Aveyron : Comment les jeunes ruraux se bougent-ils ?

  • Les jeunes agriculteurs aveyronnais aiment "se bouger", comme ici lors des Agrifolies.
    Les jeunes agriculteurs aveyronnais aiment "se bouger", comme ici lors des Agrifolies. Archives CP
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D.L.

Ruralité. La géographe toulousaine Mélanie Gambino a étudié les différentes façons dont les jeunes peuvent s’inscrire dans un espace rural. Elle est invitée à en parler samedi dans le cadre d’un colloque organisé à Brens (Tarn).

Passionnante analyse que celle de Mélanie Gambino, publiée en 2010 par le centre d’études et de prospective lié au ministère de l’Agriculture (1). La façon d’habiter son territoire par la jeunesse rurale y est étudiée sous le prisme de la mobilité. Et si cette recherche a été menée d’une part en Irlande et d’autre part en Dordogne, ses points de similitude autorisent une extrapolation sur l’ensemble de cette vaste bande de territoires ruraux qui courent du nord-est au sud-ouest de la France (mais la Bretagne pourrait sans doute y être incluse).

Selon l'universitaire de Toulouse-le-Mirail, "ces espaces désignés par des termes à connotation négative, encore utilisés aujourd’hui: le rural “profond”, la “diagonale du vide”, le “désert français", "apparaissent comme des espaces périphériques des centres urbains et sont représentés, dans l’imaginaire collectif, comme bucoliques mais archaïques, calmes mais isolés, et souvent économiquement dépendants". 

Montrer le rural tel qu’il est vécu

Or, selon Mélanie Gambino, "les espaces ruraux de faible densité, et la ruralité en général, sont rarement montrés tels qu’ils sont vécus par les jeunes qui y grandissent". Telle est justement son ambition, et elle va pour cela analyser le ressenti dans un échantillon de jeunes âgés de 15 à 25 ans au regard de leur mobilité et des contraintes qu’ils vivent plus ou moins comme telles. "Les jeunes ne surmontent pas ces contraintes avec les mêmes stratégies", explique-t-elle, en dégageant "trois représentations contrastées de l’espace rural". "Pour un premier tiers de ces jeunes, la mobilité n’est faite que de déplacements nécessaires et contraignants." 

Du coup "ceux-ci pratiquent une mobilité essentiellement locale et contrainte, se représentant les espaces ruraux de faible densité comme des lieux uniformes et ennuyeux. (...) L’espace rural est ainsi marqué par le manque d’horizon, il est vécu comme un piège".

Piège, refuge ou espace des possibles

Un deuxième tiers considère plutôt l’espace rural comme "un refuge": "Les jeunes ruraux à mobilité alternante insistent davantage sur l’attractivité de l’espace rural de faible densité, sur le sentiment d’appartenance à une communauté, la tranquillité, la convivialité." Et d’expliquer que "par cette mobilité s’affirme davantage la figure du territoire à la carte, propre au mode de vie contemporain".

Enfin, pour le dernier tiers de l’échantillon des jeunes ruraux étudié, "la mobilité est une condition de réalisation sociale. Elle représente le moyen de vivre selon une logique différente de la majorité des autres jeunes, et constitue une alternative à la vie en ville".

Et d’approfondir l’analyse en ces termes : "Ils se représentent donc l’espace rural de faible densité comme un cadre de vie ouvert, perçu comme un signe distinctif. Il leur donne une identité qui les singularise car leur lieu de vie, à leurs yeux, est porteur de valeurs auxquelles ils adhèrent et s’identifient. La ruralité est donc vécue comme un espace des possibles."

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