Turquie: la contestation anti-Erdogan se durcit avec la grève d'un syndicat

  • Un policier anti-émeutes tire une grenade lacrymogène lors de heurts avec des manifestants le 3 juin 2013 à Istanbul
    Un policier anti-émeutes tire une grenade lacrymogène lors de heurts avec des manifestants le 3 juin 2013 à Istanbul AFP - Bulent Kilic
  • Des manifestants font face à la police anti-émeutes le 4 juin 2013 à Istanbul
    Des manifestants font face à la police anti-émeutes le 4 juin 2013 à Istanbul AFP - Aris Messinis
  • La police anti-émeutes fait face aux manifestants le 3 juin 2013 à Ankara
    La police anti-émeutes fait face aux manifestants le 3 juin 2013 à Ankara AFP - Adem Altan
  • Carte de localisation de la province de Hatay où un manifestant a été tué par balle
    Carte de localisation de la province de Hatay où un manifestant a été tué par balle AFP
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AFP

Le bras de fer qui oppose depuis cinq jours le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan aux dizaines de milliers de Turcs qui défient son autorité dans la rue se durcit mardi avec l'entrée en grève d'un syndicat, après la mort d'un deuxième manifestant.

Au terme d'une nouvelle nuit de mobilisation et de violences dans plusieurs villes du pays, l'une des plus grandes centrales syndicales du pays, la Confédération des syndicats du secteur public (KESK), a décidé d'apporter son soutien à la contestation en entamant mardi une grève de deux jours.

"La terreur exercée par l'Etat contre des manifestations totalement pacifiques se poursuit de telle façon qu'elle menace la vie des civils", a jugé la centrale, marquée à gauche, qui revendique 240.000 adhérents.

Après la mort dimanche d'un jeune homme percuté par une voiture lors d'une manifestation à Istanbul, un deuxième protestataire âgé de 22 ans a été tué lundi soir dans un rassemblement à Hatay de plusieurs "coups de feu tirés par une personne non identifiée", a annoncé dans la nuit le gouverneur de la ville, Celalettin Lekesiz.

La police a ouvert une enquête sur les circonstances de ce décès, encore mystérieuses.

A Istanbul, Ankara ou encore Izmir (ouest), les mêmes scènes d'affrontements se sont répétées dans la nuit de lundi à mardi. Aux jets de gaz lacrymogènes et aux canons à eau de la police ont répondu les jets de pierres et d'objets divers des manifestants, faisant de nombreux blessés. La situation est ensuite revenue au calme.

Au coeur de la protestation qui a débuté vendredi, l'emblématique place Taksim, dans le centre d'Istanbul, a une nouvelle fois été occupée une bonne partie de la nuit de lundi à mardi par des milliers de manifestants qui, bannières rouges au vent, ont réclamé le départ du chef du gouvernement aux cris de "Tayyip, démission !"

En l'absence du Premier ministre en visite officielle jusqu'à jeudi dans les pays du Maghreb, le président turc Abdullah Gül et le vice-Premier ministre Bülent Arinç avaient rendez-vous mardi à 10H30 (07H30 GMT) pour faire le point de la situation. M. Arinç devait s'exprimer devant la presse à 12H00 (09H00 GMT).

Depuis le début du mouvement, les deux hommes, issus du même parti islamo-conservateur que M. Erdogan, ont plutôt prôné l'apaisement.

Erdogan ferme

Lundi, M. Gül à une nouvelle fois appelé au calme en jugeant "tout à fait normal" que se déroulent des "manifestations pacifiques". Et M. Arinç a regretté dès samedi que le dialogue avec les opposants à la destruction du parc Gezi d'Istanbul, à l'origine du mouvement, n'ait pas primé sur les gaz lacrymogènes.

A l'inverse, contesté comme jamais depuis l'arrivée de son parti islamo-conservateur au pouvoir en 2002, Recep Tayyip Erdogan continue, lui, à défier le mouvement par la fermeté et un brin de provocation.

Avant de quitter la Turquie lundi, il a promis de rester "ferme" en renvoyant aux élections locales de 2014 les manifestants, qui l'accusent de dérive autoritaire et de vouloir "islamiser" progressivement la société turque.

Sûr de son poids électoral dans le pays, le chef du gouvernement a balayé d'un revers de main toute allusion à un "printemps turc" . Et accusé des "extrémistes" ayant des "liens" avec l'étranger de manipuler la contestation.

Volontiers provocateur, M. Erdogan a même jugé, depuis Rabat cette fois, que la situation était "en train de revenir au calme". "A mon retour de cette visite (au Maghreb), les problèmes seront réglés", a-t-il lancé.

Signe de l'inquiétude des marchés financiers face à la persistance de la crise, la Bourse d'Istanbul a dégringolé de 10,47% lundi, comme la livre turque.

Hormis les deux personnes décédées dimanche et lundi, les violences des quatre derniers jours ont fait plus de 1.500 blessés à Istanbul et au moins 700 à Ankara, selon les organisations de défense des droits de l'Homme et les syndicats de médecins.

Ces chiffres n'ont pas été confirmés par les autorités. Le dernier bilan rendu public dimanche soir par le ministre de l'Intérieur Muammer Güler faisant état de 58 civils et 115 policiers blessés.

La brutalité de la répression, largement évoquée sur les réseaux sociaux turcs, a suscité de nombreuses critiques dans les pays occidentaux, notamment aux Etats-Unis, en France et au Royaume-Uni. Le secrétaire d'Etat américain John Kerry s'est une nouvelle fois inquiété lundi de l'usage "excessif" de la force par la police.

Source : AFP

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