Les hôpitaux de l'Aveyron ont perdu 30 % de leurs lits en 20 ans, moins 25 % au niveau national

  • L'Aveyron a perdu 545 lits d'hospitalisation entre 2000 et 2020.
    L'Aveyron a perdu 545 lits d'hospitalisation entre 2000 et 2020. - Archives CP
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Selon les données de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), la France a perdu depuis l'an 2000 près de 80 000 lits d'hospitalisation, soit 25 % des ses capacités. Les départements ruraux, comme l'Aveyron ou l'Ardèche, ont payé un lourd tribut à cette politique sanitaire.
 

Il y a des paradoxes dans les hôpitaux français. Aujourd'hui, selon le président du Conseil scientifique et du Comité consultatif national d’éthique, Jean-François Delfraissy, qui a lancé une étude sur une éventuelle pénurie de soignants dans les établissements hospitaliers du pays, 20 % des lits sont fermés faute de personnel.

Au moment où l'on parle d'une 5e vague de la pandémie de Covid-19, et alors que celle-ci a plusieurs fois mis les établissements de santé sous pression depuis mars 2020, est-ce que la France est autant riche que cela en lits d'hospitalisation et de réanimation ? Pourtant, dévoile France Info, entre 2000 et 2020, la France a perdu près de 80 000 lits dans ses hôpitaux, 79 896 pour être précis, soit 25 % de ses capacités d'accueil de patients, en particulier dans les établissements publics, selon les données de la Drees. 

Dans le même espace de temps, la France a perdu 216 établissements publics possédant des lits d'hospitalisation, passant de 1 019 établissements en 2000 à 803 en 2021.

Moins 545 lits en 20 ans en Aveyron

Tous les départements français ont vu ainsi, en 20 ans, leur nombre de lits d'hospitalisation baisser, à l'exception du Val-de-Marne, qui en a gagné 32. Ce sont les départements ruraux qui ont enregistré les plus fortes suppressions de lits d'hospitalisation, certains ayant même vu leurs capacités "d'accueil" hospitalier baisser de près de la moitié en 20 ans. Comme les Alpes-de-Haute-Provence, la Creuse ou la Sarthe, qui affichent respectivement 44%, 45% et 48% de baisse. L'Ardèche affiche le "record national" en la matière avec près de 54 % de pertes de lits d'hospitalisation.

En Aveyron aussi, on fait "mieux" que la moyenne nationale. En 20 ans, le département a ainsi perdu 29,98 % de ses lits d'hospitalisation, passant de 1 818 lits en 2000 à 1 273 lits en 2020, soit une perte sèche de 545 lits, soit encore plus de 27 lits par an. En Occitanie, seul le Lot-et-Garonne fait pire, avec 30,88 % de lits perdus, alors que la Haute-Garonne, département urbain, s'en sort beaucoup mieux avec -4,25 % de lits en moins. Dans la région, c'est les Pyrénées-Orientales qui s'en tire le mieux avec une baisse de 2,15 %.

Les raisons de cette baisse ?

La fermeture d'un quart des lits d'hospitalisation en France a plusieurs causes.

  • 1. La prise en charge du grand âge a changé depuis les années 2000 : de nombreux lits des Unités de soins de longue durée (USLD) des hôpitaux ont été transférés vers les Ehpad, assure la Drees, interrogée par France info. Mais ces USLD représentaient moins de 15% du total des lits en 2000, ce n'est donc pas suffisant pour expliquer la baisse globale. Même si, dans les départements ruraux et à la population vieillissante comme l'Aveyron, ce transfert de lits des USLD vers les Ehpad (non reconnus comme établissements de soins par la Drees) pourrait représenter la majorité des baisses de lits.
  • 2. Un recours plus important aux médecins généralistes et à l'hospitalisation à domicile en lieu et place de l'hôpital, ce qui a fait automatiquement baisser le nombre des lits. Une peu trop pour la présidente de l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers, Rachel Bocher, pour qui "l'hôpital public doit aussi être en mesure d'avoir les capacités pour faire face aux périodes de crise, comme on l'a vécu avec le Covid".
  • 3. Un manque de personnel : pour avoir un lit d'hospitalisation opérationnel, il faut du matériel mais aussi des soignants pour s'en occuper. Rachel Bocher relève le "manque d'attractivité pour le métier [de soignant], faute de rémunération et avec des horaires à rallonge qui rebutent beaucoup de jeunes". Le problème de rémunération dans l'hôpital public est aussi pointé du doigt. Conséquence : alors que  les établissements publics ont vu leur capacité baisser de 25% en 20 ans, cette baisse a été de seulement 3% dans les cliniques privées, établissements à but lucratif, c'est-à-dire générant des bénéfices.

Les syndicats dénoncent cette baisse du nombre de lits, qui a des conséquences directes sur la qualité de la prise en charge des patients, mais aussi une politique "absurde"  de rationalisation des coûts à l'hôpital qui pourrait à terme s'avérer plus contre-productive que vertueuse. S'ils saluent l'investissement de 6 milliards d'euros dans le système de santé annoncé lors du Ségur de la santé en juillet 2020, ils s'inquiètent sur le court terme, car former de nouveaux soignants nécessite obligatoirement plusieurs années.

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