Anne-Lise Rousset, en toute liberté

  • Anne-Lise Rousset a « toujours privilégié le dépassement de soi, le plaisir ».
    Anne-Lise Rousset a « toujours privilégié le dépassement de soi, le plaisir ». Reproduction Centre Presse
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Maxime Raynaud

Course à pied. En quelques années à peine, la vétérinaire cantalienne, installée en Aveyron, est devenue l’une des références du trail. Tout en restant atypique, sans le moindre esprit de compétition.

Elle a d’abord été surprise. Qu’on s’intéresse à elle. Mais elle a accepté de parler. D’elle évidemment. De sa voix douce, emmitouflée dans sa doudoune, Anne-Lise Rousset s’est un peu forcée, il faut bien l’avouer. Car la lumière, la traileuse la préfère sur les versants escarpés ou, à la rigueur, à la frontale pour éclairer ces chemins qu’elle a toujours aimés.

Problème pour la Cantalienne, elle est devenue en quelques courses, une des révélations de sa discipline. Transvulcania, CCC Mont-Blanc, Trail du Sancy le week-end dernier, elle est arrivée telle une comète sur le circuit. Sans vraiment prêter attention aux regards sur sa performance ou aux louanges.

Minimaliste et solitaire

Elle court, Anne-Lise Rousset, et c’est bien tout ce qui lui importe. «Parfois, elle se sent comme Anton Kuprika, dans le côté minimaliste, solitaire, partir sans rien, juste pour le plaisir de la montagne», illustre son compagnon et entraîneur, Adrien Séguret. Lui-même traileur de haut niveau, il a vu dans le récent reportage de L’Équipe Explore sur l’ultra-trailer américain barbu et torse nu, de nombreux points communs avec sa douce. Au premier rang desquels l’amour de la nature, cette essence partagée par les forçats de la course pédestre, capables d’avaler plus de 100 km, au bout d’eux-mêmes, sans en oublier les paysages.

«Elle gagne une course et, à l’arrivée, ne vous parle que de la beauté de la nature !», décrit encore Séguret. «À 12 ans, j’ai eu mon premier cheval et je partais seule, se souvient Anne-Lise Rousset, 26 ans et une jeunesse passée à Ruynes-en-Margeride, près de Saint-Flour, dans une famille pas vraiment portée sur le sport mais plutôt sur la pêche, la chasse. Ça m’a appris à me débrouiller, à être autonome dans la “pampa”».

Quitte à refuser l’équipe de France

Anne-Lise Rousset y a sûrement aussi puisé sa vocation: vétérinaire. Une profession qu’elle occupe aujourd’hui à la clinique des Moutiers, à Rodez. La flore, donc, et la faune. «C’est peut-être lié», sourit-elle. Son nouveau challenge: joindre sa passion à l’exigence de son métier, pas toujours le meilleur allié lorsque l’on s’entraîne au minimum 6 fois par semaine. «Entre les gardes et les courses, parfois je ne dors pas vraiment, je vis à 1000 km/h. Mais il y a ce côté défi, le fait de se dire que c’est conciliable. Je suis têtue donc je veux y arriver mais c’est difficile», reconnaît-elle, consciente d’en être à un point où la course est vitale, jusqu’à évoquer une «addiction».

Sponsorisée comme son compagnon par la marque auvergnate d’hydratation sportive Oxsitis, Anne-Lise Rousset a changé d’envergure. Elle est devenue une tête d’affiche du trail. Bien malgré elle. «C’est un peu bizarre, glisse-t-elle un brin gênée. Mais ça ne me met pas de pression. Je n’ai pas l’esprit compétition. Je ne l’ai jamais eu. Je fais des courses parce que c’est magique, que ça me permet de découvrir des endroits fantastiques. J’ai toujours privilégié le dépassement de soi, le plaisir.» L’équipe de France, venue la solliciter, s’y est d’ailleurs cassé les dents. Sa liberté, Anne-Lise Rousset y tient plus que tout. «C’était après la CCC, j’étais très fatiguée et je n’ai pas pu m’aligner. Puis, j’ai eu peur que ça m’impose des choses. Et ce n’est pas un Graal, un but pour moi ce maillot».

Séguret : «Comme les Kenyans, elle vole»

Un temps entraîneur de plusieurs sportifs aveyronnais, dont le très prometteur cycliste Étienne Fabre, Adrien Séguret n’est pas vraiment étonné de la progression de la Cantalienne qu’il avait contactée il y a six ans, lors d’un raid, après avoir été subjugué par sa facilité. «Si elle allège son emploi du temps, elle peut devenir une extraterrestre. C’est une des plus douées en France. Elle a des capacités physiques au-dessus et une telle foulée naturelle, sur la pointe des pieds. Comme les Kenyans, elle vole.» Elle court et elle vole, Anne-Lise Rousset. Seule, quitte à passer pour une «sauvage». Elle s’en moque. Elle veut juste «être tranquille». Et courir. Dans la lumière naturelle. La seule qui lui importe.

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