Procès Agnelet: le faisceau de présomptions face à l'absence de preuves

  • Maurice Agnelet se rend à une audience, lors de son procès au tribunal de Rennes, le 2 avril 2014
    Maurice Agnelet se rend à une audience, lors de son procès au tribunal de Rennes, le 2 avril 2014 AFP/Archives - Jean-Sebastien Evrard
  • Des dossiers liés au procès Agnelet, au tribunal de Rennes, le 17 mars 2014
    Des dossiers liés au procès Agnelet, au tribunal de Rennes, le 17 mars 2014 AFP/Archives - Jean-Sebastien Evrard
  • Le président de la cour Philippe Dary, avant l'ouverture du procès Agnelet, le 17 mars 2014 à Rennes Le président de la cour Philippe Dary, avant l'ouverture du procès Agnelet, le 17 mars 2014 à Rennes
    Le président de la cour Philippe Dary, avant l'ouverture du procès Agnelet, le 17 mars 2014 à Rennes AFP/Archives - Jean-Sebastien Evrard
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AFP

Trois semaines après le début du procès de Maurice Agnelet, jugé pour l'assassinat de sa maîtresse Agnès Le Roux plus de 36 ans après les faits, l'accusation tente d'étayer les charges pesant contre l'accusé, mais sa défense pointe l'absence troublante de preuves du crime.

Le verdict est attendu le 11 avril dans ce procès fleuve au cours duquel Maurice Agnelet, 76 ans, s'est battu avec opiniâtreté, se montrant tour à tour combatif, ironique, précis ou évasif.

Invariablement vêtu de noir, il n'a eu de cesse de répéter, surtout quand ses contradictions l'entraînaient sur des terrains glissants, qu'"il n'a pas tué Agnès", la riche héritière d'un casino niçois, le Palais de la Méditerranée, mystérieusement disparue lors du weekend de la Toussaint 1977.

Depuis cette date, personne n'a revu la jeune femme âgée alors de 29 ans. Le véhicule à bord duquel elle s'est volatilisée n'a jamais été retrouvé.

Sa disparition intervenait quelques mois après qu'elle eut vendu ses parts dans le Palais de la Méditerranée au patron du casino concurrent, Jean-Dominique Fratoni, pour 3 millions de francs.

La somme, d'abord versée sur un compte commun aux deux amants, à Genève, s'est retrouvée après la disparition d'Agnès sur un compte au seul nom d'Agnelet.

L'emploi du temps de l'ancien avocat, notamment entre les 27 et 29 octobre 1977, laisse apparaître des zones d'ombre.

Lui assure qu'il est allé les 27 et 28 octobre à Genève, avec une autre de ses maîtresses, Françoise Lausseure. Celle-ci a confirmé pendant de longues années cet alibi, avant de se rétracter, en 1999, ouvrant la voie aux poursuites engagées contre Agnelet.

Attendue avec impatience, Françoise Lausseure, qui habite au Mexique, ne s'est pas déplacée à Rennes, laissant un goût d'inachevé à ces trois semaines d'audience.

- "Pas de preuves du crime" -

Un témoin a néanmoins contredit Agnelet sur sa présence en Suisse avec Mme Lausseure: Martine Nègre a assuré devant la cour être partie en Suisse avec son amie, en colère contre Agnelet qui s'était décommandé au dernier moment.

Elle situe bien ce voyage à la Toussaint 1977. Mais elle avoue ne pas se souvenir de sa date exacte, ni de l'hôtel, ni de la chambre.

Pour prouver sa bonne foi, Agnelet a, lui, pendant l'enquête, fourni une attestation de l'hôtel genevois. Mais elle est au seul nom de Mme Lausseure. Et la chambre correspond à une chambre avec petit lit.

Autre interrogation: Agnelet a retiré le 26 octobre d'une banque niçoise le dernier million qu'Agnès a tiré de la vente de ses parts. Il assure qu'il a remis cette somme à Agnès, qu'elle devait faire passer en Suisse.

L'accusation ne se satisfait pas de ce scénario: s'il a l'argent et qu'il annule le voyage avec Mme Lausseure, c'est qu'il a un autre dessein.

Autre charge troublante: un mot d'adieu retrouvé chez Agnès Le Roux, en mars 1978, semble être une mise en scène de sa disparition, que Maurice Agnelet aurait maquillée selon des enquêteurs en une nouvelle tentative de suicide de sa maîtresse, la troisième, réussie.

Si plusieurs témoins ont pointé le rôle éventuel du "milieu" des jeux qui se livrait à cette époque, à Nice, à une véritable "guerre", il est "impossible" en revanche qu'Agnelet "n'ait pas joué un rôle majeur dans la disparition d'Agnès, même s'il n'est pas matériellement coupable du meurtre", a estimé le premier juge d'instruction chargé de l'enquête, Richard Bouaziz.

Du pain bénit pour le défenseur d'Agnelet, Me François Saint-Pierre, qui a confié à l'AFP : "Evidemment il y a un effet d'accumulation de charges. Mais nous en restons toujours au coeur du problème: il n'y a pas de preuves du crime".

"Dans ce cas de figure, la justice doit prononcer un acquittement non pas parce qu'elle sera convaincue de l'innocence de Maurice Agnelet mais parce qu'elle ne peut pas prouver sa culpabilité", a ajouté Me Saint-Pierre.

Agnelet avait été condamné en 2007 en appel à 20 ans de réclusion. Mais la justice européenne avait estimé qu'il n'avait pas bénéficié d'un procès équitable.

Source : AFP

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