Tarn : un whisky « Made in France » sauve un distillateur de l’obsolescence

  • Sous l’impulsion de la famille Castan installée à Villeneuve-sur-Vère, près d’Albi, le vieil alambic de « Papy Gilbert » distille dorénavant du whisky.
    Sous l’impulsion de la famille Castan installée à Villeneuve-sur-Vère, près d’Albi, le vieil alambic de « Papy Gilbert » distille dorénavant du whisky. AFP
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Centre Presse Aveyron

Tradition. Le dernier alambic ambulant du Tarn, quasi centenaire, semblait condamné par la désaffection pour les eaux-de-vie traditionnelles, mais il est maintenant sauvé par le projet un peu fou de faire un whisky « Made in Tarn ».

 

Au milieu des champs de céréales et des vignes, l’alambic en cuivre de « Papy Gilbert » crache toujours ses volutes de vapeur et, ce, depuis 1929. Dans sa jeunesse, le bouilleur de cru ambulant battait la campagne, distillant fruits et raisins.
« La tradition voulait qu’après chaque repas familial, on ouvre le placard à eaux-de-vie et marcs. Et les invités choisissaient », se souvient Céline Castan, épouse du propriétaire héritier de la distillerie. « Mais les alcools blancs ne sont plus à la mode. Les jeunes ne boivent plus de digestifs. À partir de 2009, nos ventes d’alcools blancs reculaient de 5 à 10 % par an. Mais en revanche, les Français prennent toujours un apéritif et souvent du whisky », explique Mme Castan.

Les Français grands amateurs de whisky

Les Français sont le troisième consommateur au monde de whiskies (en volume), devant même les Britanniques mais derrière les Américains et les Indiens (premiers), selon des chiffres de 2013.
Surfant sur la tendance, l’Hexagone n’a pas tardé à produire son propre whisky à la fin des années 90. Aujourd’hui, on compte une vingtaine de whiskies français dont certains ne sont en fait que vieillis dans l’Hexagone, après avoir été distillés à l’étranger.
« On parle du Made in France partout. Les Français reviennent aux produits français », souligne Sébastien Castan, l’héritier propriétaire. « Alors on s’est dit : “pourquoi pas nous ?”», renchérit son épouse, qui a abandonné un travail de bureau pour rejoindre l’exploitation. Les Castan abandonnent donc la distillation ambulatoire pour se lancer dans un produit qu’ils ne connaissent pas du tout.

Bientôt l’export

La petite entreprise importe du malt (céréale germée) de Belgique car le climat du Sud-Ouest n’est pas propice à une céréale propre à faire du whisky. Mais le reste est entièrement fabriqué sur place : le moût (malt brassé) est fait avec l’eau d’un forage creusé à 115 m sous la distillerie même, avant de passer par l’alambic à colonne.
Ce type d’alambic, normalement utilisé pour les alcools de fruits mais rarement pour le whisky, donne sa douceur à la production Castan, explique le propriétaire, le nez dans un verre de dégustation où repose un fond d’or jaune pâle.
Un an à un an et demi de maturation en fûts de chêne neufs, puis environ autant en tonneaux ayant accueilli du vin blanc et le « Single Cask Pure Malt » est prêt à être consommé sous l’étiquette « Villanova », traduction en occitan de Villeneuve-sur-Vère, nom de la commune qui abrite la distillerie, près d’Albi.

Les 1 000 premières bouteilles, commercialisées en avril 2013, sont toutes réservées, avant même leur sortie des fûts.
Fort de ce succès, l’alambic de « papy Gilbert », dont les effluves de moût d’orge ont remplacé celles de coings et de cerise, s’apprête à décupler ses efforts : en 2015, la production doublera, avant de tripler d’ici à 2018, pour atteindre « 15 000 à 20 000 bouteilles » contre 6 000 environ aujourd’hui, explique M. Castan. Et la petite distillerie va bientôt exporter : « des Belges, des Américains, des Allemands sont intéressés », affirme son épouse.

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