Loi travail contre assurance chômage: Gattaz pose un ultimatum
Pierre Gattaz lance un ultimatum au gouvernement: le président du Medef a menacé de se retirer de la négociation d'assurance chômage si "rien ne bouge rapidement" sur le projet de loi travail. Matignon lui a opposé une fin de non-recevoir.
Particulièrement offensif, M. Gattaz a donné mardi "trois semaines" au gouvernement pour "profondément corriger" le texte, sans quoi son organisation "en tirera les conséquences": le cas échéant, "nous demanderons sans doute la suspension des négociations d'assurance chômage", a-t-il prévenu devant la presse.
"Ce n'est pas un ultimatum du Medef qui va peser sur le débat parlementaire ou sur l'engagement du gouvernement", a rétorqué Matignon, interrogé par l'AFP, jugeant que "la loi Travail est prise en otage d'enjeux internes au Medef".
"C'est une conception pour le moins étrange du dialogue social", a réagi, pour sa part, le ministère du Travail.
Organisations patronales et syndicales négocient depuis février une nouvelle convention d'assurance chômage, qui doit entrer en vigueur le 1er juillet. La prochaine séance, le 28 avril, n'est pas remise en cause, selon une source au Medef.
"Il n'est plus question aujourd'hui de continuer à faire semblant, à négocier dans une logique absurde de donnant-donnant, qui n'a mené depuis 30 ans qu'à plus de complexité, de rigidité et de coût pour les entreprises, et plus de chômage durablement élevé pour les concitoyens", a estimé M. Gattaz.
"Nous avons atteint aujourd'hui notre point de rupture", a-t-il assuré, dénonçant "un texte qui ne mène à rien et qui peut être vraiment contreproductif".
Le patron des patrons réclame le retrait du compte personnel d'activité (CPA), de la surtaxation obligatoire des CDD et du mandatement, qui donne la possibilité pour les entreprises sans représentation du personnel de négocier avec des salariés mandatés par un syndicat.
La réforme du Code du travail, bien qu'édulcorée pour apaiser la colère de la majorité, répond à plusieurs revendications patronales: clarification des critères de licenciement économique, assouplissement du temps de travail, accords dits "offensifs" en faveur de l'emploi...
- 'Faute lourde' -
"Il reste quelques points positifs, mais il y a une longue liste de points négatifs", a opposé Pierre Gattaz, craignant "une version 4 qui serait encore plus horrible".
Le projet de loi doit être examiné en première lecture à l'Assemblée nationale du 3 au 12 mai. Un conseil exécutif du Medef est prévu le 9 mai.
"Je veux mettre en garde le gouvernement et les parlementaires: l'échec de la loi El Khomri signera plus que l'échec d'un nouveau projet de loi inabouti, nous en tirerons les conséquences qui s'imposeront sur l'ensemble du champ du dialogue social", a-t-il insisté.
Pierre Gattaz, qui a haussé le ton, s'est défendu d'avoir cédé à la pression de certaines fédérations du Medef et assuré que sa "mise en garde" traduisait un "avis unanime" de la direction, ainsi qu'une "très forte défiance" des employeurs.
La CGPME, elle aussi très remontée contre l'évolution de la réforme du code du travail, a déjà menacé de se retirer de la négociation.
Selon M. Gattaz, il n'est plus possible de négocier avec la CGT et Force ouvrière, qui sont dans la "culture de l'opposition systématique", "ne font aucune proposition", "pratiquent la lutte des classes", sont "très politisées" et font preuve d'une "détestation de l'entreprise et de l'économie de marché".
Jean-Claude Mailly, numéro un de FO, a vivement réagi à ces accusations, dénonçant auprès de l'AFP des propos "pitoyables". Selon lui, "c'est la preuve de l'inculture sociale et économique" de M. Gattaz, qui "verse dans le poujadisme" et "fait le jeu de l'extrême droite".
Pierre Gattaz a aussi été taclé par Laurence Parisot, à qui il a succédé à la tête du Medef. "Quitter la négociation assurance chômage, dans l'état actuel de notre pays, serait une faute lourde", a-t-elle tweeté.
Si, d'aventure, la négociation sur l'assurance chômage échouait, l'État fixerait lui-même "les nouveaux paramètres de l'assurance chômage", a prévenu en février la ministre du Travail Myriam El Khomri.
Source : AFP
J'ai déjà un compte
Je me connecteSouhaitez-vous recevoir une notification lors de la réponse d’un(e) internaute à votre commentaire ?