Les assignations à résidence jugées conformes à la Constitution

  • Le siège du Conseil constitutionel à Paris, le 21 février 2012
    Le siège du Conseil constitutionel à Paris, le 21 février 2012 AFP/Archives - THOMAS SAMSON
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Centre Presse Aveyron

Le Conseil constitutionnel a jugé mardi que la loi réglementant les assignations à résidence dans le cadre de l'état d'urgence, décrété après les attentats du 13 novembre, était conforme à la Constitution, au grand dam de défenseurs des libertés publiques.

"Le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution les neuf premiers alinéas de l'article 6 de la loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence", a-t-il annoncé dans un communiqué.

Les articles de cette loi - révisée une semaine après les attentats jihadistes qui ont fait 130 morts - portant sur les assignations à résidence étaient contestés par les avocats de l'un des sept militants écologistes assignés à résidence pendant la conférence sur le climat COP21 qui avaient contesté en vain leur assignation devant le Conseil d'État.

Il avait déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), jugeant le texte contraire "à la liberté constitutionnelle d'aller et de venir". Les militants étaient en effet tenus de pointer trois fois par jour au commissariat et de rester chez eux la nuit.

Cette décision était très attendue par le gouvernement, qui doit présenter mercredi son projet de réforme constitutionnelle prévoyant l'inscription dans la loi fondamentale de l'état d'urgence. Mais aussi par la centaine d'organisations qui en ont dénoncé "les dérives possibles".

Mardi sur France 2, le Défenseur des droits Jacques Toubon a aussi pointé "un certain nombre de dérives" engendrées par l'état d'urgence: "les mesures qui ont été prises, perquisitions administratives, assignations à résidence, ont été prises un peu larges", a-t-il affirmé.

A l'audience la semaine dernière, le représentant du gouvernement avait justifié le texte incriminé, affirmant que les autorités devaient faire face "non seulement au péril imminent" du risque terroriste, "mais aussi à tout trouble à l'ordre public susceptible d'agrandir les menaces".

- "Blanc-seing constitutionnel"-

La décision des "Sages" est "un blanc-seing constitutionnel donné aujourd'hui au gouvernement", a regretté auprès de l'AFP Me Patrice Spinosi, avocat de la Ligue des droits de l'Homme (LDH).

"Pour autant, cela ne préjuge pas de la conformité à la Constitution des autres mesures de l'état d'urgence pour lesquelles nous avons déjà déposé des QPC qui seront examinées prochainement", a ajouté l'avocat, citant "perquisitions et interdictions de réunion", également de plus en plus critiquées.

"Ce n'est pas pour moi une bonne décision mais le Conseil constitutionnel a adressé malgré tout un message au législateur en précisant que l'état d'urgence se devait d'être limité dans le temps pour que ces mesures soient considérées comme proportionnées", a estimé Me Alexandre Faro.

Les avocats ont annoncé à l'AFP qu'ils saisiraient la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).

Les "Sages" ont totalement validé l'article 6 de la loi, qui stipule que "le ministre de l'Intérieur peut prononcer l'assignation à résidence de toute personne (...) à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre public", à l'exception du dixième alinéa, consacré au port de bracelet électronique, qui n'était pas visé par les requérants.

Ils ont jugé que "ces dispositions ne comportent pas de privation de la liberté individuelle au sens de l'article 66 de la Constitution" sur les compétences de l'autorité judiciaire et la détention arbitraire.

Ils ont également considéré qu'elles ne portaient pas "une atteinte disproportionnée" à "la liberté d'aller et de venir", en se référant notamment au contrôle par le juge administratif.

Le Conseil constitutionnel ne s'est penché qu'une seule fois sur la loi fondant l'état d'urgence, en 1985, sur fond de crise en Nouvelle-Calédonie. Mais il n'avait toutefois pas examiné au fond la conformité de ce régime avec les valeurs suprêmes du droit français.

Dans leur texte, les "Sages" saisissent cette occasion pour souligner que "la Constitution n'exclut pas la possibilité pour le législateur de prévoir un régime d'état d'urgence".

Source : AFP

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