Mort d'Emile : comme dans les affaires Lelandais et de la petite Maëlys, voici pourquoi les experts sont face à un défi

Publié le , mis à jour
François Barrère

L’examen des restes de l’enfant, qui ont séjourné plusieurs mois en forêt, comme ceux de la petite Maëlys et du caporal Arthur Noyer, risque de ne pas pouvoir expliquer le drame.

La découverte d’ossements appartenant au petit Émile Soleil, deux ans et demi, retrouvés le 30 mars 2024 à proximité du hameau du Haut-Vernet (Alpes-de-Haute-Provence), près de neuf mois après sa disparition, le 8 juillet 2023, va-t-elle expliquer les circonstances de la mort du petit garçon ?

Difficile de répondre pour l’instant, même si pour la famille et pour les enquêteurs, la certitude que l’enfant est décédé et celle que son corps était à proximité immédiate du lieu de sa disparition sont des éléments cruciaux : cela permet d’éliminer l’hypothèse d’un rapt et d’une séquestration perdurant depuis l’été dernier.

Alors que le communiqué du procureur de la République d’Aix évoque de façon imprécise la découverte "d’ossements", on sait qu’au moins le crâne de l’enfant a été retrouvé. "Nous n’avons pas l’ensemble de son squelette", a confirmé la porte-parole de la gendarmerie. Ses vêtements (un tee-shirt jaune, un short blanc à motifs vert et des chaussures de randonnée) semblent également manquants.

Dans l’affaire Nordahl Lelandais, où les corps des victimes ont également séjourné plusieurs mois dans des massifs boisés et escarpés, l’examen des restes du caporal Arthur Noyer et de la petite Maëlys avaient été au cœur des investigations. "Je sais que dans la montagne, c’est l’endroit le plus approprié pour déposer une personne tuée", avait expliqué l’ancien militaire pendant l’enquête.

Comme dans le cas d’Émile, c’est bien le crâne du caporal Noyer qui avait d’abord été retrouvé par un randonneur, en septembre 2017, soit six mois après la disparition du jeune militaire, pris en stop à Chambéry par Nordahl Lelandais. Mais ce crâne était dans la forêt de Cruet, en contrebas et loin du lieu où son meurtrier avouera ensuite avoir déposé son corps, dans un col, à une douzaine de mètres d’une route très fréquentée par les cyclistes. Il faudra plusieurs jours de recherches aux gendarmes pour retrouver le reste du squelette.

Des ossements éparpillés par les animaux

"Les ossements avaient été éparpillés sur plusieurs dizaines de mètres carrés par les animaux. Le squelette ne pourra être totalement reconstitué", avaient témoigné les gendarmes à la cour d’assises de Savoie, en mai 2021. Un spécialiste en anthropologie avait précisé que "le délai pour avoir un état squelettisé est de plusieurs mois" et expliqué la difficulté alors posée pour déterminer la cause de la mort : "Il y a un élément clé, qui est l’examen externe du corps, qui permet des mises en perspective avec des lésions qu’on retrouve en profondeur. Sans cet examen cutané, on est déjà extrêmement limité".

Les experts avaient toutefois pu relever des traces de fracture au niveau du nez et de l’arrière du crâne, pouvant correspondre aux violents coups de poing que Lelandais a reconnu avoir donnés, mais sans exclure qu’elles aient pu avoir été causées par une chute.

La même situation était posée dans l’affaire Maëlys. Le corps de la petite fille, enlevée et tuée le 27 août 2017 à Pont-de-Beauvoisin (Isère), n’avait été découvert que le 14 février 2018, dans une forêt à plusieurs dizaines de kilomètres de là. Les gendarmes avaient fait "plusieurs ratissages en mars et en avril, où l’on a retrouvé des os et des vêtements éparpillés sur plusieurs dizaines de mètres", avait témoigné l’un d’eux aux assises de l’Isère, en février 2022.

Là encore, l’expert en anthropologie avait déploré "l’absence de revêtement cutané, puisque la peau est la mémoire des lésions traumatiques du corps", qui permet aussi de dater les blessures.

La mandibule brisée de Maëlys avait permis de confirmer la violence des coups qu’avait avoués son bourreau. Mais l’état squelettique du corps avait empêché les experts de déterminer un éventuel "temps de survie ou d’agonie", ainsi que de se prononcer sur d’éventuels sévices sexuels subis par l’enfant enlevée et tuée.

Hormis un rebondissement d’enquête toujours possible, impliquant l’intervention d’un tiers, il va donc falloir s’armer de patience pour en savoir plus sur la mort d’Émile. Les recherches pour retrouver l’essentiel de ses restes risquent de durer et l’examen, ensuite, en laboratoire, de ses ossements pourrait prendre plusieurs mois, sans garantie de déboucher sur une conclusion précise.

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