Malgré l'émoi, les Serbes de Bosnie votent sur leur "fête nationale"

  • Le leader des Serbes de Bosnie  Milorad Dodikà la sortie du bureau de vote le 25 septembre 2016 à Laktasi
    Le leader des Serbes de Bosnie Milorad Dodikà la sortie du bureau de vote le 25 septembre 2016 à Laktasi AFP - ELVIS BARUKCIC
  • Le leader des Serbes de Bosnie  Milorad Dodik dépose son bulletin dans l'urne le 25 septembre 2016 à Laktasi
    Le leader des Serbes de Bosnie Milorad Dodik dépose son bulletin dans l'urne le 25 septembre 2016 à Laktasi AFP - ELVIS BARUKCIC
  • Arrivée d'un électeur dans un bureau de vote le 25 septembre 2016 à Laktasi pour un référendum sur la "fête nationale"
    Arrivée d'un électeur dans un bureau de vote le 25 septembre 2016 à Laktasi pour un référendum sur la "fête nationale" AFP - ELVIS BARUKCIC
  • Le leader politique des Serbes de Bosnie, Milorad Dodik, reçu par le président russe Vladimir Poutine le 22 septembre 2016 à Moscou
    Le leader politique des Serbes de Bosnie, Milorad Dodik, reçu par le président russe Vladimir Poutine le 22 septembre 2016 à Moscou SPUTNIK/AFP/Archives - Aleksey Nikolskyi
Publié le
Centre Presse Aveyron

Les Serbes de Bosnie ont voté dimanche pour décider s'ils continuaient de célébrer leur propre "fête nationale", un scrutin qui a porté un coup aux institutions de ce pays fragile et suscité l'émoi des musulmans bosniaques.

Malgré l'opposition de la communauté internationale, le turbulent leader politique des Serbes de Bosnie, Milorad Dodik a demandé aux 1,2 million d'électeurs de confirmer par référendum qu'ils veulent commémorer chaque 9 janvier la naissance de la "République du peuple serbe", trois mois avant la guerre qui avait fait 100.000 morts (1992-95).

Le vote s'est terminé à 17H00 GMT sans incident notable. Selon des chiffres communiqués deux heures avant, un peu plus d'un électeur sur deux avait voté à 15H00 GMT. Les résultats provisoires doivent être annoncés dans la soirée mais la large victoire du oui ne fait pas de doute.

"Je suis venu voter parce que chaque nation et chaque Etat a sa propre fête nationale. Ainsi, notre peuple serbe doit avoir sa fête", a expliqué Vojo Vujakovic, 60 ans, électeur de Laktasi, le village de Milorad Dodik, près de Banja Luka, la capitale des Serbes de Bosnie.

Ce sentiment illustre la fragilité de la Bosnie née des accords de Dayton qui ont mis fin à la guerre et dont la cohésion ne tient depuis que par la volonté de la communauté internationale: une fédération entre deux entités, une croato-musulmane et une serbe, réunies par des institutions de moins en moins respectées.

- L'autorité de Sarajevo bafouée -

Comme Vojo Vujakovic, de nombreux Serbes de Bosnie se reconnaissent comme appartenant au peuple serbe ou comme membres de la "Republika Srpska", pas comme citoyens de la Bosnie.

Le scrutin de dimanche est-il, comme le soupçonne le patron des bosniaques musulmans, Bakir Izetbegovic, un "ballon d'essai" pour Milorad Dodik et un premier pas vers une sécession?

Le parti du leader serbe prévoit un référendum d'indépendance en 2018. Et M. Dodik, parti à Moscou rencontrer Vladimir Poutine avant le scrutin, accuse régulièrement les Bosniaques et les autorités de Sarajevo de vouloir la fin de la "Republika Srpska".

Mais un responsable politique des Serbes de Bosnie, Mladen Ivanic, opposant à Milorad Dodik, a assuré qu'un tel référendum d'indépendance n'aurait pas lieu: "C'est de l'aventurisme auquel je ne participerai certainement pas."

- 'Il n'y aura pas de guerre' -

Bakir Izetbegovic avait provoqué la colère des Serbes de Bosnie en contestant la légalité de cette fête auprès de la Cour constitutionnelle.

"S'ils pouvaient, ils nous interdiraient tout", dit après avoir voté Radovan Bajic, 67 ans. Mais "nous devons aussi avoir nos fêtes. Si la Republika Srpska a été créée ce jour-là, on ne peut pas changer ça et dire que c'était le 1er décembre."

Dimanche, Bakir Izetbegovic s'est employé à apaiser les tensions: "Il n'y aura pas de guerre et personne ne détruira la Republika Srpska. Nous allons prendre soin de ce pays, de l'accord de paix de Dayton et tous les citoyens, Serbes, Croates et Bosniaques."

"Le référendum va passer et la Bosnie-Herzégovine va rester", avait-il déjà relativisé samedi soir.

La date du 9 janvier pour cette "fête nationale" est sensible: parmi les fondateurs de la "République du peuple serbe", figure Radovan Karadzic, théoricien de l'épuration ethnique, condamné à 40 ans de prison pour génocide et crimes contre l'humanité.

Milorad Dodik devait d'ailleurs aller fêter dimanche soir la propable victoire du oui par un meeting à Pale, l'ancien fief de Karadzic.

En début de soirée, les voitures se dirigeant vers cette ville étaient contrôlées par des policiers armés de kalachnikov.

Une fois le vote passé, la tension retombera-t-elle? Pour le haut représentant de la communauté internationale, Valentin Inzko, ce scrutin "inutile", qui n'aura "pas de conséquences juridiques", a provoqué "beaucoup de tensions". "Mais il n'y aura pas de guerre", a-t-il également dit.

Pour beaucoup, la détermination de Milorad Dodik, qui avait reculé dans des circonstances similaires par le passé, trahit des préoccupations électoralistes de court terme: contesté politiquement, il a en tête les municipales de la semaine prochaine. Une fois passées, la tension pourrait aussi retomber.

Source : AFP

Voir les commentaires
Réagir
Vous avez droit à 3 commentaires par jour. Pour contribuer en illimité, abonnez vous. S'abonner

Souhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?