Quelques regards aveyronnais sur le nouveau regard de l’Église

L’Église catholique, à qui l’on reproche certaines positions restrictives, voire rétrogrades, s’apprête à vivre une véritable révolution, pour reprendre le terme utilisé par nos confrères du Monde. Le rapport d’étape du synode sur la famille, publié lundi à Rome, rend inéluctable un changement fondamental du positionnement de l’Église sur des questions souvent d’une grande complexité. Cette ligne plus ouverte, souhaitée par le pape François, et qui bouscule déjà les rangs les plus conservateurs, propose notamment de mieux accueillir homosexuels, divorcés remariés et non-mariés religieusement.

Éviter de juger

Comment réagit-on à ces différentes annonces dans les milieux catholiques aveyronnais ? Professeur d’histoire retraité, archiviste de l’Évêché depuis 2009, René Andrieu n’est pas surpris par ce changement de regard sur les personnes et les situations, dans la continuité, selon lui, du voyage du pape au Brésil, au cours duquel il avait notamment lancé en direction des homosexuels : "Qui suis-je pour pouvoir juger ?"

Porte-parole aveyronnais de la Manif pour tous, Mathieu Danen "trouve bien" que l’Église mette en débat la problématique de la famille. "Je dirais même, il était temps", lâche-t-il, tout en posant quelques garde-fous, qu’il estime indispensables : "Il est intéressant de mieux cerner ce que les gens vivent. Pour autant, porter un regard nouveau ne veut pas dire tout tolérer. Il faut toujours avoir un regard bienveillant sur les personnes mais l’Église ne peut pas, non plus, modifier le Sacrement du mariage." Et même s’il consent que "la famille traditionnelle est en train d’exploser", Mathieu Danen continue à défendre "la vision du couple, de l’enfant et de ses droits" et à réclamer l’abrogation de la loi Taubira. Le Ruthénois redisant son opposition à la gestation pour autrui (GPA) et à la procréation médicalement assistée (PMA) qui entraîneraient, selon lui, une inévitable "marchandisation du corps de la femme."

Main tendue

Élisabeth Maisonabe, qui est très impliquée dans la vie de la communauté chrétienne aveyronnaise, évoque la main tendue pour "chercher ce qu’il y a de meilleur." "Notre pape a raison d’oser parler de questions qui touchent tout le monde, explique la Bertholénoise. Les gens attendent de l’espoir. Le message de vie, de bonheur, de l’Évangile doit être prioritaire, mais il faut le rendre audible, dans le langage d’aujourd’hui."

"Une belle perspective"

Le délégué épiscopal à l’information, Pascal Fournier, évoque une attitude responsable, en évitant de fuir les problématiques actuelles. Il parle d’ouverture à "certaines personnes qui n’entrent pas dans le moule." "Il faut que l’Église soit une maison accueillante, affirme-t-il. On ne peut pas fermer la porte, cela a pris du temps, mais le dialogue doit continuer. Aujourd’hui, la famille est complètement bousculée, au lieu de fermer les yeux, l’Église s’offre la possibilité de réagir."

Pascal Fournier attend avec impatience le discours final du pape, dimanche. Mais, d’ores et déjà, il considère que le texte de ce rapport intermédiaire (il servira de base de discussion dans l’ensemble de l’Église jusqu’au synode d’octobre 2015) ouvre "une belle perspective." Étant bien entendu qu’il y a et qu’il y aura des réticences. "Ces personnes auront-elles accès au Sacrement ?, s’interroge le délégué épiscopal. Pour l’instant, la discipline actuelle reste en vigueur mais il y a une avancée dans l’approche." Et de rajouter, comme pour mieux rassurer les plus réfractaires : "On n’est pas, non plus, dans une situation où on libère tout."