Christian Espié : "Je ne l’ai pas tué, je le jure"

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  • Pour l’avocat général, Bernard Salvador, l’accusé « se moque du monde ».
    Pour l’avocat général, Bernard Salvador, l’accusé « se moque du monde ». JAT
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Mathieu Roualdés

L’accusé, âgé de 66 ans, n’a cessé de nier le meurtre de Thomas Latorre,
mercredi 9 octobre, lors du premier jour de son procès, en livrant une version qualifiée de "fantaisiste" par l’avocat général, Bernard Salvador.

Vingt-sept mars 2017, 18 heures. L’association "calèches et cavaliers du Rouergue", basée à Villeneuve-d’Aveyron, tient une réunion. Plusieurs de ses membres partagent un apéritif. Le président, Thomas Latorre, lui, se fait attendre… Ce n’est pas dans ses habitudes, l’homme a la réputation d’être ponctuel. Les minutes passent et l’inquiétude commence à grandir. Deux membres actifs de l’association, dont Christian Espié, décident alors de se rendre au domicile de Thomas Latorre, dans son "hacienda" à La Capelle-Balaguier. Ils y découvrent alors le corps sans vie du septuagénaire, la tête ensanglantée. Très vite, la piste criminelle est privilégiée. Avant la conclusion : Thomas Latorre a été tué à coups de barre de fer. Présent sur place, et "très mal" selon plusieurs témoins, Christian Espié est interrogé. Il ne dira rien. Mais dès le lendemain, les gendarmes se rendent à son domicile et y découvrent un polo taché de sang. Ses chaussures et sa voiture le sont également. Placé en garde à vue, l’homme passera rapidement aux aveux, invoquant un "coup de folie". Puis, il dira qu’il a agi sous ordre de Thomas Latorre, voulant mettre fin à ses jours en raison "de problèmes de santé".

"J’ai avoué pour protéger ma famille"

Mais en août 2017, Christian Espié change de version. Il indique qu’une voiture, avec deux personnes à son bord, appartenant à la communauté des gens du voyage, s’est arrêtée devant chez lui, l’après-midi du drame. A la recherche de "ferrailles", les occupants du véhicule lui ont alors demandé de l’accompagner chez Thomas Latorre. Il les a suivis. Avant d’assister, impuissant, au meurtre de celui qu’il considère "comme un père".

Hier, lors du premier jour de son procès, Christian Espié, aujourd’hui âgé de 66 ans, a une nouvelle fois livré cette version, tantôt avec aplomb, tantôt avec hésitation. Mais en n’éludant aucune question de la partie civile, comme du président. Pourquoi a-t-il avoué le meurtre de Thomas Latorre à de nombreuses reprises ? "Pour protéger mes proches car ces gens-là m’avaient donné l’ordre de ne rien dire, sous menace de tuer ma famille". Pourquoi avoir, ensuite, changé de version en mettant en cause des "gitans ferrailleurs" ? "Pour moi, ces deux personnes n’étaient plus dans le coin, leur voiture était immatriculée en Corrèze. Mais ma famille est toujours en danger". Pourquoi, seul son ADN a été retrouvée sur l’arme du crime et du sang de la victime sur ses vêtements ? "Car après l’avoir tué, ils m’ont lancé la barre de fer en me demandant de la nettoyer". Enfin, pourquoi ces personnes auraient-elles pris le risque de s’embarrasser d’un témoin pour commettre un tel crime ? "C’était un guet-apens. On m’a mis là-dedans. Mais je ne sais pas pourquoi".

"Vous espérez quoi avec cette version fantaisiste ?"

Durant plus de deux heures, Christian Espié, derrière ses lunettes et sa moustache, a répété inlassablement la même histoire. Les incohérences relevées et les nombreuses questions posées par la partie civile ne l’ont que rarement fait vaciller. "Je ne l’ai pas tué, je le jure", a-t-il dit du bout des lèvres, à plusieurs reprises, quand les mots lui faisaient défaut… Ce qui a eu le don de faire bondir l’avocat général, Bernard Salvador : "Réveillez-vous ! Vous espérez quoi avec cette version fantaisiste ? Vous, vous moquez du monde !". Avec désormais cette question pour les deux prochaines journées d’audience (jeudi 10 et vendredi 11 octobre) :  Christian Espié campera-t-il toujours sur sa position ? Ou avouera-t-il, de nouveau, sous la pression des nombreuses charges pesant contre lui ?

" Ca bouillonnait en lui"

Son accent ne trompe pas : Christian Espié est né en 1953 à Bor-et-Bar, dans l’Aveyron. Cadet d’une fratrie de trois frères, il se présente lui-même comme « quelqu’un de la campagne ». Il a quitté l’école à 14 ans avant d’exercer plusieurs boulots (maçon, carreleur, transporteur, vendeur sur les marchés…) et de construire une vie de famille « heureuse ». Mais, en 2009, l’homme tombe dans la dépression. Depuis plusieurs années, il est employé municipal à Villefranche-de-Rouergue et s’occupe du gymnase du Tricot. Une expérience qu’il a eu « du mal à supporter. C’était ma deuxième maison et les jeunes ne cessaient de dégrader les lieux… ». Il terminera d’ailleurs sa carrière en arrêt maladie, avant de faire valoir ses droits à la retraite. Et de rejoindre l’association de « calèches et cavaliers du Rouergue », en 2013. Face à la cour, Christian Espié dira être « heureux » à cette époque. Pourtant, les experts, à la barre, diront que cela « n’était pas possible. Ça bouillonnait en lui. Son impuissance dans ce gymnase, ça l’a rongé. Et la figure de Thomas Latorre, ayant les plein pouvoirs dans l’association, a pu générer de l’agressivité réactionnelle en lui. » Le casier judiciaire de Christian Espié fait état d’une condamnation pour dégradations de biens lors d’une manifestation, en 2013. 
 

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