Tournée de Dieudonné: l'interdiction se profile

  • Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, le 3 janvier 2013 à Paris
    Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, le 3 janvier 2013 à Paris AFP - Bertrand Guay
  • Dieudonné M'bala M'bala au théâtre de la "Main d'Or" à Paris, le 15 janvier 2012 Dieudonné M'bala M'bala au théâtre de la "Main d'Or" à Paris, le 15 janvier 2012
    Dieudonné M'bala M'bala au théâtre de la "Main d'Or" à Paris, le 15 janvier 2012 AFP/Archives - Patrick Kovarik
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AFP

A quatre jours du lancement d'une tournée du polémiste Dieudonné, le gouvernement a appelé lundi les préfets à interdire la tenue de ses spectacles, au nom du respect de l'ordre public et de la dignité humaine.

Le ministre de l'Intérieur Manuel Valls a transmis une circulaire à l'ensemble des préfets pour leur rappeler "les outils" dont ils disposent pour interdire des spectacles "qui contiennent des propos antisémites et infâmants". "Les préfets ont désormais les moyens juridiques pour agir et ils vont le faire, je n'en doute pas un instant", a-t-il déclaré en marge d'un déplacement en Seine-Saint-Denis.

Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a ensuite affirmé n'avoir "aucun doute" sur le fait que le préfet de Loire-Atlantique s'en saississe pour annuler la représentation prévue jeudi au Zénith de Nantes.

Selon la circulaire, transmise à l'AFP, deux motifs peuvent être invoqués pour prendre un arrêté d'interdiction: un trouble à l'ordre public que les mesures de police classiques ne suffisent pas à contrôler ou une atteinte à la dignité humaine.

Ce point fait référence à une décision du Conseil d'Etat du 27 octobre 1995 qui avait validé l'interdiction d'un spectacle de "lancer de nains", reconnaissant explicitement pour la première fois que la dignité de la personne humaine était une composante de l'ordre public.

Dieudonné doit tourner jusqu'en juin avec son one-man-show "Le Mur", déjà rôdé à Paris, dans lequel il multiplie les charges contre les juifs.

Plus de 5.200 billets ont été vendus à 43 euros pour la représentation nantaise.

La famille Klarsfeld, au nom des Fils et filles des déportés juifs de France, a appelé à manifester mercredi dans la métropole de l'Ouest pour demander l'interdiction du spectacle.

Le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) leur a emboîté le pas lundi, en appelant à la "mobilisation" dans la vingtaine de villes où l'humoriste doit se produire d'ici juin.

Selon plusieurs sources, les préfets pourraient s'appuyer sur ces manifestations pour évoquer un risque de trouble à l'ordre public.

Il est cependant probable que Dieudonné introduise des recours en référé pour contrer les interdictions. Dans le passé, il a gagné une quinzaine d'actions similaires devant les tribunaux administratifs et le Conseil d'Etat, qui ont privilégié la liberté d'expression.

"Sympathie réactionnelle"

Pour cette raison, la Ligue des droits de l'Homme a mis en garde contre les risques d'une interdiction préalable, qui pourrait "fédérer autour de Dieudonné une sympathie réactionnelle de ceux qui se considèrent opprimés". En revanche, la LDH encourage à poursuivre en justice chaque atteinte à la loi de Dieudonné M'bala M'bala, déjà condamné à de multiples reprises pour antisémitisme ou injure raciale.

Il s'est vu infliger un total de 65.290 euros d'amendes, mais n'a pour l'instant pas acquitté un seul centime, selon des sources judiciaires.

Suite à une plainte de la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra), une instruction a été ouverte sur une éventuelle organisation frauduleuse d'insolvabilité et sur le patrimoine de Dieudonné.

Malgré les condamnations unanimes de Dieudonné par la classe politique, il continue de s'appuyer sur un public de fidèles très présents sur les réseaux sociaux, qui compte notamment des militants pro-palestiniens et de l'extrême droite traditionaliste.

Samedi soir, environ 200 de ses fans se sont retrouvés dans son théâtre de la Main d'Or, à Paris, où le provocateur a joué sur la connivence avec son public pour lancer des attaques ad hominem sans se priver de référence à la Shoah.

En conclusion, ils ont tous effectué le geste de la "quenelle", qu'ils présentent comme "un bras d'honneur anti-système", mais que d'autres interprètent comme un salut nazi inversé.

SOS Racisme et l'Union des étudiants juifs de France (UEJF) ont annoncé qu'ils poursuivraient désormais toutes les "quenelles" effectuées dans des lieux où elles "ne laissent pas de doute" sur leur caractère antisémite.

Des personnes se sont déjà fait photographier faisant la quenelle devant des synagogues, un mémorial de la Shoah et l'école de Toulouse où Mohamed Merah a assassiné un enseignant et trois enfants juifs en 2012.

Source : AFP

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