Une odyssée de l'Irak à la Grèce et au bout, l'espoir en Allemagne

  • Parti d'Irak, Shaheen Al-Obaidi, 21 ans, pose le 26 juin 2015 à Berlin
    Parti d'Irak, Shaheen Al-Obaidi, 21 ans, pose le 26 juin 2015 à Berlin AFP - JOHN MACDOUGALL
  • Shaheen Al-Obaidi, 21 ans, originaire de Mosoul, en Irak, pose le 26 juin 2015 à Berlin
    Shaheen Al-Obaidi, 21 ans, originaire de Mosoul, en Irak, pose le 26 juin 2015 à Berlin AFP - JOHN MACDOUGALL
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Centre Presse Aveyron

A l'école, en Irak, personne ne lui a appris qui était Ulysse. A 21 ans, Shaheen a pourtant effectué une odyssée si longue qu'il peine à se souvenir des pays traversés avant d'enfin atteindre l'Allemagne dans l'espoir de vivre en paix.

Etait-ce la Serbie ou l'Albanie après la Grèce ? Ou bien peut-être la Bulgarie ? Peu importe au fond par où il est passé. C'est en Allemagne, première destination des demandeurs d'asile en Europe, que le jeune Irakien voulait se rendre. "Germany, country number one!" ("Allemagne, pays numéro un!"), plaisante-t-il, pouce en l'air.

Comme Shaheen Al-Obaidi, qui a quitté il y a tout juste un an sa ville de Mossoul passée sous le joug du groupe jihadiste Etat islamique (EI), des centaines de milliers de migrants frappent à la porte de l'Allemagne. Leur nombre devrait grimper jusqu'à 800.000 cette année, un record absolu laissant les autorités allemandes dépassées.

Le jeune homme, casquette et casque de musique façon rappeur américain, affiche un sourire au-dessus de son cappuccino, installé à la terrasse d'un café, en bordure d'un canal berlinois.

Avec son frère de 18 ans et son père de 54 ans, il tourne en rond dans un foyer de demandeurs d'asile en attendant, espère-t-il, d'obtenir des papiers qui lui permettront de reprendre des études "de langues étrangères et d'informatique".

"C'est long", souffle-t-il. "On nous dit que la priorité, ce sont les réfugiés syriens". Alors il apprend l'allemand pour patienter. Sa progression est rapide. D'ailleurs, il saupoudre déjà ses phrases en anglais de mots d'allemand: "Ausweis" ("papier d'identité"). Ou "Geduld", cette patience dont il faut faire preuve face à l'administration et qui n'est pas le fort de ce jeune homme pressé.

Il y a un an tout rond, il était sur les routes, quelque part entre la Turquie et la Grèce. La traversée en bateau pour rejoindre la porte d'entrée de l'Union européenne a été le moment le plus périlleux de son épopée. La mer Égée charrie sur ses flots des tragédies quotidiennes de migrants.

- Des dizaines de milliers de dollars -

Shaheen a eu de la chance: "Il y a des gens qui paient 1.000 dollars pour la traversée. Nous avons payé beaucoup plus", explique-t-il, pour avoir la garantie que le rafiot qui les transporte soit moins surchargé que les autres. "Nous étions 50 ou 60 pas plus sur un bateau prévu pour 40", détaille-t-il.

Sa famille est aisée, son père a versé quelques dizaines de milliers de dollars au total pour un voyage à trois de Mossoul à l'Allemagne. "La moitié payée au départ, l'autre à l'arrivée". Un dossier débrouillé avec un passeur kurde, avant de quitter l'Irak.

Préoccupation numéro un durant le trajet: protéger son téléphone portable pour pouvoir rassurer sa mère, restée à Bagdad. "Un déchirement" mais le voyage était trop dangereux pour elle.

Après la Grèce, il y aura les jours sans fin à bord d'une voiture conduite par un chauffeur travaillant pour des passeurs. "Il était silencieux, conduisait la nuit et ne s'arrêtait que le matin". Toujours en rase campagne. Les repas: des biscuits et des chips, et rien d'autre.

A un moment donné dans les Balkans, Shaheen a perdu ses repères: "Je savais dans quel pays je me trouvais grâce aux drapeaux mais un jour, il y en a eu un que je ne connaissais pas".

En Allemagne, il compte se rendre à Hambourg, ville portuaire du nord. Ce sera finalement Berlin. "Je rêvais de venir un jour ici. En touriste, pas en tant que réfugié", souligne-t-il, avant de raconter une vie rythmée par les attentats, les enlèvements, puis l'horreur de la menace EI.

"En Irak, je ne pourrais pas être dans un endroit si fréquenté. C'est beaucoup trop dangereux". D'ailleurs à Mossoul, sa vie quotidienne était jalonnée de coups de fils. A son père, à sa mère. Pour dire que oui, tout va bien, qu'on est arrivé sain et sauf à l'école ou à la fac.

A 21 ans, il n'a connu que les troubles dans son pays natal. "Je rêve d'une vie en paix".

Source : AFP

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