Audrey Dussutour, une Aveyronnaise aux origines du monde

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    Audrey Dussutour, une Aveyronnaise aux origines du monde
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Centre Presse / Philippe Henry

Aveyronnaise d’origine, Audrey Dussutour est chercheuse au CNRS. Depuis dix ans, elle multiplie les expériences sur cet incroyable organisme primitif unicellulaire qui apprend, se déplace et peut doubler sa taille chaque jour. Il est sur Terre depuis 500 millions d’années voire, un milliard d’années. Tapi dans l’ombre de nos forêts, à l’abri de la lumière, sous les tropiques ou sous la neige, cet organisme d’apparence primitive a colonisé toute la planète. Pourtant, cet organisme unicellulaire se révèle surprenant. Il aura fallu qu’Audrey Dussutour, chercheuse du CNRS, originaire du village de Fijaguet, commune de Valady, se penche sur cette « chose » pour en découvrir toute sa richesse. Une chose qu’elle aura choisi de surnommer « blob », en référence au film américain « The Blob » (1958) dans lequel une gelée extraterrestre colonise la planète.

De ses recherches, elle a publié un livre (*), grand public, pour présenter ses découvertes. Un ouvrage scientifique qui a rencontré un large écho médiatique, et a séduit de nombreux lecteurs non scientifiques.

Comment, au cours de votre carrière de chercheur, avez-vous rencontré le blob?

Par pur hasard ! C’était en novembre 2008, en Australie. J’étais étudiante en post-doctorant. À l’époque je travaillais avec un chercheur qui développait des théories en nutrition et cherchait à les appliquer sur d’autres organismes que les fourmis. Au départ, je suis myrmécologue, et j’ai publié mes premiers travaux autour des fourmis. Il cherchait un organisme beaucoup plus primitif et c’est là qu’on a eu l’idée du physarum. Il est assez connu et dans les années 2000, on s’est rendu compte de ses capacités extraordinaires.

Comment peut-on définir le blob?

Il s’agit d’un organisme unicellulaire peu évolué. Il est apparu il y a environ un milliard d’années. Il mange comme un animal, d’ailleurs il est très friand des flocons d’avoine, et se reproduit comme un champignon. Grâce aux travaux sur sa génétique, on peut le classer dans la famille des amibozoaires, où l’on retrouve le parasite du paludisme. Il est la plupart du temps jaune, gélatineux. Il existe environ mille espèces différentes et sa couleur peut alors varier. Il n’a pas vraiment de forme définie, mais il est en général plat. En gros, il ressemble à une vieille omelette !

Peut-on l’observer en France, dans nos forêts aveyronnaises?

On peut effectivement le trouver dans les forêts humides, pas dans les milieux secs, sur les écorces ou dans les litières, mais à l’abri de la lumière. Si on peut le trouver partout dans la planète, on peut l’observer en particulier au printemps et à l’été.

Peut-on qualifier cet organisme d’intelligent?

Si l’on considère que l’intelligence c’est l’apprentissage, alors oui, pour moi, il est intelligent. Nous avons mené plusieurs expériences à ce sujet. Une des expériences a consisté à lui faire ignorer une matière qu’il n’aime pas, pour accéder à de la nourriture. Par ailleurs, il est capable de transmettre cette information à un blob « naïf ». Ceux qui étaient habitués au sel, ont diffusé l’information aux autres. Il y a donc un vrai apprentissage d’un blob à l’autre. Nous travaillons en ce moment sur l’apprentissage cognitif. Nous reproduisons l’expérience de Pavlov : on a associé le sel à la récompense. Dix jours après, sur 90 blobs testés, 30 ont choisi le sel. Ce qui était censé les repousser les a finalement attirés. Mais 60 n’ont rien compris. Il nous reste à travailler sur cet aspect. Nous espérons avoir une réponse dans les six prochains mois.

Outre son intelligence surprenante pour un organisme unicellulaire, le blob peut-il avoir des vertus thérapeutiques?

Son système veineux est proche de certaines tumeurs. Il pourrait donc servir de modèle. Certaines de ses cellules ont également des propriétés anticancéreuses et antibactériennes. Dans votre ouvrage, vous consacrez de nombreux chapitres à présenter votre travail de chercheuse. Oui, c’était un souhait de ma part. Il s’agit d’un livre grand public, dont le succès me surprend un peu. Mais je voulais également rendre compte des difficultés que rencontrent les chercheurs. Notamment pour trouver des financements nécessaires aux recherches. Moi par exemple, je passe plus de temps au bureau que dans mon laboratoire. À mon grand regret !

(*) «Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le blob sans jamais oser le demander », éditions Équateurs sciences, 180 pages, 18 €. Audrey Dussutour dédicacera son livre samedi 24 juin à la Maison du livre de Rodez. “En gros, il ressemble à une vieille omelette ! On peut le trouver dans les forêts humides, mais à l’abri de la lumière. Il est partout sur la planète et on peut l’observer en particulier au printemps et à l’été. Audrey Dussutour, chercheuse au CNRS, étudie le « blob » depuis près de 10 ans, depuis ses premières expériences en Australie.

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