Clémentine Saintoul Colombres ou l’art de sensibiliser son public

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  • Pour Clémentine Saintoul Colombres "le théâtre c’est l’histoire du monde " Pour Clémentine Saintoul Colombres "le théâtre c’est l’histoire du monde "
    Pour Clémentine Saintoul Colombres "le théâtre c’est l’histoire du monde " Eric Guillot
  • "Serpent". Lors de la préparation du spectacle muet et musical "La grande parade".
    "Serpent". Lors de la préparation du spectacle muet et musical "La grande parade". Jean-Pierre Cousin
  • "Lonesome Bric", un duo théâtral qui se déroule dans une ambiance de western. La comédienne joue en compagnie de Felix Cantero.
    "Lonesome Bric", un duo théâtral qui se déroule dans une ambiance de western. La comédienne joue en compagnie de Felix Cantero. Jean-Pierre Cousin
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Eric Guillot

Née en Équateur, elle grandit en Aveyron avant de rejoindre Paris. Elle monte sur les planches à 15 ans pour ne plus jamais en descendre, développant une carrière de comédienne, chanteuse, metteuse en scène, formatrice en théâtre et directrice artistique de la compagnie La Mezcla, à Rieupeyroux.

Très souvent, quand une femme se produit sur scène, elle ne fait pas seulement que chanter, ni interpréter une œuvre classique ou contemporaine. Non, elle se bat. Pour elle. Pour les autres aussi. Pour sensibiliser. C’est exactement ce que fait la comédienne et metteuse en scène, Clémentine Saintoul Colombres. Elle a envie de dire des choses. Alors, elle monte sur scène. L’espace public lui est précieux. Prendre la parole lui est nécessaire, vital. Parler vaille que vaille de cette quête de la lumière et de l’ombre. C’est sa vie. Ses spectacles sont toujours des défis.

Sensible aux mots, c’est tout naturellement qu’elle se dirige sur les planches. "Parce que le théâtre, c’est comprendre l’être humain : le corps, l’esprit, l’émotion. Comment l’ensemble peut créer une harmonie ? Qu’est-ce qui en découle ?" s’interroge t‘elle. "Tous les personnages que je crée et tous les spectacles ont en commun cette quête d’évolution, ce rapprochement vers l’autre. Aller dans le cœur du conflit en essayant de doser les mots. Quelle est la parole que je peux dire pour apporter une clé, pour guérir telle chose ? Affirmer cette ouverture à l’autre est comme une profession de foi pour l’artiste" déclare-t-elle.

C’est à dessein de ce questionnement "D’où je viens ?" que la comédienne une fois sur scène atteint aisément son but. Bien évidemment, toutes ces questions ne restent pas sans réponses, car "toucher le public en profondeur, c’est faire tomber les barrières." Les préjugés aussi.

Née à Quito, en Équateur, Clémentine a passé sa jeunesse à La Salvetat-Peyralès, dans la maison familiale ou était originaire son grand-père maternel. Après l’école primaire du village ségalis, elle est admise dans un collège parisien, où ses études se poursuivront dans divers établissements de la capitale, dont La Sorbonne, avant d’intégrer l’école de théâtre et suivre des cours au Conservatoire.

Par la suite, la metteuse en scène va devenir actrice de cinéma pour un court-métrage El puente, (Le pont). Une histoire sur fond de dictature : Diego appartient à la milice, Maria, elle, est dans la résistance révolutionnaire et reste sans nouvelle de son frère disparu mystérieusement. Le monde respectif des deux protagonistes qui se côtoient tous les jours est situé de chaque côté d’un fleuve. Ce film tourné sur le canal Saint-Martin, à Paris a été présenté, hors concours, au Festival de Cannes.

Naissance de La Mezcla

En 2012, Clémentine Saintoul Colombres fait le choix de quitter la ville aux cent villages pour s’installer en Aveyron, ce qui conduira très vite l’artiste à créer sa propre compagnie de théâtre La Mezcla, basée à Rieupeyroux, qu’elle dirige depuis 2013.

Voilà onze ans que la jeune femme gère les projets artistiques de ses créations et mène de front la direction théâtrale, conduisant parallèlement des ateliers, des stages pour adultes, ados et enfants, en lien avec des associations ou le Département. "Le théâtre c’est l’histoire du monde. Ma double culture m’a rendue sensible à la question du point de vue, aux nombreuses différences et mixités. C’est pour cela que j’aime le théâtre, c’est un lieu d’accueil fondamental, où je peux mettre en scène la diversité des possibles avec un maximum de subtilités dans les dialogues" explique la metteuse en scène qui justifie ainsi le nom donné à sa compagnie de théâtre, La Mezcla, dont l’objectif est de construire des ponts d’échanges culturels et socioculturels.

Les activités de la comédienne s’étendent également au monde de la musique.

Tout récemment, elle interpréta, accompagnée de Karim Kanal à la guitare, plusieurs titres du répertoire populaire latino-américain. Ce spectacle-concert Luz de luna est un voyage musical et historique qui évoque la période coloniale des Espagnols en Amérique latine. La chanteuse s’est produite sur scène le 8 mars dernier à Arvieu. "Se plonger dans l’histoire permet d’éclairer le présent" assure-t-elle.

De nouvelles programmations sont en cours et des projets de pièces de théâtre sont en ébullition, notamment Antigone Renaissance, déjà présentée il y a deux ans, qui sera jouée prochainement dans une version longue, sous forme de monologue avec la participation du public. La mise en scène tout comme le chant et le cinéma sont inextricablement liés dans son parcours artistique.

L’exaltation des sentiments que Clémentine Saintoul Colombres transmet au public, grâce à ces moyens d’expression, témoigne de sa réelle capacité d’émouvoir. Comme une renaissance. Mais par son nom infiniment romanesque et à connotation spirituelle, n’est-ce pas aussi par lequel sont traités les grands thèmes humains de notre civilisation ?

L’histoire d’un parcours féminin

Désireuse d’exprimer un univers en paroles et en actions, Clémentine Saintoul Colombres publie son premier récit La voyageuse. Éditée en 2019, aux éditions L’Harmattan, dans la collection Théâtres, cette pièce est avant tout l’histoire d’un parcours féminin où une petite fille veut quitter son pays pour vivre en Europe. Alors Lisa, 12 ans, rêve de voyager pour échapper à ses ennuis et choisir sa propre vie.

Dix ans plus tard, le capitaine Billy, un contrebandier sans scrupule, la cache dans la soute de son bateau, comme une vulgaire marchandise et l’emmène à Paris. Il la vend à Marlène, "la ménagère en mal de frites", une propriétaire qui s’enrichit grâce aux talents culinaires des immigrées qu’elle achète. "Vous débarquez par centaines avec vos radeaux, vous attendez quoi ? Le père Noël ? Désolée de te l’apprendre, il n’existe pas…" Mais un jour, Suzanne, la voisine apparaît sous les traits d’une baronne, bien déterminée à aider la jeune fille. Ce drame qui décrit la triste réalité des migrants dans notre monde contemporain met en lumière la relation de domination entre les individus qui se manifeste par l’arrogance, le mépris, l’humiliation, le pouvoir, l’argent et toutes sortes de dérives qui peuvent conduire à l’inévitable, à la tragédie, Pourtant, l’héroïne représente l’espoir de sa famille où l’amour et la justice tentent tant bien que mal de s‘imposer. Lisa est un personnage attachant qui souhaite s’échapper d’une situation précaire. Pour elle, pour sa mère d’abord. Cela lui donne la force de se battre, de faire face…

Ce texte a été créé en lecture au Théâtre 13, à Paris, en janvier 2017, dans le cadre des Mardis midi, organisés par les Écrivains du théâtre associés (EAT), puis en ouverture du festival Les inédits de Cahors, en mars de la même année, dans une mise en scène des compagnies Les Voix du caméléon et L’Échappée belle. Enfin, il a été créé sous forme de jeu par la compagnie La Mezcla, en mars 2018, au centre culturel ASV, à Rieupeyroux, dans une mise en scène de l’auteure. Cette création a reçu le prix Talents de l’Aveyron 2018, remis par le Conseil départemental. Sans aucun doute, et d’ici peu, La voyageuse deviendra une réalisation cinématographique.

L’agenda de ses prochains spectacles au mois de mai et juin, à Espalion et Albi

Dimanche 12 mai, l’artiste organisera un stage théâtre pour les adultes sur le thème Rythmes et voix. "Chaque parole, chaque émotion possède son propre rythme. Jouer juste, c’est savoir recréer la juste partition" explique Clémentine. Cet événement se déroulera à Albi, dans les locaux du centre artistique de l’Association des jeunes danseurs de rue (AJDR) Factory (18, rue Lavazière), à partir de 19 heures.
La journée du vendredi 7 juin sera un événement régional avec Du bruit dans ma bibliothèque, autour de la thématique Un auteur et une librairie par département. La comédienne a été sélectionnée pour représenter l’Aveyron à Espalion avec lecture musicale autour de ses textes. Elle sera accompagnée par Francis Estèves Cisco.
Toujours en juin sera présentée une double création, réalisée avec les participants de ses ateliers du théâtre d’Albi. Tout d’abord, un texte de jeunesse créé par la metteuse en scène, intitulé "Nour, la tisseuse de toiles", ou l’histoire de celle qui a ressuscité les étoiles. Le deuxième texte tout public également écrit par Clémentine Saintoul Colombres fait suite à des improvisations avec deux groupes de comédiens (adultes et ados). Intitulée "Lumière !" cette pièce raconte l’histoire de la planète Luminox qui perd mystérieusement contact avec sa source d’énergie. Chaque jour, des pannes se produisent et se multiplient : pannes d’électricité, de cœur, d’intelligence, plongeant ses habitants dans un quotidien tragi-comique de plus en plus absurde…
Rendez-vous au théâtre de l’Athanor-Scène nationale d’Albi, le dimanche 30 juin, à partir de 19 heures.

Pour contacter l’artiste : mezcla.lamezcla@gmail.com/ ou sur Facebook LA MEZCLA.

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