Fraudes et prix peu lisibles: les opticiens dans le viseur de l'UFC-Que Choisir

  • Lunettes présentées sur une carte Vitale  d'assurance maladie
    Lunettes présentées sur une carte Vitale d'assurance maladie AFP/Archives - Denis Charlet
  • Des lunettes à la vente chez un opticien
    Des lunettes à la vente chez un opticien AFP/Archives - Philippe Huguen
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AFP

Prix peu lisibles, promotions généralisées, fraudes: une enquête de l'UFC-Que choisir révèle les pratiques "inquiétantes" des opticiens et dénonce leurs "liaisons dangereuses" avec les complémentaires, au moment où le gouvernement entend réguler les prix en plafonnant les remboursements.

"Il y a une double responsabilité des opticiens et des complémentaires, et les deux s'alimentent", a déclaré Alain Bazot, président de l'UFC-Que choisir, mardi lors d'une conférence de presse.

Il a précisé qu'avec un coût moyen de 470 euros, les lunettes sont, en France, parmi les plus chères d'Europe.

L'association a mené une enquête (www.quechoisir.org) auprès de 1.188 opticiens, soit 10,4% des magasins français, entre les 9 et 23 novembre 2013. Le "client mystère", disant vouloir s'équiper de verres simples, était chargé d'opter pour une monture d'un montant minimal de 140 euros.

Dans le même temps, sans rien solliciter, il devait communiquer à l'opticien la prise en charge maximum de sa complémentaire: 90 euros pour la monture et 390 euros pour les verres. Puis faire valoir que le reste à charge de la monture (soit 50 euros minimum) était trop élevé pour lui.

La première solution proposée par les opticiens est de s'orienter vers des montures moins chères (28% des cas). Mais près d'un magasin sur cinq (18%) suggère, de manière spontanée, "une fraude à la complémentaire santé": celle-ci consiste à modifier la facture en majorant artificiellement le prix des verres (pour parvenir au maximum de 390 euros) et en réduisant celui de la monture, à 90 euros.

Le coût de cette fraude est évalué par l'UFC Que Choisir à 142 millions d'euros par an pour le consommateur.

- Prix affichés sur les montures -

Autre constat: l'optique se caractérise par des offres promotionnelles "permanentes". Huit magasins sur dix en proposent, souvent sous la forme d'une paire de lunettes gratuite pour une achetée. Or, cette pratique a également "un coût" - répercuté sur le prix de la première paire - évalué à 120 millions d'euros par an pour le client qui perd "de vue le coût réel d'une paire de lunettes", selon l'UFC-Que Choisir.

L'association pointe également le manque de lisibilité des prix, affichés dans 93% des cas seulement sur les montures, donc peu accessibles.

Face aux cas de fraude, "nous demandons à la DGCCRF (direction de la répression des fraudes) de diligenter une enquête et de sanctionner", a déclaré le président Alain Bizot.

Dans un communiqué, le directeur général de Krys Group Pierre Champion a demandé à l'association de lui transmettre ses dossiers "afin de mettre un terme à ce procédé" qu'il dit condamner "fermement".

Ces pratiques entraînent aussi un surcroît de prestations de la part des complémentaires santé et donc une augmentation des cotisations versées par l'assuré (+38% entre 2006 et 2013). "En réalité, cette fraude inquiétante est révélatrice des liaisons dangereuses entre complémentaires santé et opticiens", a souligné Mathieu Escot, responsable adjoint des études.

Les complémentaires santé ont pris une part grandissante dans le remboursement des frais d'optique - de 56,8% en 2006 à 71,5% en 2012 - alors que celle de la Sécurité sociale est devenue marginale.

Ces organismes ont "proposé des garanties toujours plus élevées" et "contribué à déséquilibrer le marché de l'optique" en "solvabilisant la demande parfois au-delà du raisonnable", selon l'association.

En parallèle, le nombre de boutiques a augmenté de 47% entre 2000 et 2012 quand les besoins progressaient de seulement 13%. Conséquence, "les magasins vendent moins et la seule solution est de vendre très cher", explique M. Escot.

Pour tenter de remédier au problème, le gouvernement prépare un décret visant à plafonner les remboursements par les complémentaires, qui seraient limités à 450 euros (verres simples et monture) tous les deux ans, à partir de 2015.

Mais pour l'UFC-Que choisir, cette option n'est pas suffisante: "une fois les prix montés très haut, il est illusoire de croire que cela les fera baisser", estime M. Escot.

L'association plaide pour les réseaux de soins, qui permettent au consommateur de bénéficier de prix plus bas chez les opticiens conventionnés par sa complémentaire.

Source : AFP

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