les plus réputées d'Argentine, n'est autre que l'ancienne présidente du mouvement des Grands-Mères de la Place de Mai, une organisation fondée en 1977 pour retrouver les enfants d'opposants politiques soustraits par la dictature à la faveur de la répression. Leur nombre est estimé à 500.

A l'annonce des retrouvailles, les messages de joie ont afflué, jusqu'au président Mauricio Macri qui l'a félicitée sur twitter

Mais, vendredi, les autorités argentines ont annoncé que deux autres analyses génétiques, officielles, concluaient à l'absence de lien de parenté entre Maria Mariani et la femme de 39 ans, dont l'identité n'a pas été communiquée.

Selon Pablo Parenti, le responsable de l'agence gouvernementale chargée de rechercher les enfants disparus durant la dictature, une première analyse ADN a été réalisée au début de l'année.

Les résultats de la seconde, menée par la Banque nationale de génétique (BNDG), l'institution qui fournit les analyses officielles dans de tels cas, ont été connus vendredi.

"Les deux résultats concluent à l'absence de parenté entre le profil génétique de la jeune femme et celui de la famille Chicha Mariani, ainsi qu'avec celui des autres familles qui sont toujours à la recherche d'enfants enlevés", a-t-il assuré dans un communiqué.

Mme Mariani avait d'abord accueilli cette nouvelle avec "réserve", estimant que le résultat de la deuxième analyse devait encore être confirmé.

-tristesse et souffrance-

Mais son porte-parole, Juan Martin Padilla, a fini par reconnaître la vérité.

"C'est une erreur de communication de la part de personnes, bien intentionnées, qui aiment beaucoup "Chicha" Mariani", a-t-il expliqué lors d'une conférence de presse.

La personne qui a publié le communiqué annonçant la bonne nouvelle "s'est laissée emportée par l'émotion d'une personne qui lui apporté un rapport qui faisait état de résultats positifs".

"Après 39 ans d'infatigables recherches, (Maria) Chicha Mariani et sa petite fille Clara Anahi se sont retrouvées", avait écrit jeudi la fondation sur sa page Facebook, tandis qu'un selfie immortalisant ces retrouvailles était posté sur les réseaux sociaux, sans en préciser la date.

La fondation Anahi avait précisé que le test avait été realisé dans un laboratoire privé, sans en donner le nom.

Maria Mariani est "très triste et elle souffre", a rapporté M. Padilla.

L'histoire de Clara Anahi est connue notamment grâce aux nombreuses lettres ouvertes que sa grand-mère lui a adressées. "Le plus grand espoir qui me fait avancer est que nous nous retrouvions enfin", écrivait-elle en mars.

Le mouvement estime que 500 bébés d'opposants politiques, enlevés à leur mère ou nés en captivité, ont ensuite été adoptés par des dignitaires du régime militaire, responsable de la mort ou de la disparition de 30.000 personnes.

En août 2014, la dirigeante historique du mouvement des Grands-Mères de la Place de Mai, Estela Carlotto, avait retrouvé son petit-fils, lui aussi enlevé sous la dictature, après 36 ans de recherches.

La mère de Clara, Diana Teruggi de Mariani, était membre de la guérilla péroniste des Montoneros qui combattait le régime. Son mari, Daniel Mariani, était absent la nuit où sa femme a été tuée par des agents du régime dans leur maison de La Plata, à 60 kilomètres de Buenos Aires, et sa fille enlevée. Il a été tué huit mois plus tard.

Source : AFP

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