Charlie Hebdo: "Ceux qui l’achètent pour la 1re fois vont être secoués"

  • Le journal était mourant. Le voilà plus que jamais ressuscité.
    Le journal était mourant. Le voilà plus que jamais ressuscité. AFP
Publié le , mis à jour
Joël Born

Regards. Deux lecteurs assidus de la presse satirique évoquent le Charlie Hebdo d’après les attentats.

Philippe Dagneau est un ancien lecteur d’Hara Kiri, solidement enraciné dans les années de l’après 68. C’est aussi un fidèle du Canard Enchaîné et de Charlie Hebdo, dont il est abonné depuis plusieurs années. Chaque mercredi, notre ancien confrère de Midi Libre, aujourd’hui journaliste ruthénois indépendant, débarquait dans la salle de rédaction, son Charlie sous le bras. Ce qui nous valut, d’ailleurs, d’interminables fous rires à la suite de quelques « unes» mémorables.

Lorsque nous l’avons appelé, hier, il venait tout juste de savourer le numéro historique de ce mercredi 14 janvier. Le premier Charlie de l’après attentats. Un journal, selon lui, dans l’esprit des précédents. "C’est une réponse du berger à la bergère, de ce point de vue-là, c’est très clair, commente Philippe. Dans tout le numéro, ils tirent à boulets rouges sur tous les religieux qui disent il faut faire comme ci, comme ça...Ceux qui l’achètent pour la première fois vont être un peu secoués. Avec ça, comme dans tous les canards, il y a du bon et du moins bon."

Mais pour Philippe qui, plus que des confrères, a l’impression d’avoir "perdu des amis", l’essentiel est ailleurs. "Le plus important est qu’il y ait eu autant de monde pour défendre la liberté, la liberté de tout le monde de penser ce que l’on veut.Que l’on soit d’accord ou pas d’accord avec ce qu’ils racontent. Et puis n’oublions pas que c’était une bande d’ados qui n’avaient jamais grandi, des héritiers directs de mai 68.Se foutre de la gueule de tout le monde, c’est typiquement français. Comme disait Wolinski, on est féroces mais jamais méchants. Ils sont malheureusement tombés sur de vrais méchants."

Comme nombre d’observateurs, il espère toutefois que le soufflet ne va pas retomber trop vite. "Sans mauvais jeu de mots, ils vont se faire un trésor de guerre, alors qu’ils étaient prêts à déposer le bilan. Maintenant, il faut que ça perdure..." Et il préfère ne pas s’attarder sur ceux qui ont, froidement, décidé de profiter de la situation pour spéculer sur le dos de Charlie. "Faire du pognon avec n’importe quoi, on ne pourra jamais l’empêcher... "

Fred va s’abonner parce que « la presse en a besoin »

Fred Andrieu, un Decazevillois de 47 ans est né en 1968. On ne se refait pas... Grand dévoreur de bandes dessinées, lui-même scénariste de BD, il fut pendant des années un lecteur assidu de Charlie. "J’ai arrêté d’acheter Charlie Hebdo, quand ils ont viré Siné. J’aimais bien ces mecs, mais j’en ai vraiment voulu à Philippe Val (ancien directeur de l'hebdomadaire)", explique-t-il. Internet a également et considérablement modifié ses habitudes de lecture. " Avant, j’étais un très gros consommateur de presse. Même si je continue à lire les journaux régulièrement et à acheter Libération avec son supplément littéraire, j’ai un peu levé le pied..."

Une semaine après cette terrible et sombre journée du 7 janvier, il ressent toujours un certain malaise. "Même si je n’ai pas vraiment été surpris, car il y avait déjà eu des attaques contre Charlie, l’exécution m’a choqué, traumatisé. Et je crois que j’aurais eu la même réaction, le même écœurement pour n’importe quel journal." Comme Philippe, il juge la une du nouveau Charlie dans la lignée des précédentes et de l’esprit du journal. Et les réactions négatives de certains pays comme l’Iran ne l’étonnent pas. Dans tous les cas, Frédéric espère que ces dramatiques événements vont "provoquer un sursaut pour la presse."

Il espère, surtout, se tromper. "Malheureusement, je pense que cet engouement va vite s’éteindre, comme ce fut le cas après le 11 septembre." Pour Fred, la question ne se pose même pas. La réponse est toute trouvée : "Je vais de nouveau l’acheter. Je vais même m’abonner, par militantisme. Pour la liberté de la presse. La presse en a besoin."

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