LuxLeaks2: Juncker de nouveau dans la tourmente

  • Un militant opposé au Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP) manifeste devant la Commission européenne à Bruxelle le 9 décembre 2014, un masque du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker sur le visage
    Un militant opposé au Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement (TTIP) manifeste devant la Commission européenne à Bruxelle le 9 décembre 2014, un masque du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker sur le visage AFP - Emmanuel Dunand
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Centre Presse Aveyron

Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, se retrouvait de nouveau dans la tourmente mercredi après la deuxième salve du scandale LuxLeaks confirmant l'ampleur des pratiques d'évasion fiscale au profit des multinationales mises en place au Luxembourg quand il était Premier ministre.

Plusieurs médias internationaux ont publié mardi soir de nouvelles informations visant notamment les Américains Skype, qui appartient depuis 2011 à Microsoft, Walt Disney et Invista, filiale de Koch Industries des frères ultra-conservateurs Koch.

Cette nouvelle vague du LuxLeaks est intervenue quelques heures avant la prestation de serment officielle de l'ensemble de la Commission Juncker devant la Cour de justice de l'Union européenne... à Luxembourg.

"Objectivement, je suis affaibli, car le Luxleaks laisse croire que j'aurais participé à des manœuvres ne répondant pas aux règles élémentaires de l'éthique et de la morale", a reconnu Jean-Claude Juncker dans un entretien paru mercredi dans le quotidien français Libération.

M. Juncker se défend toutefois en rappelant que 22 des 28 pays de l'UE pratiquent le "tax ruling", le rescrit fiscal qui permet à une entreprise multinationale de demander à l'avance comment sa situation fiscale sera traitée dans un pays donné, afin de faire de l'optimisation fiscale en répartissant coûts et profits entre filiales situées dans différents pays.

"Je ne voudrais pas qu’on me traite d'une façon isolée. (...) Tout le monde fut fautif, car nous n’avons pas réagi à la disparité des normes fiscales nationales qui permettent aux sociétés multinationales de trouver une chambre noire où agir", dit-il dans Libération.

"Je veux croire que ma crédibilité n'est pas entamée", dit-il dans un autre entretien au journal allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung.

S'appuyant sur quelque 28.000 pages de documents obtenus par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), une quarantaine de journaux avaient révélé il y a un mois qu'entre 2002 et 2010, quand M. Juncker était Premier ministre, le Grand-Duché avait passé des accords fiscaux avec 340 multinationales, dont Apple, Amazon, Ikea, Pepsi, Heinz, Verizon et AIG, afin de minimiser leurs impôts, privant les autres Etats européens de milliards d'euros de recettes fiscales.

- 'Politiquement responsable' -

LuxLeaks2 implique 35 nouvelles sociétés, parmi lesquelles Skype, Walt Disney, Koch Industries, mais aussi le Canadien Bombardier ou Telecom Italia. Ces "rulings" ont été conclus entre 2003 et 2011.

Le Luxembourg a réagi mercredi en assurant "soutenir" la volonté de Commission européenne de présenter rapidement un projet de directive sur l'échange automatique d'informations en matière de "tax rulings". Le Grand-Duché affirme déjà pratiquer, "de manière spontanée ou sur demande, l'échange d'informations relatif aux rulings avec d'autres pays", notamment la France et la Belgique.

Le mois dernier, M. Juncker s'est engagé à présenter une loi européenne en ce sens. Les trois premières économies de la zone euro (Allemagne, France et Italie) ont demandé qu'elle soit prête d'ici la fin de l'année. Dans la FAZ, M. Juncker parle plutôt de l'été prochain. Il y évoque aussi "des réflexions" au sein de la Commission pour amener les entreprises à publier leurs accords fiscaux.

"Je ne suis pas l'architecte" du système, "mais je suis politiquement responsable", avait déjà concédé celui qui fut Premier ministre du Luxembourg pendant 18 ans, de 1995 à 2013. A peine entré en fonction, il a dû affronter en novembre une motion de censure déposée par les élus europhobes, qui a été rejetée par le Parlement européen.

M. Juncker a aussi promis qu'il n'interviendrait pas dans des enquêtes en cours qui visent son pays. La Commission européenne a lancé depuis le mois de juin quatre enquêtes sur des accords de "tax ruling", pour déterminer s'ils s'apparentent à des aides d'Etat illégales au regard des règles européennes, dont deux visant le Luxembourg pour des accords avec le géant américain d'internet Amazon et le groupe italien Fiat.

Parmi les techniques utilisées, le journal belge Le Soir évoque des "outils hybrides (Bombardier), des déductions fiscales spectaculaires (95% des revenus pour Skype, qui ne paye donc des impôts que sur les 5% restants) ou des taux réels d'imposition extrêmement faibles (0,28% pour Walt Disney Luxembourg)".

Source : AFP

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