Agriculture : "Sans quelqu’un pour assurer la transition, c’est impossible !"

  • En Aveyron, on compte une moyenne de cent cinquante nouveaux installés chaque année.
    En Aveyron, on compte une moyenne de cent cinquante nouveaux installés chaque année. Archives CP
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Philippe Routhe

Regards. Un éleveur en bovin lait s’est installé dernièrement, parce qu’il a toujours voulu être agriculteur. Mais il est loin de jeter un regard idyllique sur la profession d’agriculteur.

Selon le dernier recensement de l’Agreste, la France a perdu plus de la moitié de ses exploitations en 25 ans. Pour autant, et heureusement pour le monde agricole, il existe un renouvellement à la tête des exploitations.

En Aveyron, on compte une moyenne de cent cinquante nouveaux installés chaque année (120 âgés de moins de quarante ans en 2013), faisant du département un des premiers à installer des agriculteurs en France. Mais ce serait jeter un voile sur les difficultés que de dire que tout se passe comme dans le meilleur des mondes. Et autant le dire tout de suite, ce sont des gens à fort tempérament qui entreprennent cette démarche. En témoigne cet éleveur en bovins lait qui a repris l’exploitation de son beau-père il y a une paire d’années. Son frère aîné ayant repris l’exploitation familiale, à 17 ans, il s’est orienté vers les Travaux publics. En attendant.

Après quinze années passées "à faire autre chose" comme il dit, mais tout en restant au contact de l’univers agricole, il s’est donc lancé, saisissant l’opportunité qui lui était offerte par son beau-père. Il demeure cependant perplexe devant l’évolution de la profession."Déjà, quelqu’un à qui on n’apporte pas de foncier, je ne sais pas comment il peut faire. Financièrement, c’est intenable. Moi, je loue l’exploitation, et j’ai racheté le cheptel et le matériel. Ça fait déjà une sacrée somme."

L’accès au foncier est une problématique récurrente. Le monde agricole en a bien conscience. Il a dernièrement alerté les maires sur le sujet... Cet accès à la terre n’est pas seul ralentisseur. Comme le souligne cet éleveur, passé par le centre de formation de Bernussou, à Villefranche-de-Rouergue: "Un hors-cadre ne peut pas prendre une exploitation trop importante comme ça. Sans être aidé. C’est un travail très difficile. Sans quelqu’un pour assurer la transition, c’est impossible. C’est ce que je pense."

Une volonté farouche de s’installer

Parmi les sujets qui lui font dire cela, il y a la connaissance des bêtes, de leurs cycles, et la charge de travail. Une profession très exigeante. "Je passe 12 heures, 14 heures voire 16 heures sur l’exploitation. C’est minimum huit heures par jour avec les bêtes. Tout ça sans oublier le travail administratif. Quelqu’un qui n’est pas du milieu, moi, je lui dis bon courage !" Mais il ne se plaint pas, trop heureux de faire le métier qu’il aime. Dès lors, il jette un regard lucide sur l’installation des jeunes agriculteurs. "C’est un véritable parcours du combattant. C’est un stress permanent, avec des papiers à n’en plus finir." 

"Nous sommes ficelés"

Et sur le mode de fonctionnement de l’agriculture. "On nous reproche les primes, mais l’on n’a pas le choix. Si on me payait  50€  de plus la tonne de lait encore. Tout augmente sauf le prix de notre production. Nous sommes ficelés... Et l’on fait mal voir l’agriculture à cause de cela..."

Grâce à sa volonté farouche de s’installer, aux conseils qui lui ont été distillés, notamment par son beau-père, il se régale avec ses quarante laitières. "Je me plaisais dans ce que je faisais avant. Mais je voulais être agriculteur, vivre de mon exploitation et être seul dessus." Un choix de vie qu’il assume parfaitement avec sa petite famille. Son expérience ne saurait résumer à elle seule toutes les installations de nouveaux agriculteurs. Mais une chose est sûre aujourd’hui, jouir d’un fort tempérament est le premier atout sur lequel doit pouvoir s’appuyer un candidat à la profession d’agriculteur.

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