A Bologne, on remet à neuf petits et grands films entre passionnés

  • Le laboratoire de restauration de films de la Cineteca de Bologne en Italie, le 25 juin 2015
    Le laboratoire de restauration de films de la Cineteca de Bologne en Italie, le 25 juin 2015 AFP - Vincenzo Pinto
  • Le laboratoire de restauration de films de la Cineteca de Bologne en Italie, le 25 juin 2015
    Le laboratoire de restauration de films de la Cineteca de Bologne en Italie, le 25 juin 2015 AFP - Vincenzo Pinto
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Centre Presse Aveyron

Dans le laboratoire de restauration de films de la Cineteca de Bologne (centre), qui organise chaque année le festival "Il cinema ritrovato ("Le cinéma retrouvé"), un groupe de passionnés redonne vie à petits et grands longs-métrages, entre artisanat et techniques les plus modernes.

Pour effectuer la première étape de la restauration, la réparation de bobines originales venues du monde entier, les petites mains d'une dizaine de jeunes femmes s'affairent, dans un silence de cathédrale.

Paola Ferrari fait dérouler devant elle une pellicule entre deux bobines fixes: "Il s'agit d'un thriller de 1981, je ne l'ai jamais vu mais ce doit être un beau film", affirme-t-elle à l'AFP.

"Il n'est pas très endommagé, son unique problème concerne les points de connexion entre deux images". Pour les renforcer, la jeune femme les nettoie, puis colle par dessus un bout de pellicule vierge.

"C'est un travail qui demande une grande patience, que je qualifierais de bénédictin", dit-elle en souriant.

"Il faut faire preuve d'une grande concentration" car chaque défaut que l'on peut réparer manuellement permet de gagner du temps sur l'étape suivante du nettoyage numérique, ajoute-t-elle, soulignant que ce travail de précision lui prend entre huit et dix heures par bobine.

Du sol au plafond, des centaines de boîtes les unes sur les autres: "Valmont" de Milos Forman (1989), "Jour de fête" de Jacques Tati (1949), "La belle équipe" de Julien Duvivier (1936)...

Dans un coin, une jeune femme nettoie une pellicule au coton-tige, avec un mélange d'alcool et d'essence d'eucalyptus, afin d'ôter tout bout de scotch malvenu.

Après ça, le film est lavé puis envoyé dans la salle des scanners, auréolée d'une lumière bleue, et dont la température n'excède pas les 17 degrés.

Devant leur écran, d'autres jeunes femmes contrôlent la progression de la numérisation de "Léon Morin, prêtre" de Jean-Pierre Melville (1961), avec Jean-Paul Belmondo.

- 'Milliers d'heures' de travail -

"Notre particularité, ce n'est pas seulement le fait que nous utilisons les techniques les plus avant-gardistes de restauration", explique à l'AFP Gianluca Farinelli, le directeur de la Cineteca, qui chapeaute le laboratoire "l'Immagine ritrovata".

"C'est surtout que travailler sur un film requiert une connaissance de l'histoire, de la technique, mais aussi des raisons pour lesquelles ce film nous est arrivé dans ces conditions. C'est pourquoi nous sommes uniques, nous faisons du sur-mesure", ajoute-t-il, précisant se sentir à la tête d'une "boutique artisanale, dans la plus pure tradition italienne".

Une fois numérisé, le film entame un long chemin de restauration plan par plan, sur ordinateur.

"Ce sont des fichiers informatiques qui sont alors +sales+, c'est comme si on avait fait la photocopie des pellicules", explique Davide Gozzi, le directeur du laboratoire.

A ce stade, ce sont une douzaine de jeunes gens, dans une pièce sombre, qui travaillent, qui sur un Buster Keaton, qui sur un western de Clint Eastwood, qui sur un film asiatique.

On ôte les rayures, on stabilise la pellicule, on élimine les tâches noires ou blanches... "Ce nettoyage prend des milliers d'heures", confie M. Pozzi.

Après cette étape, vient celle de la restauration des couleurs, de la photographie du film, "pour lui redonner son look d'origine, en le respectant, non pour en refaire un nouveau", insiste-t-il. Parallèlement, la colonne sonore est également nettoyée.

Reste ensuite l'étape du "mastering", en vue de la conservation à long terme. En fonction de l'état du film, la restauration aura coûté à son propriétaire entre 60.000 et 200.000 euros.

Un aussi long processus nécessite "des gens qui aiment le cinéma et apprendre à chaque film", confie le jeune directeur, devant l'affiche du festival, durant lequel 400 films, pour certains jamais encore vus en public, seront projetés

Pour Paola Ferrari, c'est à chaque fois "une grande émotion" de voir sur grand écran l'un des films qu'elle a nettoyés.

Davide Pozzi acquiesce: "Notre plus grande satisfaction est d'offrir au public un film bien restauré et après.. Profitez-en !".

Source : AFP

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