Épidémie de streptocoque A : après le Covid-19, l’Europe doit-elle s’inquiéter de la hausse au Japon des infections à la bactérie "mangeuse de chair" ?

  • Des personnes portant des masques, le 23 mars 2024 à Tokyo.
    Des personnes portant des masques, le 23 mars 2024 à Tokyo. MaxPPP
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Hervé Garric avec Destination Santé

Depuis 2023, le Japon, dont plusieurs départements passent en alerte rouge, connaît une forte hausse du nombre de décès causés par des infections au streptocoque A. Quelques années après la pandémie du Covid-19, l’Europe doit-elle s’inquiéter ?

Le syndrome du choc toxique streptococcique (SCTS) est le plus souvent causé par le streptocoque A, surnommé "bactérie mangeuse de chair". Depuis le 1er janvier 2024, le Japon recense une flambée de la maladie avec 517 cas. Un chiffre qui inquiète les autorités sanitaires alors que le SCTS est mortel dans au moins 30 % des cas.

517 cas entre le 1er janvier et le 17 mars 2024, selon le Japan Times. Le Japon s’inquiète de l’explosion des cas de syndrome de choc toxique streptococcique alors que 941 cas avaient été enregistrés sur l’ensemble de l’année 2023, déjà une année record. Cette même année, le SCTS avait causé la mort de 30 % des individus infectés soit "un taux de mortalité extrêmement élevé", selon le gouvernement métropolitain de Tokyo.

Une conséquence de la pandémie de Covid-19 ?

L’inquiétude s’installe en Asie, à tel point, que le jeudi 21 mars 2024, Pyongyang, avait fait savoir que la Corée du Nord s’opposait à la rencontre face Japon dans le cadre des tours qualificatifs pour la Coupe du monde 2026 de football.

Cette hausse serait une conséquence de la pandémie de Covid-19, durant laquelle les infections liées à la bactérie streptocoque ont grandement diminué, en raison du renforcement des gestes barrières.

"La population est moins immunisée, c’est le concept de dette immunitaire, donc il y a eu une recirculation et donc un rebond épidémique" décrypte pour Marianne Asmaa Tazi, bactériologue, qui dirige le Centre national de référence des streptocoques.

Le streptocoque A en cause

Le SCTS est le plus souvent causé par angine et l’impétigo dans 80 % des cas, il est, plus rarement, responsables d’infections invasives.

Le SGA est notamment à l’origine d’infections invasives gravissimes et souvent mortelles :

  • Les fasciites ou dermohypodermites nécrosantes : il s’agit "d’une destruction complète des tissus mous d’où son surnom de "bactérie mangeuse de chair", rappelle Santé publique France ;
  • Le syndrome du choc toxique streptococcique (SCTS) à l’origine de la défaillance de multiples organes ;
  • La méningite, soit l’inflammation des membranes entourant le cerveau.

Parmi les infections invasives liées au SGA on retrouve également l’endocardite ou encore la septicémie.

Des infections invasives souvent mortelles

Selon les chiffres de Santé publique France, l’infection invasive causée par S. pyogenes est mortelle dans 50 % des cas de méningites, 40 % des cas de SCTS, 20 à 45 % des cas de dermohypodermies nécrosantes. "À haut potentiel épidémique, S. pyogenes se transmet par voie aérienne (gouttelettes, ndlr) ou contacts directs dans l’entourage des patients", note Santé publique France. Selon le Japan Times, la transmission peut également survenir via des blessures, aux mains notamment. Le diagnostic des infections invasives repose sur la mise en évidence de la bactérie stérile.

Les autorités nipponnes exhortent la population à rapidement consulter en cas de douleurs, gonflement des membres ou une fièvre. Le traitement repose sur la prise d’antibiotiques. Toutefois, l’Institut Pasteur indique une augmentation de la résistance du S. pyogenes à plusieurs familles d’antibiotiques.

Hausse des cas en Europe

En 2021, l’Institut Pasteur soulignait "une recrudescence réelle des infections invasives à streptocoque A dans les pays industrialisés et notamment en Europe. En France, ces infections invasives sont en augmentation depuis 2000, le taux d’incidence ayant augmenté de 1,2 à 3,3 pour 100 000 habitants".

En 2022 notamment, plusieurs pays européens dont la France, l’Irlande, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et la Suède avaient enregistré une augmentation du nombre de cas d’infections invasives à streptocoque du groupe A chez les enfants de moins de 10 ans. "En France et au Royaume-Uni, le nombre de cas d’infections invasives à SGA observés chez les enfants est plusieurs fois supérieur aux niveaux enregistrés avant la pandémie pour la période équivalente" notait alors l’Organisation mondiale de la Santé.

Pas de vaccin contre le streptocoque A

Il n’existe pas de vaccin contre le streptocoque A et le traitement antibiotique n’est parfois pas suffisant pour contrer l’infection.

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