En Aveyron, les étoiles Michelin brillent sous un ciel contrasté

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  • Trois des chefs étoilés aveyronnais : Michel Truchon (Sauveterre), Hervé Busset (Conques). et  Michèle Fagegaltier  (Bozouls).
    Trois des chefs étoilés aveyronnais : Michel Truchon (Sauveterre), Hervé Busset (Conques). et Michèle Fagegaltier (Bozouls). Repro CPA
  • Trois des chefs étoilés aveyronnais : Michel Truchon (Sauveterre), Hervé Busset (Conques). et  Michèle Fagegaltier  (Bozouls). Trois des chefs étoilés aveyronnais : Michel Truchon (Sauveterre), Hervé Busset (Conques). et  Michèle Fagegaltier  (Bozouls).
    Trois des chefs étoilés aveyronnais : Michel Truchon (Sauveterre), Hervé Busset (Conques). et Michèle Fagegaltier (Bozouls). Repro CPA
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    Trois des chefs étoilés aveyronnais : Michel Truchon (Sauveterre), Hervé Busset (Conques). et Michèle Fagegaltier (Bozouls). Repro CPA
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Centre Presse Aveyron

Depuis la décision de Sébastien de Bras, le département perd des étoiles au Guide Michelin qui dévoile ce lundi 27 janvier son palmarès. Suspense.

La semaine dernière, une bombe médiatique été lâchée : Bocuse perd une étoile. L’emblématique chef français, décédé en janvier 2018 avait trois étoiles qui brillaient au-dessus de lui depuis 1965. En septembre 2017, c’est Sébastien Bras qui, depuis le Puech du Suquet, faisait trembler les marmites françaises en annonçant son souhait de ne plus voir ses trois étoiles figurer au Michelin. Et, coïncidence, depuis, l’Aveyron perd des étoiles. Quelques semaines après Bras, en novembre 2017, Jean-Luc Fau, à Rodez, lassé, lui, par la charge administrative afférente à la gestion d’un restaurant, a vendu Gouts et couleurs et éteint l’étoile. À Paris, en juin 2019, Cyril Lignac a fermé le Quinzième et éteint l’étoile également. Toujours à Paris, Julien Boscus, en quittant Les Climats pour voler de ses propres ailes dans son restaurant Origines, a également éteint une étoile.

Crises…

L’Aveyron reste cependant bien représenté dans la galaxie Michelin : Le Sénéchal à Sauveterre-de-Rouergue, l’auberge du Vieux-Pont à Belcastel, le Moulin de Cambelong à Conques, Le Belvédère à Bozouls pour la partie aveyronnaise, Alexandre Bourdas au SaQuaNa à Honfleur, avec deux étoiles, et Jean-François Rouquette au restaurant Hyatt.

Reste que cette relation qui s’étiole avec les étoiles interroge. "Je sais qu’on va dire que je suis aigri parce que je n’ai pas eu la deuxième étoile. Mais la vérité c’est que je n’ai plus envie d’être dans ce système de classement, je veux m’en libérer " a expliqué au Monde, en juin 2019, Cyril Lignac.

Sébastien Bras ne souhaite pas rouvrir ce couvercle, pas plus qu’il n’en a eu envie quand, en 2019, Michelin lui a d’office attribué deux étoiles. "Je ne me sens plus concerné par les étoiles, ni par les stratégies du guide ", déclarait-il, récemment au Monde.

Il ne faut donc plus parler de Michelin à Lignac et Bras.

Jean-Luc Fau, retiré des étoiles, mais toujours à l’affût de ce qui se passe dans l’arrière-cuisine de la gastronomie française, a également un œil critique. Mais envers ces chefs qui ne veulent plus du Michelin.

" Ça reste, pour moi, le meilleur guide. À chaque fois que je vais dans un restaurant étoilé, je comprends pourquoi il l’a été". Et de trouver "un peu facile " de ne plus vouloir des étoiles Michelin après avoir bien profité de la lumière. "Pour Bocuse, tout le monde savait que Michelin était en quelque sorte pris au piège par la notoriété de Paul Bocuse", glisse encore Jean-Luc Fau.

… Et pression

Mais les Aveyronnais sont plutôt fiers de leurs étoiles, comme en témoigne Michèle Fagegaltier (lire par ailleurs). "C’est le guide le plus sérieux" confiait Guillaume Viala (Le Belvédère à Bozouls), l’année dernière à la veille de la sortie du guide rouge. Quant à la pression qu’elle pourrait engendrer, Nicole Fagegaltier ou Michel Truchon, forts de leur expérience, confient : "On n’y pense, mais pas tous les jours ". " Mais on peut comprendre, quand on engage des travaux importants avec des sommes importantes, qu’il y ait une forte pression autour de l’étoile ", lance Jean-Luc Fau.

Aujourd’hui lundi 27 janvier, le département saura donc à quelle sauce il a été préparé par les inspecteurs du Michelin.

Peu d’informations filtrent depuis la bombe Bocuse. Mais une chose est sûre, lundi, une petite pression planera dans les cuisines aveyronnaises. Jean-Luc Fau se souvient encore de ce moment où l’on attend que le téléphone sonne…

Philippe Routhe

Nicole Fagegaltier : « Une étoile, c’est la cerise sur le gâteau »

Lorsque nous l’avons contactée, Nicole Fagegaltier, la chef étoilée du Vieux Pont, à Belcastel, profitait de quelques jours de vacances, loin de l’Aveyron, avec son mari Bruno Rouquier. Bien évidemment concernée par la parution, aujourd’hui, de la nouvelle édition du Guide Michelin, la chef des bords de l’Aveyron avoue ne subir aucune pression particulière. « Cela fait 29 ans qu’on a l’étoile… La vie passe. Un jour, on s’arrêtera aussi », relativise-t-elle. Et lorsqu’on lui demande si elle a déjà songé à l’obtention d’une deuxième étoile, l’ancienne championne de France de dessert lâche un « non » catégorique, sans la moindre hésitation. « Il faut travailler pour maintenir la première. Savoir aussi ce que l’on est capable de faire, sachant que plus l’on monte, plus la pression grandit. Il faut se connaître pour savoir ce que l’on peut porter. Essayer de tendre vers le meilleur, c’est déjà une pression. »

Satisfaire la clientèle
Plusieurs chefs médiatiques, à l’image de Sébastien Bras, Marc Veyrat ou Cyril Lignac ont récemment pris leur distance avec le célèbre guide rouge. Ces fameuses « Étoiles filantes », récemment évoquées par l’un de nos confrères du Monde. Comprend-elle ce mouvement, inédit jusqu’alors ? « Ce sont des cas différents, selon les chefs, commente-t-elle. Sébastien n’en voulait plus, Veyrat en a perdu une. Le Michelin reste une institution, si on ne veut pas jouer avec, il ne faut pas rentrer dedans. » Et la chef étoilée de Belcastel d’évoquer la dimension économique d’un restaurant gastronomique : « Une étoile a une véritable incidence sur la vie économique d’une entreprise. Quand on en a trois, cela devient énorme, et si l’on en perd une, cela devient très compliqué. » Et que dire des retombées médiatiques. Mais alors que certains jeunes chefs prennent rapidement (et un peu trop) la « grosse tête », Nicole Fagegaltier a su conserver sa modestie naturelle. Fidèles à ses racines, à ses valeurs familiales, à son village natal de Belcastel qui l’a vu grandir et se construire, à un terroir et aux produits qui vont avec. « Ce que je souhaite, avant tout, c’est que mes clients repartent satisfaits, témoigne-t-elle. Une étoile, c’est vraiment la cerise sur le gâteau, mais je n’y pense pas tous les matins. »
Voilà donc près de trente ans que Nicole Fagegaltier régale sa clientèle en étant l’une des rares et plus anciennes femmes chefs étoilées françaises. Mais pourquoi aussi peu de femmes parviennent à se faire une place au soleil de la gastronomie française. « Il y a beaucoup de femmes qui se lancent et qui, pour diverses raisons, abandonnent. », explique la seule chef aveyronnaise et l’une des deux seules en Occitanie avec l’Héraultaise, Amélie Darvas, nouvellement élue l’an passé. « C’est aussi un métier difficilement compatible avec une vie de femme. Cela dit, poursuit Nicole Fagegaltier, les cuisines françaises se féminisent de plus en plus. Il faut attendre un peu. »

Actuellement en travaux, avec la réfection du toit en lauze de la bâtisse, le restaurant des sœurs Fagegaltier et de Bruno Rouquier rouvrira ses portes au mois de mars.

Joêl Born

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