Renseignement: le projet de loi présenté par Valls à l'Assemblée

  • Le Premier ministre Manuel Valls lors des questions au gouvernement le 8 avril 2015 à l'Assemblée nationale à Paris
    Le Premier ministre Manuel Valls lors des questions au gouvernement le 8 avril 2015 à l'Assemblée nationale à Paris AFP/Archives - Loic Venance
  • Hervé Morin le 20 janvier 2012 à Nantes
    Hervé Morin le 20 janvier 2012 à Nantes AFP/Archives - Frank Perry
  • Le député PS Jean-Jacques Urvoas le 29 janvier 2013 à l'Assemblée nationale à Paris Le député PS Jean-Jacques Urvoas le 29 janvier 2013 à l'Assemblée nationale à Paris
    Le député PS Jean-Jacques Urvoas le 29 janvier 2013 à l'Assemblée nationale à Paris AFP/Archives - Jacques Demarthon
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Centre Presse Aveyron

Les députés examinent à partir de lundi le projet de loi destiné à renforcer, tout en les encadrant, les services de renseignement avec des outils dénoncés par certains comme le passage d'une "surveillance ciblée" à une "surveillance de masse".

Signe de l'importance accordée à ce texte après les attentats de janvier, ce sera Manuel Valls lui-même qui viendra le présenter lundi après-midi dans l'hémicycle. Les débats s'achèveront jeudi mais le vote n'est prévu que le 5 mai après deux semaines de vacances parlementaires.

A l'origine de ce texte, décidé en juillet 2014, le constat, selon son rapporteur Jean-Jacques Urvoas (PS) que la France est "la seule démocratie occidentale" à ne pas avoir de cadre légal sur sa politique du renseignement, laissant ses agents opérer dans "des zones grises" à la merci de condamnations de la Cour européenne des droits de l'homme.

Le projet de loi définit donc les missions des différents services de renseignement (intérieur, extérieur, militaire, douanier...) qui vont de "la prévention du terrorisme" à "la défense et la promotion des intérêts économiques, industriels et scientifiques majeurs de la France". Il énumère ensuite les techniques (écoutes, géolocalisation, pose de micros, caméras ou de logiciel-espion, accès aux données de connexion, etc) pour surveiller la personne visée (voire son entourage) et leur régime d'autorisation (finalité, durée, conservation et destruction des données...) sous le contrôle d'une nouvelle autorité administrative indépendante.

Si l'adoption du texte, soutenu par l'UMP au nom de l'unité contre le terrorisme, ne fait aucun doute, le consensus sera néanmoins secoué par des députés de tous bords (comme l'UMP Lionel Tardy, l'écologiste Sergio Coronado, le PS Christian Paul ou de manière plus inattendue l'ancien ministre de la Défense UDI Hervé Morin) qui vont, par leurs amendements, relayer les craintes exprimées par la Cnil, des ONG, des syndicats de magistrats ou des acteurs du numérique sur les pouvoirs "exorbitants" donnés aux services.

Un point focalise en particulier leurs craintes: la mise en place sur les réseaux des opérateurs d'outils d'analyse automatique (un algorithme) pour détecter par une "succession suspecte de données de connexion" une "menace terroriste". C'est la principale mesure qui a été ajoutée au texte après les attentats de Paris.

- L'enjeu du contrôle -

Pour le Conseil national du numérique, cela "confine à une forme de surveillance de masse" qui a "démontré son extrême inefficacité aux Etats-Unis" en allusion aux pratiques de la NSA révélées par l'agent Edouard Snowden. La commission parlementaire spécialisée sur les questions numériques a demandé la suppression de cet article "qui ouvre la possibilité à une collecte massive de données".

Faux procès, selon le gouvernement pour qui on reste dans la "surveillance ciblée" puisque ce n'est que dans l'hypothèse où une menace terroriste serait détectée par ces algorithmes que l'anonymat sur ces données serait levé.

"Parler de surveillance généralisée est un mensonge !" s'emporte le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve dans Libération samedi.

M. Urvoas insiste de son côté sur les "garanties" apportées par la future Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR) qui pourra contrôler ces algorithmes et d'une manière générale aura "beaucoup plus de pouvoirs" que la CNCIS (Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité) qu'elle remplace.

Cette commission, dont la composition fait encore débat - à ce stade quatre magistrats, quatre parlementaires et un spécialiste des communications électroniques - devra donner son avis préalable à chaque mise en oeuvre de ces techniques sur le territoire national. Le Premier ministre pourra passer outre mais en motivant sa décision. Les députés ont limité en commission, contre l'avis du gouvernement, les cas d'urgence où elle ne sera informée qu'a posteriori.

Elle pourra aussi accéder aux renseignements collectés, à leur traçabilité et aux locaux où ils sont centralisés. Elle pourra enfin saisir le Conseil d'Etat.

Aux syndicats de magistrats qui estiment que la mise en oeuvre de ces techniques devrait relever du judiciaire, M. Urvoas rétorque que "la prévention des infractions est du ressort de la police administrative, la répression de la police judiciaire".

Le rapporteur a cependant déposé un amendement créant un statut de "lanceur d'alerte" au sein du renseignement pour permettre à un "Snowden français" de dénoncer auprès de la CNCTR l'utilisation de techniques illégales.

Source : AFP

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