Financement de l'Ehpad de Millau : l'ancienne municipalité a-t-elle creusé le déficit de 5 M€ ?

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  • L'Ehpad des Terrasses des Causses, nouveau motif de crispation entre élus millavois.
    L'Ehpad des Terrasses des Causses, nouveau motif de crispation entre élus millavois. AD
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Aurélien Delbouis

"Un surcoût abyssal proche de 5 M€..." En préférant emprunter à taux variable plutôt que fixe - pour financer l’Ehpad des Terrasses des Causses - l'ancienne municipalité a-t-elle fait preuve d'une grande "irresponsabilité" comme le dénonce la majorité.

Déstabilisée par les récentes démissions des membres de l'opposition, la majorité municipale millavoise fourbit ses armes et lance la riposte sur un dossier récemment exhumé par la maire Emmanuelle Gazel : l'Ehpad des Terrasses des Causses à Millau. 

Inauguré en juin 2023, l'établissement de santé autonome de 190 lits répartis sur 10 000 m² en cœur de la ville avait suscité l'inquiétude des familles de résidents qui appréhendaient le déménagement. Le personnel avait également mis la direction en demeure pour assurer pleinement ses missions. De l'histoire ancienne.

"Masquer des erreurs de gestion"

C'est un autre sujet, celui du financement - à crédit - de l'établissement, qui intéresse aujourd'hui la municipalité. De quelle affaire s'agit-il ? De quelles erreurs de gestion parle-t-on précisément ?
La réponse est venue d'un communiqué de la majorité qui par la voix du premier adjoint Michel Durand rappelle au préalable le montant de l'emprunt contracté sous l'ancienne mandature - celle de Christophe Saint-Pierre - pour financer l'établissement. "16 600 000 € sur 35 ans". Jusque-là, rien d'anormal. 

"Irresponsable d'engager l'établissement sur un prêt à taux variable"

Sauf que - Michel Durand fulmine - "l'équipe Saint-Pierre" a fait le choix d'emprunter à taux variable à une époque où les taux fixes étaient encore très bon marché. "Acceptables" dirait Christophe Saint-Pierre. Or, avec l'envolée des taux que l'on connaît aujourd'hui, le résultat ne s'est pas fait attendre. 

"La somme de 5 521 560 € a été empruntée à un taux initial de 1,35%. Ce taux est aujourd'hui passé à 3,78%", développe la majorité. Mieux, une ligne de crédit démontre que cette même majorité a levé "11 078 440 € supplémentaires (PLS PLSDD) au taux initial de 1,86%." Taux qui s'est depuis envolé pour atteindre "3,11 %" 

"Si on le compare avec les taux annoncés pour 2024 (3,78% et 3,11%), le surcoût est proche de 5 M€", détaille l'élu qui tance vertement la comptabilité de l'ancien maire et de son équipe. 

"Seuls les emprunts à taux fixe peuvent être renégociés" 

"Il est irresponsable d'engager l'établissement sur un prêt à taux variable avec tous les aléas possibles sur une durée aussi longue. Cela semble être une évidence qui relève d’une gestion en bon père de famille." 

En ville, Christophe Saint-Pierre (*), lui, le répète : l'actuelle majorité n'a qu'à renégocier les taux. "Impossible, récuse Michel Durand. Chacun devrait savoir, qui plus est des élus responsables, que la Banque des Territoires ne s'engage pas dans une renégociation de prêts à taux variable. Seuls les emprunts à taux fixe peuvent être renégociés vers du variable. Jamais le contraire."

Et de se lamenter : "Aucune autre banque n'acceptera de reprendre cette dette quelle que soit la nature du taux (fixe ou variable), compte tenu du montant élevé de l'encourt et de la conjoncture actuelle. Au-delà du fait que cette explosion non anticipée des montants à rembourser plonge l’établissement dans la difficulté, la ville de Millau garante à 100%, devra le cas échéant tenir ses engagements face à ce surcoût abyssal."

Une tuile de plus pour la Ville dont le budget 2024 prévoit déjà 3 M€ de remboursement d’emprunts mais aussi, et surtout, 5,9 M€ de dépenses d’investissements dont 1,4 M€ pour le seul complexe sportif, autre legs encombrant de la mandature Saint-Pierre.

Une démission pour masquer des erreurs de gestion ?

Dans un récent entretien accordé à Midi Libre, la maire de Millau Emmanuelle Gazel s'interroge quant au timing choisi par les membres de l'opposition pour annoncer leur démission. Sachant par ailleurs - au profit du non-alignement de Sylvie Fort - que le quorum nécessaire pour passer une nouvelle fois devant les électeurs ne serait pas atteint.

De démissions, Emmanuelle Gazel voit davantage un moyen "de masquer des erreurs de gestion qui sont en train d'apparaître. On a largement parlé de la mauvaise gestion des finances publiques, mais l'affaire de l'Ehpad le met dans une grande difficulté et peut mettre la ville en grande difficulté également. Ce sont des erreurs de gestion gigantesques, qui ne sont pas acceptables".

(*) Contacté, l'ancien maire et conseil municipal d'opposition démissionnaire Christophe Saint-Pierre a confirmé auprès de Midi Libre qu'il adresserait "sous peu", "une mise au point".

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