Fraude fiscale: le Conseil constitutionnel aura le dernier mot dans le dossier Cahuzac

  • Jérôme Cahuzac et son avocat Jean-Alain Michel à la sortie du tribunal le 8 février 2016 à Paris
    Jérôme Cahuzac et son avocat Jean-Alain Michel à la sortie du tribunal le 8 février 2016 à Paris AFP - MIGUEL MEDINA
  • Affaire Cahuzac : dates clés
    Affaire Cahuzac : dates clés AFP - Sabrina BLANCHARD, Paul DEFOSSEUX
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Centre Presse Aveyron

La Cour de cassation a laissé mercredi aux juges constitutionnels le soin de trancher une délicate question de droit dans l'affaire de fraude fiscale qui aura marqué le quinquennat, celle du ministre menteur Jérôme Cahuzac.

Le Conseil constitutionnel a trois mois pour rendre sa décision concernant l'ancien ministre du Budget, mais aussi dans le dossier du richissime marchand d'art Guy Wildenstein.

Le premier, qui menait au sein du gouvernement une lutte sans merci contre les fraudeurs français, a dissimulé un compte à l'étranger, le second, héritier d'une fortune colossale, est dans une guerre ouverte avec sa famille, qui doit des centaines de millions au fisc.

L'avocat de Jérôme Cahuzac, Me Emmanuel Piwnica, a fait part de sa "satisfaction" après cette décision qui, a-t-il relevé, "est longue et motivée, ce qui est exceptionnel".

La défense avait, dans chacun de ces procès ouverts début 2016, soulevé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) contestant, pratiquement dans les mêmes termes, le cumul de sanctions pénales et fiscales.

Le combat d'experts entamé autour de ces questions a offert un répit de quelques mois à l'ex-ministre du Budget comme à l'héritier. Mais leurs procès auront bien lieu: même si le Conseil constitutionnel invalidait les poursuites concernant la fraude fiscale, demeureront les mises en cause pour blanchiment.

Pour Jérôme Cahuzac, étoile montante socialiste devenu un "paria" de la République, la date de reprise des audiences est déjà fixée au 5 septembre.

Il retrouvera sur les bancs du tribunal correctionnel son ex-épouse, Patricia Ménard, poursuivie comme lui pour fraude fiscale et blanchiment, et leurs anciens conseillers, le banquier suisse François Reyl et l'ex-avocat Philippe Houman, qui répondront de blanchiment. Tous encourent jusqu'à sept ans de prison et un million d'euros d'amende.

La question posée mercredi aux "sages" interroge la constitutionnalité d'articles du code général des impôts qui autorisent "à l'encontre de la même personne et en raison des mêmes faits, le cumul de procédures ou de sanctions pénales et fiscales".

- "Peines de même nature" -

La défense de l'ancien ministre dénonce une double peine, alors que les époux Cahuzac ont déjà accepté "un redressement fiscal majoré de 80%", d'un montant de plus de 2,3 millions d'euros, dont 500.000 euros de pénalités.

Elle espère, dans les deux affaires, que jouera le précédent EADS: le Conseil constitutionnel avait mis fin à une procédure pénale contre le groupe aéronautique le 18 mars 2015 car les faits avaient déjà été examinés par une juridiction administrative, en l'occurrence l'Autorité des marchés financiers.

Autre question soulevée, l'amende équivaut-elle à la prison? Pour Me Piwnica, "on peut considérer que les peines sont de même nature eu égard notamment au fait qu'elles relèvent du même type de gravité".

Une question dont la Cour de cassation tient compte dans son arrêt, en relevant que les articles visés par la QPC "peuvent aboutir au prononcé de sanctions de nature équivalente et relèvent du même ordre de juridiction".

Premier accroc à la "République exemplaire" voulue par François Hollande, l'affaire Cahuzac avait éclaté en décembre 2012, quand le site Mediapart révèle que le ministre a possédé un compte caché à l'étranger.

Jérôme Cahuzac commence par tout nier, avant de démissionner en mars 2013 puis de passer aux aveux en avril.

L'instruction a démonté les mécanismes d'une fraude fiscale "sophistiquée" et "familiale", visant à placer l'argent des revenus de la clinique spécialisée dans les implants capillaires des époux Cahuzac, mais aussi des prestations du chirurgien auprès de laboratoires pharmaceutiques.

Un premier compte a été ouvert par un "ami" en 1992, puis un autre au nom de Cahuzac. Lorsque le secret bancaire suisse se fissure en 2009, les quelque 600.000 euros qu'y détient Jérôme Cahuzac prennent la route de Singapour, via une société enregistrée aux Seychelles.

Les époux ouvrent aussi ensemble un compte sur l'île de Man en 1997. Patricia Cahuzac ouvre en 2007 son propre compte suisse. L'argent est aussi "blanchi" via les comptes de la mère de l'ancien ministre, qui a reconnu s'être fait livrer de l'argent liquide à Paris.

Source : AFP

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