Mondial-2014: Graffitis à Rio, le foot roi et paroi

  • Un immense graffiti représentant la mascotte de la Coupe du monde, près de la station de métro de Maracana à Rio de Janeiro, le 8 avril 2014
    Un immense graffiti représentant la mascotte de la Coupe du monde, près de la station de métro de Maracana à Rio de Janeiro, le 8 avril 2014 AFP/Archives
  • Un mur couvert de graffiti représentant la star brésilienne Neymar da Silva Junior tirant à l'arme à feu, à Rio de Janeiro, le 8 avril 2014
    Un mur couvert de graffiti représentant la star brésilienne Neymar da Silva Junior tirant à l'arme à feu, à Rio de Janeiro, le 8 avril 2014 AFP/Archives
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AFP

A Rio de Janeiro, la Coupe du monde se joue aussi sur les murs, un match à coups de bombes de peinture entre les artistes qui défendent le Mondial au pays du "futebol" et ceux qui l'attaquent frontalement.

Côté pile: Ronaldo coiffé de sa fameuse coupe "pubis" vole, pour fêter son doublé en finale du Mondial-2002, sur un mur du quartier bourgeois de Laranjeiras. Une autre fresque commémore le premier des cinq sacres brésiliens, en Suède (1958), sur la colline de Santa Tereza.

Revers de la médaille, côté face: la mascotte du Mondial-2014 viole une allégorie de la Justice, femme nue aux yeux bandés, près du mythique Maracana. A côté du tatou Fuleco, ce message: "Combien d'expropriations une Coupe provoque-t-elle?" Ailleurs sur une palissade, la mascotte fume du crack, et on lit sur son T-shirt: "Après la Coupe"...

Entre les deux, des oeuvres parfois plus énigmatiques, comme ces collages montrant Neymar et Ribéry couronnés avec la mention "Poème de France". Le Brésilien se présente la fleur au fusil, littéralement. Le visage de Ribéry s'imbrique dans le coq stylisé du blason de la Fédération française (FFF), la crête rouge initiant sa longue cicatrice faciale.

Retour côté pile, un autre mur proche du Maracana honore certaines gloires de l'équipe nationale, de Zagallo à Romario en passant bien sûr par Pelé. A Botafogo, une galerie des grandes figures du club du même nom, à la peinture noire au pochoir, les Garrincha, Jairzinho, Loco Abreu etc.

- Cocktail Molotov -

Côté face, à Botafogo toujours, la nuit. Des dizaines de bombes éparpillées jonchent le trottoir. Visage masqué, deux graffeurs vont faire parler l'enceinte extérieure d'une université. Devant le message "le $ seulement pour la répression", un énorme "COPA?" s'étale bientôt, une tête horrifiée dans le O et un cocktail Molotov adossé au C.

"On met un cocktail Molotov non pas pour inciter à la violence, mais parce que c'est un symbole, pour inciter à la protestation, explique un des auteurs, "Fiuz", à l'AFP. Tout va de travers dans cette Coupe du monde avec les travaux, la surfacturation, la corruption."

"On parle de fête populaire mais en fait, ça concerne surtout la bourgeoisie, enchaîne son complice "Peq1". On est contre la Coupe du monde parce que la Fifa est venue imposer ses normes au Brésil qui manque de services publics dignes. Les gens meurent dans les hôpitaux, et l'éducation, c'est de la blague!"

Ces deux étudiants en design reprennent ainsi les thèmes des manifestations anti-Mondial, qui ont suivi, avec beaucoup moins d'ampleur, le mouvement monstre de juin dernier pendant la Coupe des Confédérations au Brésil, contre les investissements de l'Etat dans les stades et pour de meilleurs services publics.

"Fiuz" et "Peq1", représentants d'une mouvance anarchiste ou d'extrême gauche répandue dans le milieu underground des graffeurs, font aussi dire à un personnage furieux sur un mur du quartier bohème de Lapa: "La Coupe pour qui?!"

- Barbouillage et trahison -

Eh bien pile pour Jambeiro, par exemple. Ce peintre de 44 ans officiera pour une télévision étrangère pendant le Mondial, car il vit de son pinceau. Il célèbre Rio, son Carnaval et son "futebol" sur des tableaux. "Mais je préfère peindre sur les murs, parce que je m'exprime plus, je suis moins limité par le cadre", confie-t-il à l'AFP.

Une ruelle de Lapa présente plusieurs de ses oeuvres. Par exemple, souvenir de juin 2013, le Maracana entouré de joyeux manifestants portant le maillot de la Seleçao et des pancartes revendicatrices, avec Neymar sur le terrain prêt à taper dans le ballon figuré par la tête de... Sepp Blatter, le président de la Fifa.

"Je ne suis pas contre la Coupe du monde, au contraire, mais j'étais dans les manifestations, et c'est ma manière de dire qu'on veut du foot mais aussi de la santé et de l'éducation", souligne Jambeiro, qui se distingue des "barbouilleurs" et "des rebelles qui sont toujours contre tout".

A l'affût du clin d'oeil humoristique, il a représenté dans la même ruelle le train du Mondial-2010 derrière lequel courent ceux qui ont été recalés par Dunga, sélectionneur du Brésil d'alors: Ganso, Neymar, Ronaldo, Ronaldinho et Adriano. Le Mondial-2014 vu par Jambeiro devrait montrer "l'incroyable Hulk en train de tirer le convoi" !

"Il n'y a pas de raison pour célébrer la Coupe du monde cette année, juge à distance "Peq1". Je trouve que c'est un peu trahir l'idéal révolutionnaire qui est né au Brésil en 2013".

Tout dépend de quel côté du mur on se place.

Source : AFP

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