Réforme pénale: Taubira présente en conseil des ministres son projet controversé

  • La ministre de la Justice, Christine Taubira, le 4 octobre 2013 à Paris
    La ministre de la Justice, Christine Taubira, le 4 octobre 2013 à Paris AFP/Archives - Joël Saget
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Christiane Taubira présente mercredi en Conseil des ministres son projet de réforme pénale, contesté d'avance par la droite qui dénonce le "laxisme" d'un texte qui avait déclenché une passe d'armes avec Manuel Valls cet été.

La garde des Sceaux rétorque que son "projet de loi sur la prévention de la récidive et l'individualisation des peines" a pour seul but de rendre le suivi des délinquants plus efficace et donc mieux assurer la sécurité des Français.

Le projet confirme un des engagements symboliques de François Hollande pendant la campagne présidentielle, la suppression des peines plancher en cas de récidive, un "marqueur" de la politique sécuritaire sarkoziste.

Autre mesure phare, la création d'une peine de probation en milieu ouvert, mais symboliquement baptisée "contrainte pénale". Applicable pour les délits passibles de cinq ans de prison au maximum, elle ne remplacera aucune autre peine et ne sera pas totalement déconnectée de la détention, puisqu'un condamné manquant à ses obligations pourra voir la peine transformée en emprisonnement.

Autre objectif, éviter les sorties "sèches" de prison, sans aucune mesure d'accompagnement (80% des sorties aujourd'hui). Le texte prévoit que soit systématiquement étudiée aux deux-tiers de la peine la possibilité d'une "sortie sous contrainte", en clair un aménagement de peine. Une reculade selon les partisans d'une telle mesure, qui souhaitaient que cet aménagement soit systématique, pas juste son examen.

Texte politiquement "sensible"

Histoire de bien marquer sa fermeté, le projet revient sur une mesure instaurée sous Nicolas Sarkozy et prévoyant un examen obligatoire avant incarcération des possibilités d'aménagement de peine pour les condamnés à deux ans maximum, un an en cas de récidive. Délais ramenés respectivement à un an et à six mois pour ceux dont l'incarcération n'est pas prononcée à l'audience, le gouvernement ne boudant pas l'occasion d'affirmer ainsi lutter contre un "laxisme de droite".

Peine perdue, la droite pilonne le projet, accusant le gouvernement de se préparer à "vider les prisons" et dénonçant un "feu vert donné aux voyous". Le patron de l'UMP, Jean-François Copé a demandé "solennellement le retrait" du texte.

L'opposition appuie sur la plaie des divergences étalées au grand jour cet été entre la Chancellerie et le ministère de l'Intérieur sur le texte. Manuel Valls en avait appelé à l'arbitrage présidentiel, tout en soulignant l'aspect politiquement "sensible" du texte, sur un terrain sécuritaire où la gauche a souvent été en difficulté.

Selon un sondage CSA (réalisé par internet du 24 au 26 sur un échantillon représentatif de 1.029 personnes âgées de 18 ans et plus) pour l'Institut pour la justice, classé à droite, rendu public mercredi, 75% des sondés ne pensent pas que les mesures du texte "permettront de lutter efficacement contre la récidive des délinquants". 60% se disent défavorables à la suppression des peines plancher (22% pour), 66% contre la "libération sous contrainte" (26% pour), 69% défavorable à la contrainte pénale (25% pour).

Les prisons françaises enregistrent une surpopulation chronique, avec 67.088 détenus au 1er septembre, soit un taux d'occupation dépassant les 115%. Selon des estimations faites en accompagnement du projet, il pourrait aboutir à diminuer le nombre de détenus de 2.600 à 6.600 au bout de trois ans, fourchette dont l'amplitude s'explique par le nombre important de mesures du texte, dont les incidences peuvent se croiser, selon des sources proches du dossier.

Les syndicats, côté pénitentiaire comme magistrats et qu'ils soient plus ou moins favorables au fond de la réforme, mettent tous en garde sur la question des moyens, cruciale à l'heure des restrictions budgétaires. 450 créations de postes sont déjà annoncées pour les services de probation et d'insertion.

Le ministre des Relations avec le Parlement, Alain Vidalies, a annoncé mardi soir sur BFMTV que le projet serait examiné à l'Assemblée nationale à partir du 8 avril, juste après les élections municipales.

Source : AFP

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