Procès Bonnemaison: "La médecine, c'est ma vie" déclare l'accusé avant le délibéré

  • L'ex-urgentiste Nicolas Bonnemaison et son avocat Arnaud Dupin à leur arrivée le 24 octobre 2015 au tribunal à Angers
    L'ex-urgentiste Nicolas Bonnemaison et son avocat Arnaud Dupin à leur arrivée le 24 octobre 2015 au tribunal à Angers AFP - JEAN-SEBASTIEN EVRARD
  • Valérie Garmendia et Bernard Franck Macera, avocats des parties civiles à leur arrivée le 24 octobre 2015 au palais de justice à Angers
    Valérie Garmendia et Bernard Franck Macera, avocats des parties civiles à leur arrivée le 24 octobre 2015 au palais de justice à Angers AFP - JEAN-SEBASTIEN EVRARD
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Centre Presse Aveyron

La Cour d'assises du Maine-et-Loire rendait samedi son verdict dans le procès en appel de l'ex-urgentiste Nicolas Bonnemaison, à Angers pour sept "empoisonnements" de patients en fin de vie, et qui, une dernière fois avant le délibéré, a clamé "la médecine, c'est ma vie".

"La médecine, c'est ma vie, les patients sont ma vie et ils me manquent", a lancé aux jurés l'ancien praticien de 54 ans, qui encourt la réclusion criminelle à perpétuité pour avoir abrégé la vie de sept patients âgés incurables en 2010 et 2011.

Cinq ans de prison avec sursis, une peine modérée comparable à celle du procès en première instance à Pau, ont été requis vendredi contre l'urgentiste. S'il n'est "pas un assassin, pas un empoisonneur au sens commun de ces termes", mais a bien "provoqué la mort délibérément" de malades avec des produits létaux pour "hâter la fin", a résumé l'avocat général Olivier Tcherkessoff.

Les avocats de Nicolas Bonnemaison ont quant à eux appelé les jurés au "courage", en l'acquittant une seconde fois, comme à Pau en juin 2014.

"J'ai agi en médecin et je vous le dis avec beaucoup de sincérité", a insisté samedi Nicolas Bonnemaison, concluant une très courte intervention, vers 09H15, juste avant que les jurés ne se retirent pour délibérer. Le verdict était attendu dans l'après-midi.

- Sa "dernière patiente" ? -

Tout de noir vêtu, très tendu en lisant une feuille de papier, l'ex-urgentiste bayonnais a eu une pensée pour une patiente, arrivée le 10 août 2011 dans son service de l'Unité d'hospitalisation de courte durée (UHCD): "J'étais en train de l'examiner quand on est venu me chercher", pour le placer en garde à vue, s'est-il souvenu.

"J'espère que ce ne sera pas la dernière patiente de toute ma vie", a-t-il dit d'une voix émue.

Nicolas Bonnemaison avait été radié par le Conseil de l'ordre quelques jours après son acquittement en juin 2014 à Pau. Pas plus à Pau qu'à Angers, l'accusation n'avait requis contre lui l'interdiction d'exercer la médecine.

Mais le parquet général avait fait appel après l'acquittement de Pau, d'où ce deuxième procès en cour d'Assises, délocalisé cette fois.

Ce procès-ci, qui a vu défiler à la barre depuis le 12 octobre professeurs, médecins, anciens ministres, dont le père de la loi sur la fin de vie, Jean Léonetti, a été aussi technique et dense qu'en première instance, avec quelquefois des expertises contradictoires, mais peut-être plus apaisé qu'à Pau. Il a aussi été par moments difficilement soutenable, avec de détaillées descriptions d'agonies.

L'ex-urgentiste est accusé d'avoir administré de l'hypnovel, un puissant sédatif, et du norcuron, médicament à base de curare, à des patients âgés, incurables, et dont les traitements avaient été arrêtés. Et sans informer les familles, ou le personnel soignant.

"La volonté de cacher ce qu'il décide, ce qu'il prescrit et ce qu'il administre est révélatrice de son intention", a martelé l'avocat général, dans un réquisitoire de trois heures, au ton sévère contrastant avec la peine requise.

- "Obtenir des réponses" -

"Il ne s'agit pas d'accabler un homme fragile et en souffrance, dont tout démontre qu'il a été victime de son propre aveuglement" en "s'installant dans sa toute-puissance" de médecin, a-t-il conclu.

Nicolas Bonnemaison "a-t-il délibérément donné la mort? C'est la seule question à laquelle vous allez devoir répondre", a lacé aux jurés Me Arnaud Dupin, l'un des deux avocats de l'ex-médecin.

Tout au long du procès, l'ancien praticien a martelé avoir cherché à "soulager, pas tuer", face à des patients en agonie, en souffrance de toute fin de vie, reconnaissant des "torts".

"Il a peut-être commis des erreurs, mais il a tué personne. C'étaient des gens du bout du bout", a appuyé l'autre avocat de la défense, Benoît Ducos-Ader, "suppliant" la cour d'"acquitter" M. Bonnemaison, pour ne pas faire de ce procès "un fiasco judiciaire".

L'enquête avait été ouverte en août 2011 après un signalement du personnel soignant au directeur de l'hôpital de Bayonne. Aucune des familles des victimes n'a porté plainte. Deux s'étaient constituées parties civiles pour "obtenir des réponses".

Source : AFP

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